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Mont (1610-1684) et les « histoires sacrées » de M. A. Charpentier subissent la concurrence du grand motet versaillais et ne réussissent pas à s’imposer. C’est seulement après 1750 que Mondonville* (1711-1772) présente un premier oratorio biblique, les Israélites à la montagne d’Horeb (1758), puis les Fureurs de Saül (1759). Le genre connaît alors suffisamment de succès pour tenter F. J. Gossec* (1734-1829), l’Allemand Johann Christoph Vogel (1756-1788), fixé à Paris, et J. F. Le Sueur* (1760-1837), le maître de

Berlioz.

Au XIXe s., après Beethoven*, auteur d’un seul oratorio (le Christ au mont des Oliviers, 1803), le romantisme, mouvement de tendance catholique,

inspire des musiciens de toutes les confessions. L’oratorio, victime de la confusion des genres, prend alors en Europe de multiples aspects en puisant ses sujets non seulement dans les textes bibliques, mais aussi dans l’histoire universelle et la légende, mêlant parfois le sacré et le profane. Enfin, les dernières acquisitions de l’orchestre downloadModeText.vue.download 531 sur 625

La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 14

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symphonique classique lui permettent d’accroître sa puissance d’évocation et de rayonnement. Alors que Johann Christian Friedrich Schneider (1786-1853) [le Jugement dernier, 1819 ; le Déluge, 1823] et Louis Spohr (1784-1859) [les Fins dernières, 1826] renforcent le pouvoir dramatique de l’oratorio, F. Schubert risque un timide essai (le Chant de Myriam, 1828), Johann Carl Gottfried Loewe (1796-1869) recourt à la légende et à l’histoire (Destruction de Jérusalem, 1829 ; Gutenberg, 1837) et F. Mendelssohn*

donne ses deux chefs-d’oeuvre (Paulus, 1836 ; Elias, 1846), où il se révèle, en y introduisant chorals, canons et fugues, disciple de J.-S. Bach et de Händel. De son côté, R. Schumann*

commente ses rêves fiévreux, angoissés ou mystiques dans le Paradis et la Péri (1843), les Scènes du Faust de Goethe (1844-1853), Manfred (1849), le Pèlerinage de la Rose (1851), féerie élégiaque, pastorale et religieuse, et le Requiem pour Mignon (1849), qui sera transporté à la scène par Liszt. Mais ces oeuvres participent de plusieurs formes à la fois. Il en est de même avec Berlioz* : Roméo et Juliette (1839) est une symphonie-cantate, la Damnation de Faust (1846) un oratorio-opéra.

Seule l’Enfance du Christ (1854)

annonce la renaissance de l’oratorio français moderne. Un récitant relie les divers épisodes et commente les événements. F. Liszt*, catholique sincère, semble obéir à un appel intérieur dans la Légende de sainte Élisabeth (1857-1862) et Christus (1855-1867).

Il donne à l’orchestre un rôle exceptionnel, mais supprime le récitant. Si l’oratorio conserve encore parfois son caractère de dévotion et d’édification,

c’est en raison de l’influence posthume de Händel et de Mendelssohn, qui s’exerce surtout à Londres avec l’Italien Michele Costa (1808-1884) et l’Anglais sir Arthur Seymour Sullivan (1842-1900). Dans l’ensemble, les compositeurs d’oratorios se tournent vers le profane ou se rapprochent du style symphonique inauguré par Liszt.

À la tendance romantique Berlioz-

Liszt obéissent les Français Gounod*

(Tobie, 1866 ; Mors et Vita, 1885) et Franck* (Ruth, 1846 ; Rédemption, 1871 ; les Béatitudes, 1879). Saint-Saëns (le Déluge, 1876 ; la Lyre et la harpe, 1879), bien que d’esprit classique, s’inscrit aussi dans ce courant.

Tandis que Vincent d’Indy* (le Chant de la cloche, composé de 1879 à 1883 ; la Légende de saint Christophe, composée de 1908 à 1915, drame sacré créé en 1920) se tourne vers la légende, Massenet*, si l’on excepte Marie-Magdeleine (1873), infuse au genre le sensualisme de ses opéras. L’Allemand Brahms*, protestant, ne s’appuie ni sur la liturgie ni sur le chant grégorien dans Ein deutsches Requiem (1869) et se rapproche de Schumann dans Ri-naldo (1869) et Schicksalslied (Chant du destin, 1871).

Dans le dernier tiers du XIXe s., l’oratorio protéiforme connaît une grande vogue. Il serait vain d’énumérer toutes les oeuvres qui illustrent ce genre. Citons la Tour de Babel du Russe Anton Rubinstein (1829-1894), Devant la porte du cloître (1871) du Norvégien E. Grieg*, The Resurrection (1875) de l’Irlandais Charles Villiers Stanford (1852-1924), la Rose de Sharon (1884) de l’Écossais Alexander Campbell Mackenzie (1847-1935), Sainte Ludmilla (1886) du Tchèque Dvořák*, Franciscus (1888) du Belge Edgar

Tinel (1854-1912), Amarus (1897) du Tchèque Janáček* et Das dunkle Reich (l’Empire obscur, 1929), dernier oratorio inspiré du romantisme allemand, de Hans Pfitzner (1869-1949). En Italie, le genre reprend vigueur avec Lorenzo Perosi (1872-1956), maître de la chapelle Sixtine, auteur d’oratorios sur textes latins tirés des Écritures.

Au XXe s., l’oratorio a une forme de plus en plus incertaine. Il se confond tantôt avec la cantate (avec ou sans

récitant), tantôt avec l’opéra ou la symphonie. Il est plus que jamais lié à l’évolution rapide du langage musical et tend, dès l’entre-deux-guerres, à refléter plus continûment que dans le passé les convictions métaphysiques ou morales du compositeur. Aux environs de 1900 naissent des oeuvres aussi dissemblables que le classique Songe de Gerontius (1900) d’Edward Elgar (1857-1934), que le Prométhée (1900) de G. Fauré* et que les Gurrelieder (1900) de A. Schönberg*. Par la suite, la diversité n’est pas moindre. Citons, sans distinction de nationalités, la Croisade des enfants (1902) de G. Pierné, Psaume XLVII (1904) de F. Schmitt*, la 8e symphonie, dite des Mille (1910), de G. Mahler*, divisée en deux parties (1o Veni Creator ; 2o dernière scène du Faust de Goethe), le Martyre de saint Sébastien (1911) de Claude Debussy*, Prométhée ou le Poème du feu (1911) d’Aleksandr Nikolaïevitch Skriabine (1872-1915), le Retour de l’enfant prodigue (1917) et le Cantique de la Sagesse (1935) de D. Milhaud*, Vidapura (1918) de Heitor Villa-Lobos* (1887-1959), San Francesco d’Assisi (1920) de Gian Francesco Malipiero (1882-1973), le Roi David (1921), Judith (1925), Jeanne d’Arc au bûcher (1935) et Nicolas de Flue (1940) d’Arthur Honegger*, le Miroir de Jésus (1923) d’André Caplet (1878-1925), OEdipus-Rex (1927), Perséphone (1934), Can-ticum sacrum (1955) et Threni (1958) de Stravinski*, Cantata profana

(1930) de Bartók*, Das Unaufhörliche (l’Éternel, 1931) de Paul Hindemith*, Maria Egiziaca (1932) d’Ottorino Respighi (1879-1936), le Sermon sur la montagne (1936), la Passion (1942), Saint Germain d’Auxerre (1947) et la Mise au tombeau (1949) de Georges Migot (1891-1976), Litania (1933) de Karol Szymanowski (1882-1937), la Légende de la Sainte Vierge descendue en enfer (1934) de Nikolaï Nikolaïevitch Tcherepnine (1873-1945), Messe au champ d’honneur (1939) de Bohuslav Martinů*, Lucifer (1948) de Claude Delvincourt (1888-1954), In terra pax (1944), Golgotha (1948), le Mystère de la Nativité (1959) de Frank Martin (1890-1974), le Fusillé inconnu (1949) de Serge Nigg (né en 1924), Job (1950), drame sacré de Dallapiccola*, Llanto por Ignacio Sánchez Mejias

(1950) et Récit de l’an zéro (1959) de Maurice Ohana*, la France au Calvaire (1956) de Marcel Dupré (1886-1971), la Vérité de Jeanne (1956) d’André Jolivet*. Signalons enfin des oeuvres politiquement engagées, qui traitent le plus souvent des droits de l’homme et de la liberté, comme l’oeuvre déjà ancienne Die Massnahme (la Décision, 1930) de Hanns Eisler (1898-1962), Der Grossinquisitor (le Grand Inquisiteur, 1948) de Boris Blacher (1903-1975) et Novae de infinito laudes (1962) de Hans Werner Henze*.

Seul, dans la musique contemporaine, le Polonais Krzysztof Penderecki*, auteur d’une Passion selon saint Luc (1966), divisée en deux parties et comprenant un récitant, trois solistes, trois choeurs mixtes, un choeur de jeunes garçons et l’orchestre, comble, en utilisant toutes les ressources du langage musical actuel, « le fossé qui sépare la musique nouvelle de la pensée liturgique » (Hanz Heinz Stuckenschmidt).