« Eh bien, le cours semble plutôt avancé pour des élèves de ce niveau » dit-elle brusquement dans le dos de Rogue. « Je me demande même s’il est recommandé de leur enseigner comment faire une potion comme la potion de force. Je pense que le Ministère préférerait qu’elle soit rayée du programme. »
Rogue se redressa doucement et se retourna pour la regarder.
« Bien, .... depuis quand enseignez-vous à Poudlard ? » demanda-t-elle, la plume maintenue au-dessus de l’écritoire.
« Quatorze ans », rétorqua Rogue. L’expression de son visage était insondable. Harry, qui le regardait attentivement, ajouta quelques gouttes dans sa potion: elle siffla dangereusement et passa du turquoise à l’orange.
« Vous postuliez en premier lieu pour le poste de Défense contre les forces du mal, je crois ? » le Professeur Umbridge demanda à Rogue.
« Oui » dit Rogue calmement.
« Mais vous avez échoué ? »
Les lèvres de Rogue se retroussèrent dans une moue méprisante.
« Apparemment. »
Le Professeur Umbridge gribouilla sur son écritoire.
« Et vous avez régulièrement postulé pour ce poste de Défense contre les forces du mal depuis que vous êtes arrivé à l’école, je crois ? »
« Oui » répondit calmement Rogue en bougeant à peine les lèvres. Il avait l’air très en colère.
« Avez-vous une quelconque idée de la raison pour laquelle Dumbledore a constamment refusé de vous y nommer ? » demanda Umbridge.
« Je propose que vous alliez lui demander », dit Rogue d’une voix saccadée.
« Oh, c’est ce que je vais faire », dit le Professeur Umbridge avec un doux sourire.
« Je suppose que ça a de l’importance ? ? » demanda Rogue, ses yeux noirs se rétrécissant.
« Oh oui », dit le Pofesseur Umbridge, « oui, le Ministère veut une connaissance approfondie des - euh - antécédents des professeurs. »
Elle se retourna, marcha vers Pansy Parkinson et commença à la questionner sur ses cours. Rogue se tourna vers Harry et leurs yeux se croisèrent pendant une seconde.
Harry reporta hâtivement son regard sur sa potion, qui se coagulait maintenant d’une manière immonde et qui laissait échapper une odeur forte de caoutchouc brûlé.
« Encore une fois pas de points, donc, Potter », dit Rogue méchamment en vidant le chaudron de Harry d’un mouvement de sa baguette. « Vous m’écrirez un essai sur la composition correcte de cette potion, en indiquant comment et pourquoi vous vous êtes trompé, que vous me donnerez au prochain cours, c’est compris ? »
« Oui », dit Harry furieusement. Rogue leur avait déjà donné leurs devoirs et il avait entraînement de Quidditch ce soir; ce qui annonçait une paire de nuits blanches. Cela semblait impossible qu’il se soit réveillé si heureux ce matin. Tout ce qu’il voulait à présent c’était que cette journée finisse.
« Peut-être que je pourrai me défiler au cours de Divination », dit-il d’une voix triste, alors qu’ils allaient dans la cour après le déjeuner, le vent fouettant l’ourlet de leurs robes et le bord de leurs chapeaux. « Je ferais semblant d’être malade et je ferais l’essai de Rogue à la place, comme ça je n’aurai pas à rester éveillé la moitié de la nuit. »
« Tu ne peux pas sécher le cours de Divination » dit Hermione sévèrement.
« Ecoute-la parler! tu t’es enfuie du cours de Divination, tu détestes Trelawney !» dit Ron indigné.
« Je ne la déteste pas », dit Hermione doucement. « Je pense juste que c’est une personne absolument épouvantable et une véritable impostrice. Seulement Harry a déjà raté le cours d’Histoire de la magie et je ne crois qu’il peut se permettre d’en rater un autre aujourd’hui ! »
Il y avait bien trop de vrai dans ce qu’elle avait dit pour pouvoir l’ignorer, donc, une demi-heure plus tard, Harry rejoignit son siège dans la chaude atmosphère trop parfumée de la classe de Divination, en colère contre tout le monde. Le Professeur Trelawnay tenait encore dans ses mains des exemplaires de L’interprétation des rêves. Harry pensa qu’il aurait sûrement mieux passé son temps à faire la punition de Rogue que de rester assis ici à essayer de trouver un sens à un tas de rêves inventés.
Il semblait, cependant, qu’il n’était pas la seule personne au cours de Divination à être de mauvaise humeur. Le Professeur Trelawney claqua violemment un exemplaire de L’interprétation des rêves sur la table située entre Harry et Ron et s’éloigna rapidement, les lèvres pincées; elle jeta l’exemplaire suivant du livre près de Seamus et Dean, en évitant de peu la tête de Seamus, et poussa violemment le dernier dans la poitrine de Neville avec une telle force qu’il glissa de son pouf.
« Eh bien, continuons ! » dit-elle d’une voix forte et haut perchée qui avait quelque chose d’hystérique, «vous savez ce qu’il faut faire ! Ou bien suis-je un si médiocre professeur que vous n’avez jamais appris à ouvrir un livre ? »
Toue la classe la fixait d’un air perplexe, puis se regardait. Harry, cependant, crut comprendre ce qui se passait. Alors que le Professeur Trelawney retourna avec humeur sur sa chaise de professeur au long dossier, ses yeux magnifiques remplis de larmes de colère, il approcha son visage de Ron et murmura: « Je crois qu’elle a reçu les résultats de son inspection. »
« Professeur ?» demanda Parvati d’une voix étouffée (Lavande et elle avait toujours admiré le Professeur Trelawney). « Professeur, y a-t-il - euh- quelque chose qui ne va pas
? »
« Qui ne va pas ! » cria le Professeur Trelawney d’une voix frissonnant d’émotion.
« Evidemment que non! J’ai été insulté, sans aucun doute....des insinuations ont été faites sur moi....mais, tout va bien, évidemment que tout va bien! »
Elle prit une grande inspiration frissonnante et détourna son regard de Parvati, des larmes de colère coulant sous ses lunettes.
« Je ne parle même pas » dit-elle d’une voix étranglée, « des seize années de bons et loyaux services....c’est passé, apparemment, inaperçu...mais je ne me laisserai pas insulter, non, je ne me laisserai pas faire! »
« Mais, Professeur, qui vous insulte ? » demanda Parvati timidement.
« L’établissement! » dit le Professeur Trelawney d’une voix profonde et dramatique qui tremblait. « Oui, ceux qui ont les yeux trop embrumés par le monde terrestre pour Voir que je Vois, pour Savoir que je Sais... bien sûr, nous qui avons le troisième oeil avons toujours été craint, toujours été persécutés... c’est -hélas- notre destinée. »
Elle donna un coup de gosier, tamponna ses joues mouillées avec le bas de son châle, puis elle sortit un petit mouchoir brodé de sa manche et se moucha le nez très fort, avec le bruit que fait Peeves quand il fait pff .
Ron pouffa de rire. Lavande jeta vers lui un regard dégoûté.
« Professeur », dit Parvati, « vous voulez dire.... est-ce que c’est quelque chose que le Professeur Umbridge -? »
« Ne me parlez pas de cette femme ! » cria le Professeur Trelawney, sautant sur ses pieds, les perles de ses colliers cliquetant et les lunettes éclatantes. « Continuez gentiment votre travail! »
Et elle passa le reste du cours à parcourir les allées entre eux, les larmes fuyant toujours de sous ses lunettes, en murmurant ce qui semblait être des menaces entrecoupées de souffles.
« ....mieux vaut choisir de partir ..... indigne .... en sursis ..... on verra ça ......... comment ose-t-elle .... »
« Toi et Umbridge avez quelque chose en commun », dit doucement Harry à Hermione quand ils se retrouvèrent pour le cours de Défense contre les forces du mal. « Elle pense aussi sans aucun doute que Trelawney est une vieille impostrice...on dirait qu’elle l’a mise en sursis. »
Umbridge entra dans la pièce alors qu’il parlait, portant son noeud papillon en velours et une expression de grande suffisance.