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Le cœur de Harry se mit à battre plus vite. Il se souvenait avoir vu ses parents morts dans le Miroir du Riséd quatre ans auparavant. Il allait pouvoir parler à nouveau à Sirius à l’instant même, il le savait…

Il jeta un coup d’œil autour de lui pour s’assurer qu’il n’y avait personne. Le dortoir était désert. Il reporta alors son regard sur le miroir, le leva à hauteur de son visage et prononça distinctement à voix haute le nom de Sirius.

Son souffle embua la surface de verre. Avec un sentiment d’exaltation, il rapprocha encore le miroir mais les yeux qui le regardaient derrière la buée étaient les siens. Il essuya le miroir et répéta à haute voix en détachant soigneusement les syllabes :

– Sirius Black !

Rien ne se produisit. Le visage contrarié qu’il voyait devant lui était toujours le sien…

« Sirius n’avait pas le miroir sur lui lorsqu’il a traversé l’arcade, dit alors une petite voix dans la tête de Harry. Voilà pourquoi ça ne marche pas… »

Harry resta immobile un instant puis il jeta le miroir dans la grosse valise où il se brisa. Pendant une minute, une minute entière, une minute illuminée, il avait été convaincu qu’il allait revoir Sirius, lui parler à nouveau…

La déception lui brûlait la gorge. Il se leva et lança ses affaires pêle-mêle dans la valise, par-dessus le miroir brisé.

Une idée lui vint alors en tête… Une idée bien meilleure que celle du miroir… Bien plus importante… Pourquoi n’y avait-il pas pensé avant ? Pourquoi n’avait-il jamais posé la question ?

Il se précipita hors du dortoir et dévala l’escalier en spirale en se cognant contre les murs mais il s’en aperçut à peine. Il traversa à toutes jambes la salle commune entièrement vide, franchit le trou dissimulé par le portrait et courut le long du couloir sans prêter attention à la grosse dame qui lui criait :

– Le festin est sur le point de commencer, il faudrait se dépêcher !

Mais Harry n’avait aucune intention d’assister au festin…

Ce château était rempli de fantômes qui se manifestaient toujours quand on ne leur demandait rien. Maintenant, cependant…

Il descendit des escaliers et parcourut des couloirs sans rencontrer personne, ni vivant, ni mort. De toute évidence, tout le monde était rassemblé dans la Grande Salle. Le souffle court, il arriva devant la classe de sortilèges en songeant avec une tristesse inconsolable qu’il lui faudrait attendre la fin du festin…

Mais au moment où il perdait espoir, il le vit enfin : une silhouette translucide qui flottait au bout du couloir.

– Hé ! Hé, Nick ! NICK !

Le fantôme se retourna alors qu’il avait déjà à moitié traversé le mur, révélant le chapeau aux plumes extravagantes et la tête dangereusement chancelante de Sir Nicholas de Mimsy-Porpington.

– Bonsoir, dit-il avec un sourire en sortant le reste de son corps de l’épais mur de pierre. Je ne suis donc pas le seul à n’avoir pas encore fait mon apparition au festin ? Un mot qui a un sens très différent pour moi, bien sûr…, soupira-t-il.

– Nick, puis-je vous demander quelque chose ?

Une expression très étrange passa sur le visage de Nick Quasi-Sans-Tête. Il glissa un doigt dans la fraise qui lui entourait le cou pour la redresser un peu, cherchant apparemment à se donner le temps de réfléchir. Lorsque sa tête partiellement tranchée sembla sur le point de tomber, il interrompit enfin son geste.

– Heu… maintenant, Harry ? interrogea Nick, décontenancé. Cela ne pourrait pas attendre la fin du festin ?

– Non… Nick, s’il vous plaît, insista Harry. J’ai vraiment besoin de vous parler. On peut aller là ?

Harry ouvrit la porte de la classe la plus proche. Nick Quasi-Sans-Tête poussa un soupir.

– Très bien, dit-il, résigné. Je ne peux pas prétendre que je ne m’y attendais pas.

Harry tenait la porte ouverte pour le laisser passer, mais Nick préféra traverser le mur.

– Vous vous attendiez à quoi ? demanda Harry en refermant la porte.

– À ce que vous veniez me trouver, répondit Nick qui flotta jusqu’à la fenêtre et contempla le parc où le soir tombait. C’est quelque chose qui arrive parfois… Lorsque quelqu’un a subi… une perte.

– Eh bien, vous avez raison, dit Harry, refusant de se laisser démonter. Je suis venu vous voir pour cela.

Nick ne répondit rien.

– C’est simplement parce que…, reprit Harry, qui trouvait soudain la situation plus embarrassante qu’il ne l’aurait pensé, parce que… vous êtes mort. Et pourtant, vous êtes quand même là…

Nick soupira à nouveau en continuant de regarder le parc.

– C’est vrai, non ? poursuivit Harry d’un ton pressant. Vous êtes mort mais je vous parle… Vous pouvez vous promener dans Poudlard et faire plein d’autres choses…

– Oui, répondit Nick Quasi-Sans-Tête à voix basse. Je me promène et je parle, en effet.

– Et donc, vous êtes revenu ? insista Harry. Les gens peuvent revenir, non ? Sous forme de fantômes. Ils ne sont pas obligés de disparaître complètement. C’est bien cela ? ajouta-t-il avec impatience devant le silence de Nick.

Nick Quasi-Sans-Tête hésita puis répondit :

– Tout le monde ne peut pas revenir sous forme de fantôme.

– Qu’est-ce que vous voulez dire ? demanda précipitamment Harry.

– C’est réservé… aux sorciers.

– Ah, dit Harry.

Il éprouva un tel soulagement qu’il faillit éclater de rire.

– Alors, ça va, puisque la personne dont je parle est un sorcier. Il peut donc revenir, n’est-ce pas ?

Nick se détourna de la fenêtre et observa Harry d’un air lugubre.

– Il ne reviendra pas.

– Qui ?

– Sirius Black, dit Nick.

– Mais vous, vous êtes revenu ! répliqua Harry avec colère. Vous êtes bien là… Vous êtes mort, mais vous n’avez pas disparu…

– Les sorciers peuvent laisser sur terre une empreinte de ce qu’ils étaient de leur vivant, ils peuvent revenir se promener sous une forme affaiblie là où leur personne existait autrefois, dit Nick d’un ton accablé. Mais très peu d’entre eux choisissent cette voie.

– Et pourquoi pas ? dit Harry. D’ailleurs, ça n’a pas d’importance, Sirius s’en fiche que ça n’arrive pas souvent, il reviendra, je sais qu’il reviendra !

Sa conviction était si forte que, pendant un bref instant, il tourna la tête vers la porte comme s’il était sûr de voir Sirius, transparent et nacré mais le sourire radieux, la traverser et s’avancer vers lui.

– Il ne reviendra pas, répéta Nick. Il aura… continué.

– Qu’est-ce que vous entendez par « il aura continué » ? dit aussitôt Harry. Continué où ? Écoutez… Que se passe-t-il quand on meurt ? Où va-t-on ? Pourquoi est-ce que tout le monde ne revient pas ? Pourquoi n’y a-t-il pas plein de fantômes partout ? Pourquoi ?

– Je ne peux pas répondre, dit Nick.

– Vous êtes mort, non ? s’exclama Harry d’un ton exaspéré. Qui peut répondre mieux que vous ?

– J’avais peur de la mort, expliqua Nick à mi-voix. J’ai choisi de rester en arrière. Parfois, je me demande si je n’aurais pas dû… En fait, on n’est ni ici, ni là-bas… Je ne suis ni ici, ni là-bas…

Il eut un petit rire triste.

– Je ne sais rien des secrets de la mort, Harry, car j’ai choisi de la remplacer par ma faible imitation de vie. Je crois que de savants sorciers étudient la question au Département des mystères…

– Ne me parlez pas de cet endroit ! répliqua Harry avec hargne.