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— Vite, vite, je crève, souffla Julius West.

Il lui arracha lui-même la seringue dès qu’elle l’eut remplie, et enfonça l’aiguille dans sa cuisse gauche. Il s’injecta le liquide tellement vite qu’il poussa un cri de douleur. Malko et Jeanie détournèrent la tête.

Puis, il arracha la seringue et l’aiguille et s’allongea sur le dos, les yeux fermés.

Peu à peu, son souffle redevint plus régulier. Il resta immobile trois ou quatre minutes, puis rouvrit les yeux. Les couleurs revenaient et il avait repris une expression rusée. Il se redressa, regarda Malko d’un air méfiant.

— Où sont mes fringues ? demanda-t-il. Je veux mes fringues.

Jeanie donna un ordre au gardien et on alla les lui chercher. Julius s’habilla rapidement. Le changement était incroyable. Maintenant ses yeux étaient pleins de ruse, de méchanceté. Il geignit en enfilant son pantalon, puis fixa Jeanie.

— Tu es une rude salope, dit-il. T’as voulu me faire crever.

Jeanie haussa les épaules sans répondre. Escortés du garde, ils se rendirent dans le bureau du capitaine. Avant d’entrer, Jeanie dit d’une voix dure :

— Ne t’amuse pas à nous promener. Parce que tu n’auras ta seconde dose que quand tout aura bien marché.

La conférence ne dura pas longtemps. Vingt minutes plus tard, Malko, Jeanie, Julius West et deux détectives s’entassaient dans la Ford. On avait passé les menottes au Noir. Quatre autres voitures du Narcotic Bureau suivaient à distance respectueuse, reliées par radio.

— Où allons-nous ? demanda Jeanie, alors qu’ils roulaient sur l’East River Drive.

— Monte jusqu’à la 125e. C’est après le Triboro Bridge. Et tu as intérêt à te planquer, sinon ils vont faire sauter ta jolie tête de pute.

Un des détectives lui donna un grand coup de coude qui lui coupa le souffle.

— Sois poli avec les dames, ordure.

Lentement, le petit convoi remontait l’East Drive. Al Katz avait été réveillé et restait lui aussi en liaison constante avec le quartier général du FBI à New York. Les quatre voitures transportaient un arsenal complet, y compris un bazooka, des gaz et des gilets pare-balles.

Chapitre XV

— C’est là, dit Julius, d’une voix mal assurée.

Il n’était pas encore en état de manque et pourtant ses mains tremblaient. Jeanie eut brusquement pitié de lui, avec son corps si maigre et ses yeux affolés.

— Tout ira bien, fit-elle à mi-voix.

Julius ne répondit pas. Il contemplait la planque des Mad Dogs. La voiture était arrêtée au coin de la Première Avenue et de la 128e Rue. Cent mètres plus loin, il y avait une maison promise à la démolition, accotée à l’East River. Les portes et les fenêtres étaient condamnées par des planches clouées en croix et de grandes pancartes avertissaient du danger qu’il y avait à pénétrer dans ces murs qui risquaient de s’effondrer à chaque instant.

— Il a l’air de n’y avoir personne, dit Malko.

Son idée de retrouver les otages lui semblait folle, maintenant. Il y avait tellement d’endroits où ils pouvaient se cacher à New York. Cet homme était prêt à leur raconter n’importe quoi. Pourtant, ce ne devait pas être facile de retenir prisonnières plusieurs personnes. Cette maison était l’endroit idéal. Pas de voisins, et le fleuve pour s’enfuir au besoin.

— Hier, ils étaient encore là, ricana Julius. Je leur ai vendu de la came.

— Tu as vu des étrangers avec eux ? demanda Jeanie.

Julius haussa les épaules.

— La baraque est immense. Quatre étages. Quand je viens, il y en a deux qui descendent et je fais le business en bas, ils ne me laissent pas monter.

— Combien sont-ils ?

— Sais pas.

— Ils sont armés ? demanda le détective.

Julius West eut un sourire venimeux.

— Sûr. Avec de gros pistolets qui vont faire de sacrés trous dans ta viande, poulet.

Le détective s’agita, mal à l’aise.

— Si on ne les prend pas par surprise, dit-il, ça va être un massacre. Ils auront dix fois le temps de liquider les otages. S’il y en a.

— Je vais y aller, proposa Jeanie. Avec Julius, ils ne se méfieront pas d’une femme. Et je sais me servir d’un pistolet. Je nettoie toujours celui de mon mari.

Malko secoua la tête.

— Si Julius vous trahit, nous ne pourrons rien pour vous. Laissez cela à un homme.

— Non, j’y vais, fit Jeanie.

Julius West recommençait à trembler comme une feuille. Jeanie le regarda froidement.

— Si tu ne fais pas l’idiot, tu auras assez de came pour te soigner. Comment ça se passe d’habitude ?

— Je vais gratter à la porte de côté, dans le terrain vague. Il y en a un qui vient. Avant d’ouvrir, il demande qui c’est. Ensuite, il remonte chercher le pognon et il me fait entrer. Ça dure jamais longtemps.

— Tu as un code pour frapper ?

— Deux, trois, deux.

Jeanie sourit à Malko.

— Je vais essayer de neutraliser celui du bas. Si ça ne marche pas, il ne faudra pas perdre de temps.

Al Katz n’était pas arrivé. Le chauffeur de la Ford était en train d’alerter les vedettes de la Brigade fluviale. Il y eut un rapide échange de consignes avec les autres voitures, puis il regarda sa montre.

— On y va dans cinq minutes, annonça-t-il. Le temps aux vedettes d’arriver.

* * *

Une Oldsmobile noire vint se garer presque en face de la maison abandonnée. Quatre policiers se trouvaient à l’intérieur, dont l’un avec un bazooka. Leur mission était d’attaquer la porte principale dès que l’effet de surprise serait passé.

Deux autres voitures stationnaient dans la 128e Rue, et les hommes de la quatrième se tenaient prêts à bondir à la suite de Jeanie. Les commissariats de Harlem étaient en alerte. Tout ce que New York comptait de policiers disponibles était prêt à se diriger vers cette maison abandonnée de l’East Side.

Mais pour l’instant, tout reposait sur Jeanie.

À travers le pare-brise de la Ford, Malko et le détective la virent entrer dans le terrain vague. Il n’y avait toujours aucun signe de vie dans la maison. Malko arma son pistolet extra-plat. Jeanie avait dans son sac un 38 spécial.

Julius parvint jusqu’à la porte condamnée et frappa après avoir regardé autour de lui. Comme il n’y avait aucune ouverture sur le côté, les occupants éventuels ne pouvaient l’avoir vu sortir de la Ford. Le détective à côté de Malko, murmura :

— Elle est gonflée d’aller avec une ordure pareille.

* * *

Jeanie tendait l’oreille de toutes ses forces. On n’entendait pas le moindre craquement à l’intérieur de la maison. Elle fit signe silencieusement à Julius de refrapper, mais il secoua la tête. Il était gris de peur. Le cœur de Jeanie battait à grands coups dans sa poitrine. Maintenant, il était trop tard pour reculer. La voix la fit sursauter.

— Julius ?

Une voix éraillée et basse, qui venait à travers la porte. L’homme avait dû coller ses lèvres au battant.

— Ouais, c’est moi.

— Qu’est-ce que tu veux ?

— Je suis chargé.

— On n’a besoin de rien. Demain peut-être.

La panique submergea Jeanie. C’était trop bête. Mais Julius réagit bien.

— Demain, je suis pas là, dit-il d’une voix geignarde. Et j’ai besoin de pognon ce soir.

— Bon, je vais voir, fit la voix. Attends.

Jeanie entendit des marches craquer, puis plus rien. Intérieurement, elle se mit à compter les secondes, pour dompter les pulsations de son cœur. Enfin, il y eut un frôlement.