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rio ; les paroles du Christ sont chantées par une basse, celles de divers protagonistes par un autre interprète, et les interventions de la foule par un choeur polyphonique.

Vers la fin du XVe s. et durant le XVIe, les musiciens s’emparent de cette tradition. Le Néerlandais J. Obrecht* (1450-1505), le Français Claudin de Sermisy (v. 1490-1562), les Italiens Vincenzo Ruffo (v. 1510-1587) et Giovanni

Matteo Asola (v. 1560-1609), les Flamands Cyprien de Rore (1516-1565) et Roland de Lassus*, les Espagnols Francisco Guerrero et Tomás Luis de Victoria* ainsi que l’Anglais W. Byrd*

créent la Passion, genre musical qui s’apparente à l’oratorio. Cependant, le terme générique d’oratorio s’élabore vers le même temps à Rome en marge du culte officiel. Des compositeurs liés à la Contre-Réforme, comme Giovanni Animuccia (v. 1500-1571), Palestrina*, Giovenale Ancina (1545-1604) et l’Espagnol Francisco Soto de Langa (v. 1534-1619), écrivent, à l’intention des réunions organisées à l’Oratoire de saint Philippe Neri, des laudi spirituali. Ce type de chant « en dialogue », inspiré par le récent style monodique et appelé parfois cantata, est bientôt, en raison du lieu où il est chanté, nommé oratorio. Ce vocable tend, par la suite, à s’appliquer à toute oeuvre dramatique pieuse. La Rappresentazione di Anima e di Corpo (le Débat de l’âme et du corps) d’Emilio Dei Cavalieri (v. 1550-1602), exécutée à l’oratoire romain de Santa Maria in Vallicella (1600), est souvent considérée comme le premier oratorio, bien que la forme en soit assez vague. Ce poème moral, où chaque scène comprend une succession de canzonetti spirituali, des choeurs harmoniques et des récitatifs, n’en suscite pas moins une vague d’opéras « sacrés », tels l’Eu-melio (1606) d’Angostino Agazzari (1578-1640), le Sant’Alessio (1632) de Stefano Landi (v. 1590-1639), qui, bien que distrayant les cours princières privées d’opéras durant le carême, dé-

tournent le genre de sa véritable mission. Dans un répertoire plus modeste et qui, par contre, reste fidèle à la lauda dialoguée s’opère la transformation essentielle qui conduira à l’oratorio.

Dans le Teatro armonico spirituale...

(1619), pourtant peu dramatique, de Giovanni Francesco Anerio (v. 1567-1630), le choeur fait office de récitant, et chaque personnage mis en cause chante en solo.

Bientôt, cette forme primitive se modifie : un soliste se substitue au choeur. En ce sens, la lauda dialoguée ne diffère plus guère des derniers madrigaux de Monteverdi*. Elle illustre la période de transition qui conduit à l’« histoire sacrée », premier modèle de l’oratorio classique, du Romain Giacomo Carissimi* (1605-1674).

Dans ses « histoires » (Jephté, Jonas, le Jugement de Salomon, etc.), celui-ci adopte sur le plan littéraire la langue latine et la division en deux parties (il y a trois actes dans l’opéra), et sur le plan musical la forme de la cantate d’église. Un récitant (historicus) narre l’action, interrompu seulement par les airs contemplatifs des solistes, les choeurs et la symphonie. Ce style se ré-

pand en Europe par l’intermédiaire des nombreux élèves de Carissimi : italiens (Antonio Cesti [1623-1669], Alessandro Scarlatti*), allemands (Johann Kaspar von Kerll [1627-1693], Johann Philipp Krieger [1649-1725]) et fran-

çais (M. A. Charpentier*). Mais, dès le milieu du XVIIe s., la langue vulgaire tend à supplanter le latin. Composé sur des textes didactiques ou moraux, qui paraphrasent les récits de la Bible et des Évangiles ou racontent la vie des saints, l’oratorio volgare se développe avec Giovanni Battista Vitali (v. 1644-1692), Alessandro Stradella (1644-1682), Giovanni Battista Bassani

(v. 1657-1716), A. Scarlatti, Antonio Lotti (1666-1740), A. Vivaldi*, etc.

Au début du XVIIIe s., le genre tombe rapidement sous la coupe de l’école napolitaine. Léonardo Vinci (entre 1690

et 1696-1730), Francesco Feo (1691-1761), Leonardo Leo (1694-1744) et Pergolèse (1710-1736) composent des oratorios dans le même style que leurs oeuvres scéniques : le récitatif s’anime et devient un recitativo secco ; l’aria da capo impose sa structure ternaire, tandis que l’orchestre bénéficie des derniers progrès de l’instrumentation.

En Allemagne, les cours italianisées (Vienne, Munich) accueillent avec empressement des musiciens de la pé-

ninsule, comme Antonio Draghi (1635-1700), Antonio Caldara (1670-1736), Giovanni Battista Bononcini (1670-1747), dont les oratorios ne diffèrent plus de leurs opéras que par l’usage occasionnel des choeurs. L’influence de ces musiciens s’exerce sur leurs collègues autochtones, Johann Joseph Fux (1660-1741), et plus tard Florian Leopold Gassmann (1729-1774), Ignaz Holzbauer (1711-1783), Karl Ditters von Dittersdorf (1739-1799), enfin sur des maîtres comme Haydn et Mozart.

Cependant, malgré d’illustres noms, l’oratorio de l’école viennoise ne peut rivaliser avec celui de l’Allemagne du Nord. À Dresde, le Saxon Heinrich Schütz* se sert très tôt du stile recitativo (Histoire de la Résurrection, 1623). Dans ses Symphoniae sacrae (1629, 1647, 1650), ses trois Passions, son Oratorio de Noël (1660-1664), il montre sa connaissance de tous les procédés de l’opéra italien et fait preuve d’un grand sens dramatique au service d’une foi sincère. Il sait enfin faire appel — ce qu’exige l’oratorio — à l’imagination de l’auditeur, privé du support de la scène. Après lui, Johann Klemm (v. 1593 - v. 1657), Matthias Weckmann (1619-1674), Wolfgang

Carl Briegel († 1712), Christoph Bernhard (1627-1692) et le Viennois Johann Jacob Löwe (1629-1703) suivent la même voie. D’autres, comme

Johann Eramus Kindermann (1616-

1655), Andreas Hammerschmidt (1611

ou 1612-1675), Johann Rudolf Ahle (1625-1673), W. Fabricius, Johann Christoph Bach (1642-1703) et Friedrich Wilhelm Zachow (1663-1712), le premier maître de Händel, s’adonnent au « dialogue spirituel ». L’oratorio, simple et populaire avec Carissimi, se germanise ; son style se fait sévère, tandis que choeurs et chorals se multiplient. En même temps, il devient une oeuvre d’inspiration mystique. En 1715, Johann Mattheson (1681-1764), musicien d’esprit conservateur, mais expert en art italien, introduit le genre à la cathédrale de Hambourg. Ses mo-dèles devaient inspirer à J.-S. Bach ses chefs-d’oeuvre, la Passion selon saint Jean (1723), la Passion selon saint Matthieu (1729), le Magnificat (1723) et l’Oratorio de Noël (1734).

Peu après, G. F. Händel* compose

à Londres la majeure partie de ses ora-

torios. Les seize qui s’inspirent de la Bible sont conçus selon de vastes proportions et animés d’un extraordinaire souffle religieux. De nombreux choeurs harmoniques, fugués ou descriptifs se mêlent intimement à l’action dans Is-raël en Égypte (1739), grandiose « tragédie chorale », dans le Messie (1742) ou dans Judas Macchabée (1747).

Händel donne d’autre part à l’oratorio profane ses lettres de noblesse ; des cantates comme la Fête d’Alexandre (1736) ou L’Allegro, il Pensieroso ed il Moderato (1740) sont en fait de vrais drames musicaux. Vers la même époque, Keiser* (1674-1739), Telemann* (1681-1767), auteur de qua-

rante-quatre Passions et de trente-trois oratorios, Karl Heinrich Graun (1704-1759) et Johann Adolf Hasse (1669-1783) cherchent une voie moyenne

entre le style moderne italien et le contrepoint allemand. Dans ses vingt Passions et ses deux oratorios, Carl Philipp Emanuel Bach (1714-1788)

fait la transition entre le style sévère de ses aînés et celui, plus léger, de l’école classique viennoise. W. A. Mozart a laissé quelques partitions spirituelles pouvant se rattacher à l’oratorio, notamment Davidde penitente (1785).

Quant à J. Haydn*, il n’aborde le genre qu’à la fin de sa vie et lui imprime une direction nouvelle, mi-religieuse (la Création, 1798), mi-descriptive (les Saisons, 1801).

En France, les premiers essais de

« dialogues spirituels » de H. Du*