Выбрать главу

Verdi modifie son idéal dramatique et, dans Aïda (1871), s’attache davantage à la psychologie des personnages, à l’atmosphère ambiante et à l’intensité lyrique du drame.

En France, la distinction entre opéra et opéra-comique tend à s’effacer : l’un insère parfois des épisodes parlés, tandis que l’autre les supprime. Les compositeurs, en réaction contre les débordements lyriques du romantisme, reviennent à un art néo-classique, sobre et mesuré avec C. Gounod*, dont

le Faust (1859) est resté au répertoire, C. Saint-Saëns*, G. Bizet*, E. Chabrier*, E. Lalo* et J. Massenet*. Alfred Bruneau (1857-1934) et Gustave Charpentier (1860-1956), sensibles à l’influence de Wagner, composent des drames naturalistes, tandis que V.

d’Indy*, disciple de C. Franck*, pré-

fère les légendes symbolistes, de même que ses émules de la Schola cantorum, Albéric Magnard (1865-1914), Ernest Chausson (1855-1899), Pierre de Bré-

ville (1861-1949), Guy Ropartz (1864-1955) et Charles Bordes (1863-1909).

Mais le romantisme avait éveillé

l’esprit national de tous les peuples.

Après 1850, de nouvelles écoles surgissent en Europe, qui affirment leur personnalité et leur esprit d’indépendance en s’inspirant de leur folklore.

En Bohême, B. Smetana* chante dans ses opéras (la Fiancée vendue, 1866 ; Dalibor, 1868) la vie de son peuple, sa lutte contre la domination étrangère et la foi dans le destin de la nation.

Après lui, L. Janáček* rompt avec la tradition classique et s’impose par son dynamisme, un style vocal très personnel et un langage étonnamment moderne (Jenufa, 1894-1903). En

Russie, où l’opéra italien a régné en maître, l’opéra de Mikhaïl Ivanovitch Glinka (1804-1857) la Vie pour le tsar (1836) et surtout celui de Aleksandr Sergueïevitch Dargomyjski (1813-1869) le Convive de pierre (1872) ouvrent à la musique dramatique des voies nouvelles, dans la recherche de la vérité et du réalisme. Le Convive a une forme tout à fait libre, qui suit le déroulement de l’action et abandonne le découpage en numéros de l’opéra traditionnel. Lorsque, vers 1860, se constitue le « groupe des Cinq* », qui réunit Mili Balakirev (1837-1910), César Cui (1835-1918), A. P. Boro-dine*, N. A. Rimski-Korsakov* et

M. P. Moussorgski*, tous, sauf le premier, s’intéressent au théâtre. Dans Boris Godounov (1874), Moussorgski allie à la souplesse de la forme le réalisme de son récitatif, sensible à la moindre inflexion psychologique, à la grandeur tragique comme à l’intense expression de la vie populaire.

P. Tchaïkovski*, son contemporain, influencé par la musique occidentale, a laissé deux opéras qui révèlent un autre aspect de l’âme slave.

En Espagne, après une tentative de rénovation de l’opéra se fondant sur le chant italien, un art national d’inspiration populaire et rebelle aux influences étrangères, dont Felipe Pedrell (1841-1922) est l’animateur, s’instaure avec Tomás Bretón (1850-1923), Ruperto Chapí (1851-1909), I. Albéniz* et E. Granados*.

À l’aube du XXe s. se dessine une véritable renaissance du drame lyrique, qui, selon les pays et les hommes, va prendre des formes très diverses. En Allemagne, R. Strauss*, après Wagner, donne à l’opéra, qu’il n’aborde qu’en 1894, une nouvelle importance internationale. Wagnérien, il est surtout novateur et révolutionnaire dans Salome (1905) et Elektra (1908), où se désagrège l’harmonie traditionnelle, puis il revient à un art néo-classique dans la comédie musicale (le Chevalier à la rose, 1911 ; Capriccio, 1941) et surtout dans Ariane à Naxos (1912), où il juxtapose opera seria et opera buffa.

En Italie après Verdi, l’école vériste, d’abord médiocrement représentée par Pietro Mascagni (1863-1945) avec Ca-valleria rusticana (1890) et Ruggero Leoncavallo (1858-1919) avec Pa-gliacci (1892), essaie, sous l’impulsion d’Umberto Giordano (1867-1948),

de concilier vérisme et wagnérisme (Andrea Chenier, 1896). Mais c’est avec G. Puccini*, compositeur méprisé à tort aujourd’hui, qu’elle acquiert, grâce à la Bohême (1896), la Tosca (1900), la Fanciulla del West (1910), Il Tabarro (1918) et Gianni Schicchi (1918), une réputation mondiale, due en grande partie à l’excellence des livrets, qui sont traités avec un sens inné du théâtre et en usant d’un langage qui est souvent neuf et original.

Mais, au début du XXe s., la France contribue brillamment au renouvellement du drame lyrique avec trois oeuvres remarquables : Pelléas et Mélisande (1902) de C. Debussy*, Ariane et Barbe-Bleue (1907) de P. Dukas* et Pénélope (1913) de G. Fauré*. Alors que le public partage ses goûts entre le drame wagnérien, l’opéra vériste italien et celui de Massenet, aussi sé-

duisant que voluptueux, Debussy, traditionaliste, encore romantique, mais sensible à la poésie symboliste et à la

peinture impressionniste, affirme le premier son indépendance. Dans Pelléas, composé sur un livret de Maeter-linck, un fluide commentaire orchestral renforce, sans jamais couvrir les voix, l’émotion suscitée par les mots et les sous-entendus qu’ils recouvrent, donnant ainsi à ce « poème du destin », où les personnages, impuissants à s’accomplir, sont menés par la fatalité, sa profonde résonance, sans solennité ni emphase. Ariane est un « conte allégorique » dont le livret est inspiré du même auteur. Mais ce « poème de la délivrance », où l’action est aussi toute intérieure, est soutenu par une ample symphonie, toujours chatoyante, souvent éblouissante. À l’inverse, Pénélope baigne dans une atmosphère musicale pénétrante, mais réservée et presque intime, même au cours des scènes les plus passionnées. Bien que Fauré, comme Debussy et Dukas, ré-

pugne aux formes dramatiques traditionnelles, son opéra, faute d’éclat, n’a pas trouvé l’audience qu’il mérite.

Tradition et révolution vont maintenant aller de pair, et les diverses tendances s’interpénétrer souvent par-delà les nationalismes. Avant même la mort de Debussy, le domaine de la dissonance s’élargit considérablement, et le principe de la tonalité est battu en brèche. L’opéra compte encore en France des compositeurs modérés,

comme Alfred Bachelet (1864-1944) ou Henri Rabaud (1873-1944), que la jeune génération, sensible aux techniques nouvelles (bitonalité, polytonalité, polyharmonie, polyrythmie), fera vite oublier. Citons Marcel Delannoy (1898-1962), Emmanuel Bondeville

(né en 1898), Francis Poulenc (1899-1963), Henry Barraud (né en 1900), Henri Sauguet (né en 1901), Henri Tomasi (1901-1971) et Marcel Landowski (né en 1915). A. Honegger*, avec Antigone (1927), affirme avec force son sens de l’architecture, son dynamisme et son lyrisme concentré jusqu’à la violence. D. Milhaud*, dans sa trilogie d’Eschyle (Agamemnon, 1913 ; les Choéphores, 1915 ; les Eu-ménides, 1917-1922), use pour la première fois du choeur parlé et rythmé, soutenu par la percussion. Le Russe I. Stravinski*, dans son premier opéra, le Rossignol (1914), renonce aux stri-

dences du Sacre (1913) et, malgré son antiwagnérisme, se sert du leitmotiv.

OEdipus Rex (1927) est une oeuvre beaucoup plus personnelle. Stravinski y adopte la langue latine et emprunte à l’oratorio un récitant dont la présence est peu favorable à la représentation scénique. Dans son dernier opéra, The Rake’s Progress (1951), il déconcerte en se pliant à toutes les conventions de l’opéra classique. S. Prokofiev*, classique d’esprit, écrit l’Amour des trois oranges (1919) et l’Ange de feu (1919-1927) en Occident. Après son retour en U. R. S. S., il revient à une conception plus simple de son art, mieux en rapport avec le contexte social de son pays downloadModeText.vue.download 505 sur 625