ration ayant à sa tête un procureur gé-
néral. La société est surtout répandue en Italie, en Espagne et en Angleterre, où elle fut introduite au XIXe s. par le cardinal Newman.
L’Oratoire de France, lui, fut fondé au XVIIe s. par Pierre de Bérulle*, qui songeait à l’établir depuis 1601. Bé-
rulle hésitait, se sachant peu apte au commandement et à l’organisation
pratique ; puis, voyant que saint Fran-
çois* de Sales ne voulait pas s’en charger et qu’il ne devait pas compter sur les prêtres de l’Oratoire de Rome, il se décida enfin et fonda l’Oratoire de France ; en 1611, la petite communauté comptait six prêtres.
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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 14
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Pour comprendre l’importance de
cette fondation, il faut se souvenir de l’état du clergé français au XVIIe s. Le système du bénéfice dissocié de la charge des âmes l’a ruiné moralement, les guerres religieuses ont aggravé le désordre, et les décrets du concile de Trente sont restés lettre morte. Pour Bérulle, la restauration de la foi catholique passe par la restauration de la sainteté et de la science du prêtre. Il écrit qu’aux premiers temps de l’Église
« Dieu conservait en un même ordre autorité, sainteté et doctrine, et unissait ces trois perfections en l’ordre sacerdotal. Mais le temps, qui corrompt toutes choses, ayant mis le relâchement en la plus grande partie du clergé, et ces trois qualités, autorité, sainteté et doctrine, que l’Esprit de Dieu avait jointes ensemble étant divisées par l’esprit de l’homme et l’esprit du siècle, l’autorité est demeurée aux prélats, la sainteté aux religieux et la doctrine aux acadé-
mies, Dieu, en ce divorce, conservant en diverses parties de son Église ce qu’il avait uni en l’état ecclésiastique. »
Selon Bérulle, on le voit, le remède est de restaurer le premier ordre de tous, l’ordre sacerdotal. « Hé quoi !, s’écrie-t-il, serait-il possible que Notre-Seigneur ait désiré une si grande perfection des ordres religieux et qu’il ne l’ait pas exigée de son propre ordre, qui est l’ordre sacerdotal ! », et, s’adressant à l’Oratoire, il poursuit :
« Nous sommes rassemblés pour [...]
rentrer dans nos droits, pour jouir de notre succession légitime, pour avoir le Fils de Dieu en partage, pour avoir part à son esprit, à sa lumière, à sa sainteté et à son autorité communiquée aux prélats par Jésus-Christ et par eux aux prêtres. »
Dans son esprit, l’Oratoire n’aura pas d’autre ambition que de restaurer la dignité sacerdotale. Bérulle veut que son ordre soit aux évêques ce que les Jésuites sont au Saint-Siège, et rien ne lui sera plus étranger que l’exemption des religieux.
Dans la bulle d’institution Sacro-sanctae promulguée par Paul V en
1613, il est dit que « l’oratorien se dévouera à toutes les fonctions qui appartiennent en propre à l’état de prê-
trise » ; aussi, les règles de la congré-
gation données par Bérulle sont-elles volontairement très vagues et très souples, permettant une très grande adaptation et une très grande liberté de ses membres.
L’Oratoire est un des ordres où
l’on commande le moins, comme le
fait remarquer Bossuet dans l’oraison funèbre du père Bourgoing : « Là, une sainte liberté fait un saint engagement ; on obéit sans dépendre, on gouverne sans commander, toute l’autorité réside dans la douceur. » La liberté règne à l’Oratoire ; Richard Simon* et Malebranche* seront des oratoriens.
Dans la bulle de fondation, Paul V
ajouta une clause particulière, l’« instruction de la jeunesse », que Bérulle ne désirait pas, voulant sans doute mé-
nager les Jésuites : en effet, la concurrence des collèges oratoriens sera à l’origine de l’inimitié des Jésuites envers les Oratoriens. Vers 1623,
l’Oratoire possédait déjà vingt-trois collèges ; l’enseignement s’y faisait en français, mesure révolutionnaire à l’époque.
En 1616, la maison mère fut trans-férée rue Saint-Honoré, et l’église que Bérulle fit construire à partir de 1621 (l’actuelle chapelle protestante de l’Oratoire) devint la paroisse de la Cour.
En 1619, l’Oratoire de Provence du père Romillion, fondé sur le modèle de celui de saint Philippe Neri, réunit à l’Oratoire de France ses dix maisons.
De 1611 à 1629, Bérulle fonda quarante-deux établissements en France et deux à l’étranger (Malines et Rome).
L’Oratoire sera une pépinière
d’évêques, de pasteurs, de savants et de saints ; il n’est que de citer Charles de Condren (1629-1641) et François Bourgoing (1641-1662), deuxième et troisième supérieur de l’Oratoire, saint Jean Eudes, Jean-Jacques Olier, Jean-Baptiste Massillon, Jules Mascaron, Malebranche, Richard Simon, etc. À la fin du XVIIe s. et au XVIIIe s., l’Oratoire fut agité par les querelles théologiques, et nombre de ses membres adhérèrent au jansénisme, comme Quesnel et deux supérieurs généraux : Abel Louis de Sainte-Marthe (1672-1696) et Pierre d’Arères La Tour (1696-1733). Lors de sa suppression en 1792, l’Oratoire comptait plus de sept cents membres répartis en soixante-dix maisons.
Après la Révolution, deux essais de restauration, l’un entrepris en 1806 par Louis de Fontanes et l’autre en 1839
par de Genoude, n’aboutirent pas, mais, le 16 août 1852, le père L. P. Pé-
tétot, curé de Saint-Roch, réunissait deux prêtres, les pères A. Gratry et H.
de Vabroger, ainsi que trois laïques et restaurait l’Oratoire. Le 22 mars 1864, Pie IX, constatant que l’oeuvre « avait la même fin que l’ancienne congrégation de l’Oratoire », la reconnaissait et la confirmait pour la continuer ; il lui donnait le titre d’Oratoire de Notre Seigneur Jésus-Christ et de Marie Immaculée. Les constitutions furent définitivement approuvées en 1892.
Pour le père Gratry, l’Oratoire devait
être « un lieu de prières, d’étude dans la prière et de propagation évangé-
lique par la parole et par la plume [...].
Les moyens sont d’abord la réunion de plusieurs dans un lieu de prières et d’études, dans cet Oratoire qui se compose de deux éléments, l’oratoire proprement dit, et puis l’atelier de travail, ou, si l’on veut, la chapelle et la bibliothèque. »
Malgré deux dispersions, en 1880
et en 1903, l’Oratoire, reconstitué en 1920 par le père Courcoux, a continué à mener à bien ce qu’un de ses membres appelait l’apostolat de la science.
P. R.
A. Chauvin, le Père Gratry. L’homme et l’oeuvre (Bloud, 1901). / L. Ponnelle et L. Bor-det, Saint Philippe de Neri et la société romaine de son temps, 1515-1595 (Bloud et Gay, 1928 ; nouv. éd., Éd. du Vieux Colombier, 1958). /
J. Dagens, Bérulle et les origines de la restauration catholique, 1575-1611 (Desclée De Brouwer, 1952). / A. George, l’Oratoire (Grasset, 1954).
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oratorio
Drame lyrique composé en général sur un sujet religieux ou moralisateur et exécuté sans mise en scène à l’église ou au concert.
Issu d’anciennes formes liturgiques et notamment des jeux et mystères du Moyen Âge, l’oratorio subit au cours de son histoire l’influence de la cantate et de l’opéra. En raison de ses variations, il constitue un genre musical hybride dont la définition reste imprécise. Sans négliger l’apport du drame liturgique, il trouve exactement son origine dans les chants des évangiles de la Passion, pratiqués très tôt à l’église sous forme de « dialogues » durant les offices de la semaine sainte. Le texte est confié à un récitant, dont la présence sera souvent par rapport à l’opéra — que ce rôle soit dévolu à un soliste ou à un choeur — le signe distinctif de l’orato-