Выбрать главу

Nous passons les pièces en revue, examinant le sol de chacune, en quête d'une trappe. Que tchi ! dirait Léopold j'sais-plus-combien-de-Belgique (le roi qui doit se pincer pour savoir qu'il existe).

Et pourtant elle tourne, affirmait Galilée chaque fois qu'il regardait la petite aiguille de sa montre.

L'escalier faisant communiquer ces pavillons au repaire souterrain est bien quelque part !

Concentration de celui que certains ont surnommé « Le génie du siècle » et certaines « La bite de l'année ». Mathias me fixe intensément, comme pour joindre sa phosphoration à la mienne. Deux grands esprits ne se neutralisent pas : ils s'additionnent. Dans son regard incarnat je vois fulgurer des hypothèses majuscules.

— Pourquoi un escalier ? lâché-je-t-il, en état second.

Léger décalage horaire chez le Prince de la Mayonnaise chantée. Il finit par dire :

— Un ascenseur !

J'examine le living, mais une idée me zèbre la coiffe.

Qui dit ascenseur dit cabine.

Qui dit cabine dit cabinet.

Je cavale aux cagoinsses plus rapidement que le gars auquel on a entonné un litre d'huile de ricin.

24

Ingénieux.

Je vais tenter de te faire comprendre.

Les chiches du pavillon mesurent un mètre vingt de large sur deux mètres cinquante de long. La partie autour de la cuvette est carrelée en blanc, le reste peint à l'huile dans les tons bleu ciel, couleur qui apporte une parfaite relaxation à tes entrailles pendant que tu les libères. En y regardant de près, on constate une rainure entre céramique et peinture, celle-ci continue du plancher au plaftard.

Le mec qui s'est trop baigné dans la mer Rouge demande :

— Tu brûles ?

- Ça se pourrait.

Je frappe le sol du talon : plus de doute, ça sonne le creux comme lorsque tu te cognes la tête contre la table en ramassant ta serviette. Ne reste plus qu'à dénicher le bouton de commande de cette cage.

— Tu veux bien me laisser faire ? propose mon pote.

— Et comment !

Il entre avec moi dans les gogues. Nous sommes comprimés kif deux garnements se taillant une plume. Le Homard procède à une inspection minutieuse du petit endroit. Puis, trouve en moins de temps qu'il n'en faut à ta bergère pour s'apercevoir qu'elle a épousé un con.

— Facile ! laconise-t-il en saisissant le commutateur électrique.

Mathias le prend entre le pouce et l'index et lui imprime un mouvement de rotation.

La partie avant du chiche se met à descendre, abandonnant la cuvette à son mélancolique destin.

Le cabinet-cabine parvient dans une sorte de sas en béton, fermé par une porte coulissante.

J'en tiens déjà la poignée quand l'époux de la friponne Angélique, pondeuse professionnelle et baiseuse intermittente, me tape sur l'épaule.

— Les masques ! jette-t-il d'un ton de reproche.

J'oubliais notre soporification ! Fissa, je me munis de cet élément indispensable et m'en affuble le groin. On s'entre-examine à travers nos vitres. Vachement Science-Fiction, tes potes ! On a l'air de tourner dans une culterie hollywoodienne, genre Les Martiens attaquent à l'aube.

Mais, assez débloqué.

Go !

Et nous gohons !

Je te le dis tout de suite. A quoi bon laisser se dessécher ta langue au chat, pour ce qu'elle est ragoûtante ! Une surprise monumentale se prépare.

Je m'attendais certes à tout, donc à rien ! N'empêche que j'en ramasse plein la frimousse, et Mathias idem.

Sidérant !

Figure-toi un immense couloir d'au moins deux cents mètres de long, brillamment éclairé par des lampes reproduisant la lumière du jour. Tu me suis ? Les murs sont peints à fresques et les barbouilles représentent les horizons de la Suisse bien-aimée. Formidable décor à nul autre pareil. C'est hyperréaliste ! Géant ! Tu reconnais la Jungfrau, dans les lointains. Les montagnes forment une chaîne infinie ; t'aperçois des chalets, des chemins sinueux ; au premier plan : troupeaux de vaches aux énormes cloches dont tu crois entendre la tintinnabulance, clochers à bulbes, ponts de pierre, et gussiers soufflant dans des cors des Alpes. Dans cette peinture colossale s'ouvrent des portes, des portes, des portes…

Voilà pour le décor, grosso-modiste, dirait le pauvre Alexandre-Benoît.

A présent, venons-en à la réalité.

Au milieu de l'interminable et très large couloir, sont écroulés pêle-mêle, humains et animaux, terrassés par le gaz de Sa Rouquinerie Mathias Ier. Ils l'ont inhalé alors qu'ils se rassemblaient pour débattre de l'incendie, je suppose (en anglais, I suppose). La plupart sont en pyjama ou robe de chambre. Le soporifique les faisant ronfler, le bruitage ambiant évoque un combat aérien pendant la Bataille d'Angleterre.

Nous entreprenons de débuler (abréviation de « déambuler ») parmi ces gisants. Notre produit les a anéantis à l'endors-toi-comme-je-te-pousse. Tiens, parmi les bipèdes, v'là les deux cadors de la gonzesse !

Et puis…

Oh Dieu de ceci, cela et de magnificence réunis ! Mes sens m'abusent-ils ? Se puisse-t-il ? Se pouva-ce ? Ce puisatier ?

Là, sur ma droite, près d'un mec étendu face contre terre…

Le Rouquemoute l'a aperçu en même temps que moi.

— C'est lui ? fait-il en avoixbaissant.

— Il me semble, exhalaisonné-je, et je tombe à genoux, telle la poire trop mûre.

Que soudain, emporté par l'émotion, je me prends à chialer derrière mon masque kif un veau de batterie sous les mamelles de sa chère maman.

— Salami ! hoqueté-je. Salami, mon amour !

25

Mon élan de joie retient les questions qui m'affluent. Les diffère, devrais-je plutôt dire. Je caresse à pleines mains le poil rêche de mon pote quadrupède. Il sent bon le rude toutou. Son sommeil artificiel n'a rien d'alarmant, sa respiration est régulière. Parfois, il agite ses grosses pattounes torses comme s'il courait au fion de quelque rabbit.

Pendant ces démonstrations de tendresse, Mathias se livre à une opération simple et fastidieuse : il photographie tous les gens allongés. Ainsi pourrons-nous constituer un dossier sur le Consortium.

Il est en plein turf, moi en pleines effusions, quand la porte menant au sas coulisse ; ce sont des gus sortis pour observer l'incendie qui reviennent. En nous découvrant, ils ont le réflexe de se précipiter. Hélas pour eux, le gaz aspiré par le courant d'air les cueille à froid ; ils titubent, s'effondrent. Bingo !

J'abandonne (très provisoirement) Salami, pour visiter les lieux. Presque toutes les pièces ressemblent à des cabines de bateau. L'ensemble possède un je-ne-sais-quoi de militaire. Certains logements sont occupés par des gens que le gaz a annihilés dans leur sommeil.

« Il n'y a, dans ce souterrain, que des hommes », songé-je.

Tiens, non, j'ai pensé trop vite. Voici une gonzesse ! Elle est allongée sur son pucier, le visage dans l'oreiller. Curieux, je m'en approche, la fais basculer sur le dos. Madoué ! comme le répète ma cousine de Quimper, tu sais qui ? Anne-Marie ! Oui, la potesse de Thomas Graham, le photographe dont la carcasse a alimenté les poissecailles au large de Lanzarote ! Si je m'attendais à la retrouver en ce lieu !

Drôle de chose que ma vie ! Tu parles d'un bouquet de violettes, Annette ! Je laisse la fille pour continuer mon exploration.

Survolté, de l'électricité plein le corps, je pousse infatigablement les portes se succédant le long de cette voie pour termites humains.

Ici, est un grand type blond dont l'abandon n'efface pas la physionomie sévère. Il roupille en compagnie d'un bel éphèbe entièrement nu, tenant les aumônières de son compagnon de lit à pleines paluches. J'éprouve une étrange sensation. Renifleur surdoué, l'Antonio joli. Crois-moi ou va te faire aimer par l'un des chimpanzés du zoo de Vincennes (dont les fenêtres de l'appartement donnent sur la cage d'Albert Benloulou), je devine que cet enculeur de damoiseaux est le chef du caravansérail.