Le projet du professeur français
Georges Scelle (1878-1961) devant la Commission du droit international, qui plaçait le fonctionnement de l’arbitrage sous le contrôle positif de la Cour internationale de justice, n’a pas trouvé audience à l’Assemblée. Dans le fonctionnement du règlement judiciaire, la Cour elle-même, dans l’espoir problé-
matique d’attirer les plaideurs que sont exclusivement les États souverains, s’est appliquée à réduire l’exercice de sa juridiction obligatoire aux proportions d’un consentement actuel, c’est-
à-dire immédiat, des parties.
Pour certains membres de l’O. N. U.
(l’U. R. S. S. et les républiques popu-
laires), la timidité de la Cour devrait même s’étendre au domaine de sa compétence consultative. Intégrée dans la liste des organes principaux de l’Organisation, la Cour serait devenue de ce fait un simple organe parmi les autres, downloadModeText.vue.download 566 sur 625
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 14
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et cette égalité de rang devrait lui interdire d’interpréter la Charte. La Cour n’est pas allée jusqu’à entériner le voeu, prématuré, de cette déchéance, et elle semble même, depuis son comportement dans l’affaire des pêcheries islan-daises, redresser sa ligne de conduite dans l’exercice de sa compétence juridictionnelle (arrêts de février 1973).
Aucun progrès, pour l’heure, n’a été atteint dans le désarmement*, pourtant prévu par la Charte en différents endroits. Le désarmement des deux plus grands vaincus, l’Allemagne et le Japon, qui aurait pu servir de point d’attache utile et concret à une relance idéologique du désarmement total et universel, toujours affirmé par les So-viétiques, a disparu dans le contexte de la guerre froide. Le réarmement de l’Allemagne, à l’exclusion des armes A. B. C. (atomique, biologique, chimique), a été envisagé dès 1949, et a abouti en 1955 à son adhésion au pacte atlantique. Le réarmement du Japon est devenu effectif en 1954. Les deux plus grandes puissances nucléaires, l’U. R. S. S. et les États-Unis, ont été d’accord pour envisager, pour la première fois, l’une et l’autre, la limitation des armes de destruction massive : selon le traité de non-prolifération des armes nucléaires, les États n’ayant pas de telles armes doivent renoncer à en fabriquer et, moyennant cet engagement, reçoivent des garanties de la part des puissances nucléaires. Mais la France et la Chine ont refusé de signer cet accord.
La crise de la sécurité collective a, comme au temps de la S. D. N., déterminé une renaissance des pactes régionaux d’assistance. L’esprit de ces accords, même lorsqu’ils maintiennent, du côté occidental, un lien nominal
avec l’O. N. U., est bien différent de celui de la Charte. Le domaine de l’alliance et de l’équilibre rejoint ici celui de la diplomatie, domaine d’incertitude et d’inégalité, qui pénètre et se développe dans le cadre même de l’O. N. U.
à la faveur de la multiplication des micro-États, qui, sortis du système de la dépendance coloniale, en sont devenus presque automatiquement membres et dont les voix à l’Assemblée font les majorités.
Le bilan de trente années d’exis-
tence de l’O. N. U. s’inscrit dans les innombrables documents d’archives de ses organes principaux : décisions du conseil de sécurité, résolutions de l’Assemblée générale, arrêts et avis de la Cour internationale de justice, sans omettre les rapports d’ensemble et les déclarations spéciales du secrétaire général.
Partout s’exprime et s’étale une
constatation d’évidence : l’O. N. U., dans son état actuel, ne peut garantir la paix qu’à titre précaire et par des moyens rudimentaires de négociation ou de persuasion. Faut-il l’abandonner aux conséquences dirimantes d’une crise financière endémique, qui demeurera longtemps le sujet numéro un des préoccupations du secrétaire général ?
L’Assemblée générale, à la fin de sa vingt-cinquième session, présidée par le juriste norvégien Edvard Hambro (né en 1911) a créé un comité spécial chargé d’examiner la situation.
Le mouvement d’organisation de la paix est irréversible, et les résultats obtenus par les Nations unies dans le domaine du développement et de l’assistance au tiers monde ne peuvent être compromis, sans danger pour la paix mondiale, par un abandon ou une réduction de programmes.
Il serait injuste de méconnaître, d’autre part, sur le plan des droits de l’homme et de leur protection, les ré-
sultats bénéfiques obtenus par l’oeuvre des grandes institutions spécialisées ; dont le réseau opère grâce à l’O. N. U.
à travers le tiers monde et dont le bilan compense l’inventaire négatif de la sécurité et du désarmement.
Les perspectives d’instauration d’un pouvoir communautaire institutionnalisé supérieur aux pouvoirs nationaux se rapprochent, au rythme surprenant d’accélération que lui communique l’élan prodigieux de la technique ; 1971 a marqué officiellement le départ d’une nouvelle décennie du développement, qui coïncide avec les progrès foudroyants de l’informatique, technique à la fois bénéfique et inquiétante pour le progrès social et les libertés individuelles par les exploitations qui peuvent en être faites dans les secteurs d’application scientifique, économique, social et politique.
Seule la promotion des institutions internationales, acceptée et construite par les souverainetés étatiques, peut permettre de saisir et de régler des problèmes d’ordre public international aussi importants que ceux qui sont posés par l’exploration et l’exploitation mondiale des ressources des océans, ou par le développement des communications aériennes et spatiales. L’enracinement dans une véritable dimension est la seule recette d’adaptation de l’O. N. U. au monde d’aujourd’hui.
P. L.
F Convention internationale / Guerre (lois de la)
/ Europe.
P. Gerbet, les Organisations internationales (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1958 ; 5e éd., 1972). / H. T. Adam, les Organismes internationaux spécialisés, contribution à la théorie générale des établissements publics internationaux (L. G. D. J., 1964 ; 2 vol.). / P. Manin, l’Organisation des Nations Unies et le maintien de la paix (L. G. D. J., 1971). / M.-C. Smouts, le Secré-
taire général des Nations Unies (A. Colin, 1971).
On peut également consulter les Rapports annuels du secrétaire général sur l’activité de l’Organisation des Nations unies.
Organisations
fonctionnelles
internationales
INSTITUTIONS À VOCATION SOCIALE ET
CULTURELLE
y Organisation internationale du travail (O. I. T.). Créée en 1919 dans la partie XIII du traité de Versailles, l’O. I. T., par la com-
position de son assemblée, dénommée Conférence internationale du travail, a introduit dans le système des conférences diplomatiques un type nouveau, rappelant le recrutement des assemblées nationales représentatives.
La Conférence comprend non seule-
ment des représentants de chaque État membre, mais aussi des représentants des employeurs et des travailleurs désignés par les gouvernements en accord avec les syndicats les plus représentatifs. Le parlementarisme est également introduit dans son fonctionnement, les délibérations donnant lieu à des votes libres par délégués et non sur instructions par délégations, procé-
dure qui sera reprise dans les assemblées des communautés européennes. La Confé-
rence élabore, dans le domaine des rapports du travail, des conventions dont la conclusion, la mise en oeuvre et l’exécution ont apporté des anomalies dans le droit classique des traités internationaux.