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De 1923 à 1927, Duke Ellington*,

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La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 14

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augmente régulièrement le nombre de ses musiciens pour triompher en 1927

au Cotton Club de Harlem. Le progrès, par rapport aux travaux de Fletcher Henderson et de Don Redman, se situe au niveau de la trituration des timbres et des sonorités. Ellington sera aussi un remarquable révélateur de talents, construisant toujours ses orchestrations dans le sens d’une valorisation des solistes. Il sera le premier à concevoir des sortes de concertos où l’ensemble du groupe est au service d’un musicien.

L’âge d’or :

la folie du swing

Après la crise économique de 1929, le jazz se transforme. Le folklore louisianais cède la place à des thèmes empruntés à la chansonnette urbaine.

L’improvisation connaît une période de « classicisme », où les musiciens recherchent la virtuosité, l’élégance dans le phrasé et une exaltation policée du

« swing ». Le public ne se contente plus des exercices de style des solistes des petites formations. Il est attiré par le son de masse des grands orchestres, qui se présentent alors avec une structure assez fixe : de trois à cinq trompettes, deux ou trois trombones, cinq ou six saxophones et une section rythmique.

Cette formule enthousiasmera le jeune public blanc lorsqu’elle sera illustrée par le clarinettiste Benny Goodman*, qui utilisera d’ailleurs Fletcher Henderson comme arrangeur et sera dési-gné à partir de 1934 comme le « Roi du swing ». Goodman sera imité, avec plus ou moins de succès, par Jimmy et Tommy Dorsey, Red Norvo, Charlie

Barnet, Bunny Berigan, Jack Teagarden, Bob Crosby, Larry Clinton, Artie Shaw, Gene Krupa, Les Brown, Harry James et Glenn Miller. C’est la vogue du « swing » (swing craze), la danse étant un attrait supplémentaire, favorisée par des arrangements simples, une assise rythmique aux quatre temps égaux, des solos variés, mais courts.

Une grande part du succès des grands orchestres de l’époque réside dans l’interprétation de mélodies populaires, la réputation des chanteurs attachés à ces groupes constituant un facteur important dans leur réussite.

Du côté des Noirs, l’activité est tout aussi intense. Tandis qu’Elling-

ton explore un univers d’une richesse jusqu’alors insoupçonnée, Count Basie regroupe en 1935 quelques musiciens de l’orchestre de Bennie Moten (qui vient de mourir à Kansas City) et met au point un style orchestral à l’image de celui qu’il pratique au piano : simplicité des thèmes, dont beaucoup sont des blues, carrure massive du jeu des sections, exploitation du phrasé de masse, recherche du meilleur point d’équilibre du swing grâce à une section rythmique précise et souple.

Jimmie Lunceford est un autre grand du jazz orchestral noir, actif de 1934

à 1941. Son équipe est techniquement la meilleure ; il dispose d’excellents arrangements, raffinés et complexes, et découvrira un tempo très balancé, qui, pendant quelque temps, le situera au premier rang. D’autres orchestres noirs seront célèbres au cours des années 30 et 40. Ils s’organiseront autour d’un « animateur », chanteur ou soliste, parfois arrangeur. Parmi eux, ceux d’Earl Hines, de Don Redman, de Benny Carter, de Chick Webb (qui, au Savoy de Harlem, révélera la chanteuse Ella Fitzgerald), d’Andy Kirk (avec au piano Mary Lou Williams, qui écrit des arrangements), de Teddy Hill, de Harlan Leonard, de Willie Bryant, de Lucky Millinder, de Claude Hopkins, de Jay McShann, de Luis Russell (qui accompagne Louis Armstrong*), de

Cab Calloway, d’Erskine Hawkins,

de Cootie Williams. Ces groupes, qui exploitent les mêmes procédés, se singularisent par la présence de solistes exceptionnels et l’emploi d’arrangeurs dont la « patte » permet de personnaliser le « son » d’ensemble. Ils sont souvent plus originaux, plus vivants que les formations blanches de la même époque. Moins soumis au commercia-lisme de la chanson, utilisant davantage les thèmes de blues, ils sont aussi plus à l’aise dans l’expression rythmique. En fait, s’adressant directement à des audiences de couleur, ils sont restés plus directement concernés par des forces d’une plus grande authenticité jazziste.

Déclin

À partir de 1945, le jazz évolue de plus en plus vite. Au « classicisme » des

improvisateurs du « middle jazz », au folklore des pionniers néo-orléanais et de leurs suiveurs s’opposent les complexités harmoniques et rythmiques des boppers. Le public, en même temps

— et cette tendance est révélatrice dans le New Orleans Revival —, préfère l’exploit spontané de l’improvisateur au travail de lecture des hommes de pupitre. Deux autres facteurs interviennent dans ce déclin des grands orchestres. Le premier est économique : seize musiciens coûtent plus cher que cinq ou six, et un grand nombre d’entre eux refusent des conditions de travail jugées d’autant plus dures qu’elles sont sans gloire. Le second est technique : avec les progrès de l’électronique, au niveau d’abord des micros, ensuite des instruments (guitare, basse, orgue et piano...), le petit groupe est en mesure de produire autant de décibels et même plus qu’un grand orchestre.

Les oreilles du public, à partir de 1960, iront jusqu’à préférer le son amplifié (mis à la mode par les groupes de pop music) au son naturel.

Mis à part Duke Ellington et Count Basie, qui restent fidèles à leurs styles et continuent à parfaire leurs oeuvres, les tentatives qui marquent les années 50 et 60, pour nombreuses qu’elles furent, n’ont pas débouché sur un véritable renouvellement du genre. Lionel Hampton*, par exemple, dirigea à partir de 1942 un ensemble destiné à servir d’écrin à ses solos et dont les pièces violentes et brutales, rythmiquement très accentuées, annoncent le rock and roll et ses exploits paroxystiques. Mais, par la suite, pour des motifs d’instrumentation électronique, la plupart des formations de rock and roll n’utilisent qu’un nombre réduit de musiciens, si l’on excepte celles qui accompagnent des vedettes du chant (tel James Brown), dont le caractère, entièrement soumis aux dé-

sirs des vocalistes, ne permet pas de leur accorder la personnalité morale de grand orchestre. Également à la fin des années 40, un certain nombre de chefs d’orchestres blancs tentent d’intégrer au sein d’arrangements pour grands orchestres les innovations des boppers et des coolers.

Dans cette direction, où il a recours

au talent d’arrangeurs très différents, Stan Kenton réussit à passionner une partie du public. Alors que l’orchestre de Boyd Raeburn n’existe que fort peu de temps, celui de Woody Herman

réussit à flotter sur toutes les vagues des modes.

D’autres chefs tentent de résoudre la contradiction mode-tradition. Parmi eux citons Claude Thornhill, Gil

Evans, Don Ellis, Tommy Vig, Elliot Lawrence, Eddie Sauter-Bill Finegan.

Ceux qui combineront avec le plus de bonheur le riff basien aux sonorités et aux harmonies du cool de la West Coast seront Terry Gibbs, Shorty Rogers et surtout Gerry Mulligan, avec son éphémère Concert Jazz Band.

On pourrait croire que Dizzy Gillespie a découvert le secret de l’adaptation au grand orchestre des nouveautés du be-bop*. Poursuivant une voie ouverte par Billy Eckstine, il crée en 1946 une formation qui obtient un succès considérable à Paris en 1948 ; mais, en dépit d’un excellent répertoire d’arrangements be-bop et afro-cubains, les conditions de survie ne seront pas réunies très longtemps. L’échec de Dizzy Gillespie ne décourage pas complètement les chefs noirs. Durant les années 50 et 60, Quincy Jones, Gerald Wilson, Thad Jones - Mel Lewis,