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— Que Le Français a frappé pour la neuvième fois.

— Une fille de boîte ?

— Oui.

— Comment ?

— Un coup de pétard, du 7,65 mm. Et, pour la première fois, l’une de ces filles est tuée par une balle de fabrication française, ce qui renforce la thèse des policiers comme quoi il s’agit d’un criminel de votre pays.

— Voyez-vous ! Tu as le journal sous la pogne ?

— J’étais en train de le lire lorsque vous m’avez sonné.

— On ne parle pas de l’assassinat d’un certain Seruti ?

— Attendez.

Je perçois des froissements de papelards.

— Si, dit-il au bout d’un instant, c’est dans les faits divers… Le directeur d’une boîte ? Une boîte appelée le Cyro’s ?

— Tout juste. Qu’est-ce qu’on dit ?

— Que l’homme est mort en nettoyant un revolver.

— Parfait.

Je vois que Grane a été correct.

— Bon, merci. Finis bien ton voyage, petit gars. Et à un de ces quatre, dans notre vieille Europe !

Je raccroche.

Je retourne à mon paquet de gitanes. Je recommence à fumer. La radio joue La vie en rose. Tu parles.

Ici, ça serait plutôt la vie en rouge.

Je bondis au bignou et je passe un nouveau coup de grelot à Robert. Je l’ai juste comme il payait sa note à la réception.

— Dis, bonhomme, c’est encore moi. C’est au sujet de la fille descendue. Avait-elle le classique petit papier à la main ?

— Mais oui, je vous l’ai dit.

— J’entends, un papier écrit à la main ?

— Oui, il était écrit à la main. Et c’est la même écriture que les autres.

Ça va, ciao !

Cette fois, je raccroche pour de bon.

Donc c’est bien le tueur qui a bigorné la neuvième fille, la huitième pour son palmarès, puisque celle d’avant l’a été par Seruti.

Et il l’a bigornée au moyen d’un pétard crachant des pastilles françaises. Marrant… Calibre 7,65, remarrant !

J’ai de quoi réfléchir. Mais va te faire voir : la sonnerie du bignou retentit, très brève. Elle s’arrête. Ce doit être Cecilia. Oui, dix secondes ne se sont pas écoulées qu’elle reprend, insistante.

J’attends un peu, elle continue. Alors, je décroche. C’est ma souris.

— Tony ? murmure-t-elle.

— Oui, mon cœur…

— Dites, Tony chéri, il y a du nouveau. J’ai été obligé de dire à Grane que vous étiez chez moi. Il est d’accord pour vous sauver la mise une fois de plus, mais il faut faire vite. Il va vous chercher en voiture pour vous conduire en sûreté.

— Qu’y a-t-il de nouveau ?

— Je ne puis vous expliquer cela ici, c’est très grave ; il vous expliquera en cours de route. Je vous annonce sa visite simplement pour que vous lui ouvriez la porte. A tout à l’heure, Tony !

Elle raccroche. Je raccroche.

Je n’aime pas les « choses nouvelles ». Surtout lorsque c’est un flic comme Grane qui vient vous les annoncer. Cette gourde n’a pas pu tenir sa langue. Les souris, même celles qui godent pour vous, vous vendent mille fois avec leur machine à babiller.

Je tourne en rond dans la piaule. Puis, au mépris de toute prudence, je vais me mettre à la fenêtre.

Tout en jetant de fréquents coups de roberts en bas, je compulse l’annuaire. Il ne me faut pas longtemps pour trouver ce que je cherche : le numéro de tube du consulat de France.

Fiévreusement, je fais le numéro.

— Allô ! dit une voix.

— Allô ! Dis-je. Passez-moi le consul, c’est urgent. Ici, police française !

— Mais…

— Au trot, ça presse !

— C’est de la part de qui ?

— Je vous dis, police française.

— Un instant…

Ça doit jaspiner dans le téléphone intérieur du consulat. Enfin, une voix d’homme, une voix française, murmure :

— J’écoute.

— Vous êtes le consul de France ?

— Parfaitement.

— Ici, commissaire spécial San-Antonio. J’ai été envoyé ici en mission par les Services secrets français et j’ai besoin de votre assistance.

Tandis que je parle, je vois stopper en bas une voiture de la police. Trois hommes en descendent, parmi lesquels je distingue aisément Grane. Les deux autres sont en uniforme. Ils tiennent quelque chose sous leur bras et ce quelque chose ressemble davantage à une Sten qu’à un parapluie. Drôle d’ustensile pour aller expliquer quelque chose à quelqu’un.

— Ça urge ! Dis-je. Il faut que vous veniez immédiatement à l’adresse que je vais vous indiquer. Prenez la voiture officielle. C’est une question de vie ou de mort.

Je lui file l’adresse de Cecilia et je prends congé rapidos lorsqu’il m’a donné l’assurance qu’il s’annonçait illico.

Le c… de tout ça, c’est que je suis à oilpé. Je ne peux pas me tirer dans cette tenue.

Vite, je saute dans mon bénard, dans ma chemise. J’enfile mes targettes, ma veste.

Je me précipite à la porte.

Trop tard ! J’entends stopper l’ascenseur.

Un triple bruit de pas résonne sur le sol du couloir. Un coup de sonnette… Le silence s’établit.

CHAPITRE XVIII

« A la seringue »

J’ouvre la porte de la cuisine qui est juste à côté de celle de la porte d’entrée.

La voix de Grane retentit :

— San-Antonio ! C’est moi, Grane. Vous êtes là ?

« Vas-y, bonhomme, me dis-je, ça se passera bien si tu es à la hauteur. »

Je chipe une écumoire à long manche.

— Oui, dis-je, en prenant bien soin de rester dans la cuisine. Oui, je suis là.

— Ouvrez vite !

Je tapote la porte avec l’écumoire, toujours depuis la cuisine.

— Que voulez-vous ? Demandé-je.

— Ouvrez !

— Pas sans savoir ce que vous me voulez.

Je continue à frotter la porte d’entrée avec l’ustensile pour faire croire que je me tiens tout contre.

Il y a un silence. Et, soudain, je souris en constatant que mon vieux flair est toujours de première qualité. Une fameuse seringuée secoue la porte. Un essaim de balles pénètre dans le vestibule et va secouer une potiche pseudo-chinoise qui trônait sur une console. La console aussi est chouravée. Aucune importance, elle était aussi tartouze que la potiche !

Je pousse un cri terrible. Puis, je me mets à geindre. Ça parlemente derrière la lourde. Puis une nouvelle giclée décarre, mais celle-ci est destinée à la serrure. Il y a bientôt un trou comme mon poing à la place de cette dernière.

Les flics poussent la lourde.

Ils s’attendent à trouver mon cadavre sur le tapis.

Je ne leur laisse pas le temps de revenir de leur stupeur. Vite fait sur le gaz, je farcis le mec à la Sten. Il bloque une valda dans la bouche. Celle-là, il n’est pas près de l’avaler. Il lâche son moulin à café et reste debout, l’air éperdument gland. A se demander s’il est vivant ou non.

Je fonce dans le tas sans attendre, car je viens de réaliser que Grane et son autre acolyte n’ont pas d’arme au poing. Je les bouscule sauvagement. Un coup de saton dans les valseuses de l’autre flic et il appelle sa mère à la rescousse. Je me retrouve nez à nez avec Grane. Il porte la main à son holster.

— Touche pas ça, fumier ! Je dis. Tu vas y passer et ça me fera un plaisir fou. Ah ! Tu m’as bien eu, avec tes manigances.

Je lève mon pétard, mais je me ravise.

Au lieu de lui tirer dans le battant, je lui tire dans une flûte. La canne brisée, il tombe. Un coup de pompe dans le portrait et me voilà libre pour quelques secondes.