— Je n’avais encore jamais vu de boxes climatisés…, fit Malko.
— Sa Majesté veille beaucoup sur ses chevaux, remarqua le Premier aide de camp.
Ostensiblement, il regarda sa montre.
— Je crois que je vais devoir rejoindre Sa Majesté, annonça-t-il.
Il s’inclina sur la main d’Angelina Fraser et serra celle de Malko. Celui-ci allait s’étonner de cette attitude détachée contrastant avec son air lubrique, une demi-heure plus tôt, lorsqu’il réalisa que le pantalon du Brunéien scintillait de paillettes…
Ceci expliquait cela.
Al Mutadee Hadj Ali battait déjà en retraite. Dès qu’il se fut un peu éloigné, Malko remarqua :
— Apparemment, ton ami a passé agréablement le temps avec toi. On dirait une boule d’arbre de Noel…
Angelina eut un rire de gorge plein de sensualité.
— Il était déchaîné. J’ai eu du mal à me défendre. Il a voulu m’entraîner dans un des bungalows de la piscine. Nous avons déjà un peu flirté, tu sais. Comme ils sont bridés par leur religion, les Brunéiens se défoulent avec les étrangères. Alors ? Tu as pu arriver à la beach-house ?
En retournant vers la voiture Malko lui raconta son odyssée. Angelina se pressa contre lui.
— Ils ne t’ont pas tué parce que tu venais de Jerudong ; donc tu étais forcément un diplomate ou quelqu’un d’important… Viens, je vais te montrer quelque chose.
Ils reprirent la Volvo et Angelina s’engagea sur la route de Tutong longeant le bord de la mer. Deux kilomètres plus loin, elle tourna à droite dans un sentier partant vers la falaise dominant la mer de Chine. Elle stoppa au bord d’un no man’s land de broussailles et éteignit ses phares. La mer était en contrebas, au bout d’un sentier de chèvre. Sur sa droite, à un kilomètre environ, Malko aperçut une rangée de projecteurs qui formaient un alignement perpendiculaire à la route.
— Regarde, dit Angelina. C’est la beach-house. Gardée comme un camp de concentration. Des miradors, des barbelés, des projecteurs, sans compter tout ce qu’on ne voit pas. Parce qu’ici, cela donne sur une zone accessible au public… Si tu avais essayé de franchir la clôture de ce côté-ci, les gurkahs ne se seraient pas contentés de t’intimider, ils t’auraient abattu immédiatement. Il arrive au prince Mahmoud de « kidnapper » une Brunéienne pour ses plaisirs. On a dû te prendre pour un mari jaloux.
Malko fixait la clôture illuminée. Peggy Mei-Ling était bien gardée.
Tandis qu’il contemplait les projecteurs, Angelina Fraser se coula derrière lui, l’étreignant de toutes ses forces. Collée à son dos, elle commença à se frotter, à l’agacer de toutes les façons possibles, puis elle recula et s’allongea à plat dos sur le capot de la Volvo, s’accrochant d’une main à un essuie-glace pour ne pas glisser.
Malko n’eut qu’à la débarrasser de son dernier rempart pour l’embrocher d’un seul coup de reins, debout contre la voiture. Il éprouva aussitôt une sensation bizarre, inhabituelle. Angelina ne s’était pas beaucoup défendue contre le Premier aide de camp. Il arrêta net. Surprise, Angelina se redressa.
— Qu’est-ce qu’il y a ?
— Tu es vraiment une salope ! fit Malko. Deux hommes en une heure.
— Il se demandait où tu étais, fit Angelina sans se démonter. Il fallait bien que je le retienne. Tu ne veux plus de moi ?
En guise de réponse Malko la prit par les hanches et la retourna. Surprise, allongée à plat ventre sur le capot de tout son long, Angelina poussa un petit cri en le sentant se coucher sur elle. II y eut une brève pause, puis elle hurla sauvagement au moment où la verge durcie de Malko forçait ses reins sans pitié. S’y enfonçant d’un trait jusqu’à la garde.
— Tu es fou ! cria Angelina.
Il se retira un peu et revint encore plus fort, la violant de tout son poids. A la troisième fois, elle commença à feuler. Puis elle haleta et Malko entendit :
— Défonce-moi, déchire-moi !
Malko la pilonna de plus belle. Accrochée à un rétroviseur et à un essuie-glace, Angelina ruait sous lui, rebondissant sur la tôle. Jusqu’à ce qu’il lâche sa semence dans les reins avec un cri sauvage. Angelina lui fit écho quelques secondes plus tard. Restant ensuite mollement allongée sur le capot, comme morte. Un peu plus tard, elle se redressa, ôta sa robe et dit :
— Viens, nous allons nous baigner.
Ils dégringolèrent le sentier et se retrouvèrent dans les vagues tièdes de la mer de Chine. C’était délicieux. Les tympans de Malko vibraient encore des coups de feu qui auraient pu le tuer. Angelina s’enroula autour de lui et murmura
— C’est vrai que je suis une salope, mais j’adore baiser avec toi. (Elle pouffa.) Les gurkahs, avec les infrarouges, n’ont pas dû en perdre une miette…
Une immense salope. Une seule chose gâchait le plaisir de Malko : cette fois il était dans une impasse totale. Angelina éclata de rire.
— Si ce petit cloporte de Khoo nous avait vus, il aurait doublé son offre.
— Quelle offre ?
— Il m’a carrément proposé de passer un week-end avec Mahmoud. Celui-ci a envie de chair fraîche et en a ras-le-bol de baiser des Philippines analphabètes. Comme je l’ai envoyé promener, il m’a supplié de lui trouver quelqu’un parmi mes copines. Comme si je connaissais des putes !
Malko ne sentait plus le corps tiède pressé contre lui. Il venait d’avoir l’idée qui pouvait peut-être débloquer la situation.
— Eh bien, tu vas lui annoncer que tu as peut-être une copine, fit-il. Une vraie créature de rêve
Chapitre IX
La sonnerie syncopée des téléphones anglais avait toujours énervé Malko. Et celui-là sonnait depuis un bon moment… A côté de lui, Angelina Fraser l’observait, les jambes croisées, enfoncée dans un canapé très bas. La pluie commençait à tomber, claquant sur les vitres. Bandar Sen Begawan dormait. Ils n’avaient pas croisé une voiture en revenant de Jerudong. Malko avait préféré utiliser le téléphone d’Angelina plutôt que celui du Sheraton… Plus discret.
Il allait raccrocher quand une voix agacée fit « allô ». Il aurait embrassé le récepteur !
— Mandy !
A Londres, avec le décalage horaire de huit heures en moins, il était trois heures de l’après-midi. Le glapissement qui suivit lui déchira l’oreille.
— Quel est le foutu connard qui me réveille à une heure pareille ?
En dépit de son ascension sociale et financière, Mandy Brown, ex call-girl, maîtresse d’un puissant mafioso, n’avait pas oublié ses origines populaires. Malko se hâta de la rassurer.
— C’est moi, Malko. Tu dors encore ? Il est trois heures.
— Putain ! fit-elle. Je me suis couchée à sept heures matin. Tu es arrivé à Londres et tu as envie de me sauter. Ça ne pouvait pas attendre un peu ?
La Reine des Poètes.
— Non, fit Malko. Je ne suis pas à Londres et je ne pensais pas te trouver. Qu’est-il arrivé à ton de soupirant… ?
Il l’avait abandonnée deux ans plus tôt dans les bras d’un vieux Yéménite milliardaire fou d’elle, Sanaa.
— Ben, justement, fit-elle, il a rendu son dernier soupir. A cause de moi, il paraît. Juste quand il allait me reconstruire le temple de la Reine de Saba rien que pour moi, tu te rends compte…
Il y avait quand même un peu de nostalgie dans sa voix. Toujours fraîche, Mandy, en dépit de ses avatars… Malko l’entendit bâiller et dire d’une voix soudain langoureuse.
— J’aimerais bien que tu me fasses un petit câlin, tu peux vraiment pas venir… ?
Elle vouait une adoration sans bornes à Malko qui lui avait sauvé la vie, fait gagner une fortune et procuré son premier orgasme. Celui-ci prit son souffle c’était le moment de l’estocade.