Выбрать главу

– Maman croyait que nous nous étions battus en duel, dit George.

– Le magasin de farces et attrapes marche toujours, alors ? murmura Harry qui faisait semblant d’ajuster le bouchon de son vaporisateur.

– Nous n’avons pas encore trouvé de local, répondit Fred en baissant la voix un peu plus pendant que Mrs Weasley s’épongeait le front avec son foulard avant de repartir àl’attaque. Et donc, pour le moment, on fait de la vente par correspondance. On a passé une publicité dans La Gazette du sorcier, la semaine dernière.

– Tout ça grâce à toi, mon vieux, dit George. Mais ne t’inquiète pas… Maman ne se doute de rien. Elle ne lit plus La Gazette parce qu’elle raconte des mensonges sur toi et Dumbledore.

Harry eut un sourire. Il avait obligé les jumeaux Weasley à prendre les mille Gallions qu’il avait gagnés en remportant le Tournoi des Trois Sorciers, afin de les aider à réaliser leur rêve d’ouvrir un magasin de farces et attrapes. Il était content, cependant, que Mrs Weasley ne soit pas encore au courant du rôle qu’il avait joué dans l’avancement du projet. Elle estimait en effet que le commerce des farces et attrapes ne constituait pas une carrière convenable pour ses enfants.

La dédoxysation des rideaux occupa la plus grande partie de la matinée. Il était plus de midi lorsque Mrs Weasley ôta enfin le foulard qui lui protégeait le visage. Elle se laissa tomber dans un fauteuil et se releva aussitôt en poussant un cri de dégoût : elle s’était assise sur le sac de rats morts. Les rideaux avaient cessé de bourdonner. Ils pendaient, flasques et humides, imbibés par la vaporisation intensive. Des Doxys inertes étaient entassés dans un seau à côté d’un bol rempli de leurs œufs noirs que Pattenrond flairait avec curiosité et auxquels Fred et George jetaient des regards de convoitise.

– Nous nous occuperons de ceux-là après déjeuner.

Mrs Weasley montra du doigt les armoires vitrées, couvertes de poussière, qui se dressaient de chaque côté de la cheminée. Elles étaient encombrées d’un étrange assemblage d’objets : poignards rouillés, griffes, peau de serpent lovée, boîtes en argent terni portant des inscriptions dans des langues inconnues de Harry et, pire que tout, une bouteille en cristal au bouchon incrusté d’une grosse opale, dont Harry eut la certitude qu’elle était remplie de sang.

La cloche de la porte d’entrée retentit à nouveau. Les regards se tournèrent vers Mrs Weasley.

– Restez ici, dit-elle d’un ton décidé en prenant le sac de rats morts tandis que Mrs Black se remettait à hurler. Je vais vous apporter des sandwiches.

Elle quitta la pièce et referma soigneusement la porte derrière elle. Tout le monde se précipita aussitôt vers la fenêtre pour regarder ce qui se passait sur le perron. Ils virent le sommet d’une tignasse rousse mal peignée et un tas de chaudrons à l’équilibre précaire.

– Mondingus ! dit Hermione. Pourquoi apporte-t-il tous ces chaudrons ?

– Il cherche sans doute un endroit sûr pour les entreposer, répondit Harry. Ce n’est pas ça qu’il était parti faire, le soir où il devait me surveiller ? Aller chercher des chaudrons d’origine douteuse ?

– C’est vrai, tu as raison ! dit Fred.

La porte de la maison s’ouvrit. Mondingus entra, chargé de ses chaudrons, et disparut de leur champ de vision.

– Eh ben dis donc, ça ne va pas plaire à maman…, commenta Fred.

George et lui s’approchèrent de la porte de la chambre et restèrent là, l’oreille tendue. Les hurlements de Mrs Black avaient cessé.

– Mondingus est en train de parler avec Sirius et Kingsley, murmura Fred, le visage concentré. Je n’entends pas très bien… Tu crois qu’on peut risquer les Oreilles à rallonge ?

– Ça vaut peut-être le coup, dit George. Je pourrais filer là-haut en chercher une paire.

Mais à cet instant précis, il y eut au rez-de-chaussée une véritable explosion sonore qui rendit inutile le recours à tout artifice. Ils entendaient distinctement, à présent, ce que criait Mrs Weasley de toute la puissance de sa voix :

– CE N’EST PAS UNE CACHETTE POUR OBJETS VOLÉS, ICI !

– J’aime beaucoup entendre maman hurler contre quelqu’un d’autre, dit Fred avec un sourire satisfait. Ça change agréablement.

Il entrouvrit la porte de quelques centimètres pour que la voix de Mrs Weasley leur parvienne plus facilement.

– COMPLÈTEMENT IRRESPONSABLE ! VOUS CROYEZ QUE NOUS N’AVONS PAS SUFFISAMMENT DE SOUCIS COMME ÇA SANS QU’IL SOIT BESOIN DE VOUS VOIR ARRIVER AVEC UN CHARGEMENT DE CHAUDRONS VOLÉS !

– Ces idiots la laissent s’échauffer, commenta George en hochant la tête. Il faut l’arrêter tout de suite, sinon la vapeur s’accumule et ça peut durer des heures. En plus, elle mourait d’envie de s’attaquer à Mondingus depuis le jour où il s’est éclipsé au lieu de te surveiller, Harry… Tiens, la mère de Sirius s’y remet, elle aussi.

La voix de Mrs Weasley fut étouffée par les nouveaux hurlements des portraits du hall.

George s’apprêtait à refermer la porte pour atténuer le vacarme lorsqu’un elfe de maison se glissa par l’entrebâillement et pénétra dans la pièce.

En dehors du chiffon crasseux noué autour de sa taille à la manière d’un pagne, il était complètement nu. Il avait l’air très vieux, sa peau semblait beaucoup trop grande pour lui, et bien qu’il fût chauve, comme tous les elfes de maison, de grosses touffes de poils blancs sortaient de ses oreilles semblables à celles d’une chauve-souris. Ses yeux d’un gris larmoyant étaient injectés de sang et son gros nez charnu avait plutôt la forme d’un groin.

L’elfe ne prêta aucune attention à Harry ni aux autres. Comme s’il ne les voyait pas, il s’avança en traînant des pieds, le dos voûté, et se dirigea d’un pas lent et obstiné vers le fond de la pièce en marmonnant sans cesse, d’une voix rauque et grave qui ressemblait au coassement d’un crapaud.

– … il a une odeur d’égout et en plus, c’est un bandit, mais l’autre ne vaut pas mieux, cette horrible vieille bonne femme traître à son sang avec ses sales gosses qui viennent semer la pagaille dans la maison de ma maîtresse ! Oh, ma pauvre maîtresse, si elle savait, si elle savait quelle vermine est entrée dans sa demeure, que dirait-elle à ce pauvre Kreattur ? Oh, quelle honte, des Sang-de-Bourbe et des loups-garous et des traîtres et des voleurs, pauvre vieux Kreattur, que peut-il faire… ?

– Bonjour, Kreattur, lança Fred d’une voix claironnante en fermant la porte avec un claquement sec.

L’elfe de maison se figea sur place. Il cessa de marmonner et sursauta dans une réaction de surprise trop appuyée pour être convaincante.

– Kreattur n’a pas vu le jeune maître, dit-il en se tournant pour s’incliner bien bas devant Fred.

Le nez face au tapis, il ajouta d’une manière parfaitement audible :

– Un sale petit gamin, celui-là, fils de traîtresse, infidèle à son sang.

– Pardon ? dit George. Je n’ai pas très bien compris la dernière phrase.

– Kreattur n’a rien dit, affirma l’elfe en s’inclinant une deuxième fois devant George.

Il ajouta à haute et intelligible voix :

– Et voilà son jumeau, des sales bêtes contre nature, ces deux-là.

Harry ne savait pas s’il fallait rire ou non. L’elfe se redressa en leur jetant à tous un regard hostile puis, apparemment convaincu qu’ils ne pouvaient l’entendre, il continua de marmonner :

– … et la Sang-de-Bourbe qui est toujours là à faire sa fière, oh, si ma maîtresse savait, oh, comme elle pleurerait ! Et en voilà un nouveau, Kreattur ignore son nom. Qu’est-ce qu’il fait ici ? Kreattur n’en sait rien du tout…

– Voici Harry, Kreattur, risqua Hermione. Harry Potter.