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Hagrid s’interrompit. Il s’éclaircit bruyamment la gorge, regarda Harry et but une longue gorgée.

– Enfin bon, maintenant, je suis de retour, ajouta-t-il d’une voix faible.

– Vous… Vous avez meilleure mine, remarqua Harry qui était décidé à ne pas parler de Sirius.

– Hein ?

Hagrid passa sur son visage une de ses mains massives.

– Ah, oui. Graup se conduit beaucoup mieux, maintenant, beaucoup mieux. Quand je suis revenu, il avait l’air content de me revoir, pour te dire la vérité. C’est un brave garçon… J’ai pensé que je pourrais peut-être lui trouver une compagne…

En temps normal, Harry aurait tout de suite essayé de lui sortir cette idée de la tête. La perspective de voir un deuxième géant, peut-être encore plus sauvage et brutal que Graup, s’installer dans la forêt avait de quoi susciter les plus vives alarmes. Mais Harry était incapable de trouver en lui l’énergie nécessaire pour discuter de la question. Il ressentait déjà l’envie d’être à nouveau seul et se mit à boire son jus de pissenlit à grandes gorgées dans l’intention de hâter son départ.

– Maintenant, tout le monde sait que tu disais la vérité, dit soudain Hagrid à mi-voix. Ça doit être mieux pour toi, non ?

Harry haussa les épaules.

– Écoute…

Hagrid se pencha vers lui par-dessus la table.

– Je connaissais Sirius depuis plus longtemps que toi… Il est mort en combattant, et c’est comme ça qu’il aurait voulu partir…

– Il n’avait pas du tout envie de partir ! répliqua Harry avec colère.

Hagrid inclina sa grosse tête hirsute.

– Non, bien sûr, dit-il à voix basse. Mais quand même, Harry… Il n’était pas du genre à rester chez lui sans rien faire en laissant les autres se battre. Il n’aurait pas pu se supporter s’il n’était pas allé prêter main-forte…

Harry se leva d’un bond.

– Il faut que j’aille voir Ron et Hermione à l’infirmerie, dit-il d’un ton machinal.

– Ah, répondit Hagrid, visiblement peiné. Bon, dans ce cas… prends bien soin de toi et reviens me voir si tu as un mo…

– Ouais… d’accord…

Harry se précipita vers la porte et l’ouvrit. Il était retourné dehors, sous le soleil, avant même que Hagrid ait fini de lui dire au revoir. Lorsqu’il traversa la pelouse dans l’autre sens, des élèves l’appelèrent à nouveau en le voyant passer. Pendant un moment, il ferma les yeux. Il aurait voulu qu’ils disparaissent tous pendant ce temps-là et qu’il n’y ait plus personne dans le parc quand il les rouvrirait…

Quelques jours plus tôt, avant que ses examens soient terminés et qu’il ait eu la vision imposée par Voldemort, il aurait donné presque n’importe quoi pour que le monde des sorciers sache qu’il avait dit la vérité, que Voldemort était bel et bien de retour, qu’il n’était ni un menteur ni un fou. Maintenant, cependant…

Il longea la rive du lac et s’assit à l’abri d’un bouquet d’arbustes qui le cachait à la vue. Les yeux fixés sur la surface étincelante de l’eau, il réfléchissait…

Peut-être voulait-il être seul parce qu’il se sentait coupé des autres depuis sa conversation avec Dumbledore. Une barrière invisible le séparait du reste du monde. Il était – il avait toujours été – un homme marqué. Il n’avait simplement pas compris ce que cela signifiait vraiment…

Pourtant, assis là au bord du lac, avec le poids terrible de son chagrin, la blessure à vif causée par la perte de Sirius, il ne parvenait pas à éprouver de la peur. Le soleil brillait, le parc était rempli d’élèves qui s’amusaient et, même s’il avait le sentiment de leur être aussi étranger que s’il avait appartenu à une autre espèce, il lui était toujours très difficile de croire qu’un meurtre se produirait inéluctablement dans sa vie, qu’un moment viendrait où il lui faudrait tuer ou être tué…

Il resta assis un long moment à contempler l’eau en essayant de ne pas penser à son parrain, de ne pas se souvenir que, de l’autre côté de ce lac, sur la rive opposée, Sirius un jour s’était effondré en combattant une centaine de Détraqueurs…

Le soleil s’était déjà couché lorsqu’il se rendit compte qu’il avait froid. Il se leva alors et retourna au château en s’essuyant le visage avec sa manche.

Ron et Hermione, complètement guéris, quittèrent l’infirmerie trois jours avant la fin du trimestre. Hermione manifestait sans cesse le désir de parler de Sirius mais Ron se chargeait de la faire taire chaque fois qu’elle mentionnait son nom. Harry ne savait toujours pas s’il avait envie ou non de parler de son parrain. Ses souhaits variaient selon son humeur. Il était sûr d’une chose, cependant : malgré tout son malheur présent, il regretterait terriblement Poudlard dans quelques jours, lorsqu’il lui faudrait revenir au 4, Privet Drive. Même s’il comprenait très bien désormais pourquoi il devait y retourner chaque été, il n’en était pas plus heureux pour autant. En fait, il n’avait jamais tant redouté ce retour.

Le professeur Ombrage quitta Poudlard la veille de la fin du trimestre. Elle était discrètement sortie de l’infirmerie à l’heure du dîner dans l’espoir de ne pas se faire remarquer. Mais, malheureusement pour elle, elle était tombée sur Peeves qui avait saisi sa dernière occasion de suivre les instructions de Fred et l’avait chassée avec joie du château en se servant tour à tour d’une canne et d’une chaussette remplie de craies pour la rouer de coups. De nombreux élèves s’étaient précipités dans le hall d’entrée pour la regarder s’enfuir le long de l’allée et les directeurs des maisons n’avaient pas fait preuve d’un zèle excessif pour essayer de les en empêcher. Le professeur McGonagall se contenta de quelques faibles remontrances avant de se rasseoir à la table des professeurs et on l’entendit même regretter à haute voix de ne pas pouvoir courir derrière Ombrage en poussant des cris de joie car Peeves lui avait emprunté sa canne.

Puis le moment de leur dernière soirée à l’école arriva. La plupart des élèves avaient fait leurs bagages et descendaient dans la Grande Salle pour le festin de fin d’année mais Harry, lui, n’avait pas encore commencé à préparer sa valise.

– Tu n’auras qu’à t’en occuper demain, dit Ron qui l’attendait à la porte du dortoir. Allez, viens, je meurs de faim.

– Ce ne sera pas long… Vas-y, je te rejoins…

Mais lorsque la porte du dortoir se fut refermée sur Ron, Harry ne fit aucun effort pour accélérer ses préparatifs. S’il y avait une chose dont il n’avait pas envie, c’était bien d’assister au festin de fin d’année. Il avait peur que Dumbledore le mentionne dans son discours. Sans nul doute, il évoquerait le retour de Voldemort. Il en avait déjà parlé l’année précédente…

Harry ôta du fond de sa grosse valise quelques robes chiffonnées pour les remplacer par d’autres, soigneusement pliées, et remarqua alors un paquet mal emballé qui traînait dans un coin, sous une paire de baskets. Il ne savait plus ce qu’il faisait là et se pencha pour l’examiner.

La mémoire lui revint en quelques secondes. Sirius le lui avait donné au moment de quitter le 12, square Grimmaurd. « Je veux que tu t’en serves si tu as besoin de moi, d’accord ? » avait-il dit.

Harry se laissa tomber sur son lit et ouvrit le paquet. Un petit miroir carré en sortit. Il paraissait vieux et en tout cas très sale. Harry le tint devant son visage et vit son reflet le regarder.

Il retourna le miroir. Sirius avait écrit quelque chose au dos :

« Ceci est un Miroir à Double Sens. J’en possède un autre exactement semblable. Si tu as besoin de me parler, prononce mon nom en le regardant. Tu apparaîtras alors dans mon propre miroir et moi, je te parlerai dans le tien. James et moi utilisions ce moyen pour communiquer lorsque nous étions en retenue dans des endroits différents. »