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En Grèce, où survient en 1946 la

guerre civile, l’U. R. S. S., après s’être abstenue pour respecter le partage d’influence conclu à Moscou en automne 1944 avec la Grande-Bretagne, donne son accord à l’action des partisans et oppose son veto à une décision du Conseil favorable au rétablissement de l’ordre.

En Europe centrale et en Europe

orientale, partout où l’armée soviétique contrôle les territoires par ses forces d’occupation, s’installent au pouvoir

des gouvernements de front national où les communistes dominent.

Le divorce entre les buts de paix des deux grands se confirme et la rupture de l’alliance éclate en 1947, année critique, illustrée par les initiatives de la politique de défense américaine contre les tentatives d’expansion soviétique et les réactions de Moscou : doctrine Truman, d’assistance militaire et économique aux peuples que touche directement la propagande communiste (déclaration au Congrès du président Truman du 12 mars 1947), et plan

Marshall, d’aide économique à tous les pays d’Europe (discours à l’université Harvard du 5 juin 1947).

L’U. R. S. S. refuse de participer aux travaux de la conférence réunie à Paris du 12 juillet au 22 septembre 1947 pour étudier la proposition amé-

ricaine. Elle en dissuade la Hongrie, la Roumanie et la Pologne, qui hésitent à s’y rendre, et contraint la Tchécoslovaquie, qui a décidé d’y prendre part, à retirer son adhésion. En 1948, la rupture est consommée. Le blocus de Berlin, qui interdit pendant une année aux Occidentaux, par les voies de surface, l’accès de leurs secteurs de contrôle dans le « Gross-Berlin » à travers la zone soviétique d’occupation, en est la manifestation éclatante.

Sur les ruines de l’entente ÉtatsUnis - U. R. S. S. s’installe aux dépens de l’O. N. U. le système des deux blocs de démocraties (démocratie libérale occidentale et démocratie collectiviste orientale), qui, de l’Europe, viseront à étendre leur leadership dans le monde.

Le bi-polar system connaîtra sans doute des alternatives de tension et de détente (tight and loose), mais ses incidences subversives seront profondément

ressenties à l’intérieur de l’O. N. U.

Les institutions de l’organisation de la paix fondée sur la sécurité collective demeurent sans doute préservées et intactes, faute de dénonciation ou de révision possible dans la lettre de la Charte ; leur fonctionnement n’en est pas moins troublé et parfois paralysé par l’antagonisme des deux plus grands. L’O. N. U. deviendra très tôt et pour longtemps un théâtre d’opé-

rations de la guerre froide, cependant

que la faillite de la sécurité collective déterminera à l’extérieur du système une résurgence des politiques de l’alliance et de l’équilibre. L’apparition de la détente et celle d’un « troisième homme », la Chine populaire, ne feront que diversifier les tactiques de ce jeu diplomatique incessant.

Les exploitations contrariées du

système de l’Organisation intéressent respectivement son recrutement, le fonctionnement de ses organes et, en définitive, l’accomplissement de ses missions.

Recrutement et représentation

des membres

Malgré l’importance numérique croissante de ses membres, due à la prolifération des États, consécutive à la décolonisation, l’O. N. U. n’est pas universelle. Certains États (la Suisse, la plupart des États exigus) sont demeurés en dehors délibérément. En sont également éloignées les nations divisées par les compromis de la victoire et le partage des sphères d’influence : les deux Corées du « Pays du matin calme », de part et d’autre du 38e parallèle ; les deux Viêt-nam, séparés par le 17e parallèle ; toutefois le 18 septembre 1973, les deux Allemagnes sont admises simultanément.

L’admission des États conviés ou

désireux de faire acte de candidature, dans les conditions très souples et accueillantes de l’article 4 de la Charte, a été longtemps bloquée par l’exercice du veto, privilège des membres permanents du Conseil (art. 27, al. 3), chacun des leaders faisant opposition aux candidats soutenus par l’autre. Contrairement à l’avis de la C. I. J. (Cour internationale de justice), qui a insisté sur le caractère individuel de l’admission (avis du 3 mars 1950), le 14 décembre 1955 un compromis de la diplomatie collective, mais antijuridique, a permis, de guerre lasse, après échange de nombreux vetos, à un lot d’une quinzaine de candidats en provenance des deux camps d’accéder en bloc à l’organisation ! L’opération demeure célèbre sous l’étiquette de package deal...

Les difficultés soulevées par l’ad-

mission des États se compliquent, à partir de 1950, du problème de repré-

sentation qu’introduisent l’U. R. S. S.

et les démocraties populaires au lendemain du triomphe de la révolution chinoise de Mao Zedong (Mao Tsö-

tong) et du repli de Jiang Jieshi (Tsiang Kai-che) sur Taiwan (Tai-wan ou For-mose). La question de la représentation de la Chine n’a cessé d’être posée, au début de chacune des assemblées géné-

rales de l’O. N. U. et des conférences diplomatiques réunies sous ses auspices, jusqu’à son règlement intervenu en 1971. Les États-Unis soutenaient que la question, « importante » au sens de la Charte, devait faire l’objet d’un vote à la majorité des deux tiers, alors que les supporters de Pékin la quali-fiaient de question de procédure, susceptible d’être tranchée à la majorité simple. Le 26 octobre 1971, le projet de résolution habituel des États-Unis ayant été repoussé par 59 voix, le rétablissement des droits de la Chine populaire a été décidé par 76 voix contre 35

et 17 abstentions.

Fonctionnement des organes

La désignation du secrétaire général soulève chaque fois un problème difficile de succession, qui détermine la prolongation, également discutée, du secrétaire sortant. L’U. R. S. S., en 1961, dans l’intention prétendue de faciliter l’opération du transfert, a mis en cause le caractère hautement communautaire et indépendant de la fonction, que la Charte avait proclamé et que ses signataires avaient résolu de respecter (art. 100). L’Assemblée n’a pas accepté de substituer à la personnalité unique du secrétaire général celle, collégiale, d’un trio de secrétaires gé-

néraux respectivement désignés par le groupe des pays de l’Ouest, le groupe des pays de l’Est et celui des pays non engagés. La conception soviétique de cette représentation, dite « de la troïka », devait être étendue à tous les échelons des fonctionnaires du secrétariat, ce qui pouvait mettre en question la garantie morale d’indépendance de la fonction publique internationale, que symbolisait et renforçait pour tous le serment prévu dans la Charte.

De leur côté, les États-Unis, sous

l’influence d’une campagne anticom-muniste que le sénateur du Wisconsin Joseph McCarthy avait engagée jusque dans l’Administration américaine, suspectée d’espionnage à la suite de l’explosion de la première bombe atomique soviétique, n’ont pas hésité à mettre en péril l’autonomie de la fonction administrative internationale en effectuant, à l’intérieur du Secrétariat et des institutions spécialisées, des enquêtes sur le loyalisme des fonctionnaires de leur nationalité.

Missions de l’Organisation des

Nations unies

« Arbitrage, sécurité, désarmement », la trilogie du programme de la S. D. N.

demeure, dans l’O. N. U., toujours actuelle. Aucun de ces chapitres fondamentaux du livre de la paix n’a été développé cependant par les Nations unies par rapport aux ébauches du passé. Son oeuvre doit, par contraste, être reconnue valable dans le secteur économique et social de l’assistance et du développement et dans le domaine de la codification du droit international.

Aucun progrès ne peut être signalé dans l’aménagement de la sécurité des États membres. La désignation de l’agresseur sera traitée dans chaque cas sans le secours d’une définition préalable de l’agression (seulement adoptée le 14 décembre 1974 par l’Assemblée générale). Aucun progrès non plus dans l’arbitrage, qui est de plus en plus concurrencé par la conciliation et la négociation.