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Elle posa encore un baiser sur le front de Sophie, avant de lui murmurer à l'oreille :

— Le temps des secrets est passé, maintenant, Princesse. Il est temps que tu connaisses la vérité sur notre famille.

Sophie et sa grand-mère étaient assises l'une à côté de l'autre sur les marches de la véranda, tendrement embrassées, quand le jeune homme traversa la pelouse en courant, les yeux brillant d'espoir et d'incertitude.

— Sophie ?

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Elle leva sur lui ses yeux gonflés par les larmes, acquiesça, se leva. Elle ne reconnaissait pas le visage de ce jeune homme, mais quand ils s'étreignirent, elle sentit la puissance d'un lien unique : ce sang qui battait dans leurs veines, ce sang, c'était le même.

En voyant Langdon descendre vers la maison pour les rejoindre, Sophie se sentait métamorphosée. La veille encore, elle se sentait seule au monde. Ce soir, dans cette contrée inconnue, entourée de ces trois êtres qu'elle connaissait à peine, elle se savait enfin chez elle.

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La nuit était tombée sur la colline de Rosslyn.

Debout un peu à l'écart, dans la véranda de la petite maison en meulière, Langdon se laissait bercer par les rires qui s'échappaient par la fenêtre ouverte. La tasse de fort café brésilien fumant dans sa main lui avait brièvement fait oublier son immense fatigue. Mais il se sentait trop exténué pour que ce sursis se prolonge bien longtemps.

— Vous avez filé à l'anglaise ! fit une voix derrière lui.

La grand-mère de Sophie, ses cheveux argentés luisant dans la nuit, souriait, debout sur le pas de la porte. Marie Chauvel.

C'était le nom qu'elle portait depuis vingt-huit ans.

— Je voulais vous laisser ensemble tous les trois, s'excusa Langdon avec un sourire fatigué.

À travers la fenêtre, il voyait Sophie discuter avec son frère.

Elle s'approcha de lui.

— Monsieur Langdon, quand j'ai appris la mort de mon mari, j'ai eu très peur pour Sophie. Son apparition ce soir à la porte a été la plus grande joie de ma vie. Je ne pourrai jamais assez vous remercier.

Langdon ne savait que répondre. Il avait eu beau proposer à Sophie et à sa grand-mère de se retrouver en tête à tête pour converser tranquillement, Marie lui avait demandé de rester.

Mon mari avait apparemment une grande confiance en vous, monsieur Langdon, soyez donc des nôtres.

Langdon était ainsi resté, debout à côté de Sophie, pour écouter, bouche bée, Marie raconter l'histoire des parents de la jeune femme. La mère de Sophie était une descendante de la branche des Mérovingiens issue de Marie Madeleine et de Jésus. Les ancêtres de Sophie, les Plantard et les Saint-Clair, avaient, pour déjouer d'éventuelles recherches, changé de nom.

Sophie et son frère, leurs descendants directs, avaient été jalousement protégés par le Prieuré de Sion. Lorsque leurs parents avaient été tués dans un accident, dont on n'avait jamais réussi à éclaircir les circonstances, la Fraternité avait craint que le secret de la lignée royale n'ait été éventé.

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— Aussitôt après l'accident, avait expliqué Marie d'une voie étranglée de tristesse, ton grand-père et moi avons dû prendre une décision douloureuse. On venait de retrouver la voiture de vos parents dans la rivière.

Elle se tamponna les yeux.

— Nous étions censés voyager tous les six dans cette voiture ce jour-là, mais heureusement nous avons changé nos plans au dernier moment et vos parents sont partis seuls. Nous avons malheureusement été incapables, avec Jacques, de découvrir s'il s'agissait vraiment d'un accident.

Marie regarda Sophie.

— Il fallait vous protéger tous les deux, c'était notre devoir, et nous avons fait ce que nous estimions le plus sage. Jacques a déclaré à la police que ton frère et moi étions à bord de la voiture. Nos deux corps avaient dû être emportés par le courant.

En tant que Grand Maître, il ne pouvait pas se permettre de partir de Paris. Nous avons décidé que ton frère et moi quitterions la France et que tu resterais avec lui. Jacques et moi ne nous sommes revus que très rarement, dans des lieux différents, et toujours sous la protection du Prieuré, au cours de cérémonies rituelles.

Un sourire rêveur avait éclairé le visage de Sophie.

C'est à ce moment que Langdon, se sentant décidément de trop, s'était éclipsé dans le jardin.

Et maintenant, en regardant les pinacles de Rosslyn, il se laissait envahir une fois de plus par les mêmes questions lancinantes.

Le mystère n'était pas résolu.

Le Graal se trouve-t-il vraiment ici, à Rosslyn ? Et si oui, où sont la lame et le calice que mentionnait Saunière dans son poème ?

— Donnez-moi cela, dit Marie, en approchant sa main.

— Merci, fit Langdon en lui tendant sa tasse vide.

— Non. Ce que vous tenez dans l'autre main..., dit-elle en montrant le rouleau de parchemin.

— Bien sûr, excusez-moi ! Marie souriait avec humour.

— Je connais un banquier parisien qui sera bien content de récupérer son coffret en bois de rose. André Vernet était un ami

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intime de mon mari. Il aurait fait n'importe quoi pour honorer sa confiance.

Jusqu'à tirer sur moi, pensa Langdon, qui omit de signaler qu'il avait sans doute brisé le nez du pauvre homme.

— Et le Prieuré ? demanda-t-il en pensant aux trois sénéchaux assassinés. Que va-t-il se passer, maintenant ?

— La relève est déjà prévue. Ce n'est pas la première épreuve que notre Fraternité aura traversée. Des frères sont prêts à prendre en main ses destinées.

Depuis le début de la soirée, Langdon se doutait que Marie Saunière était étroitement liée aux décisions du Prieuré, qui avait toujours compté des femmes dans ses rangs. Quatre de ses Grands Maîtres avaient été des femmes. Si les sénéchaux - les gardiens - étaient toujours des hommes, les membres féminins de la confrérie y jouaient un rôle prépondérant, et pouvaient être appelés à sa direction du jour au lendemain, quelle que fût leur position dans l'organisation.

Langdon repensa à Leigh Teabing et à l'abbaye de Westminster. Tout ça lui semblait si loin, à présent.

— Est-il vrai que l'Église catholique a fait pression sur votre mari pour l'empêcher de publier les documents du Graal au moment de la Fin des Temps ?

— Mon Dieu, non ! Cette légende d'un délai fatidique est une invention de paranoïaque. Jamais aucune date n'a été fixée pour la révélation du secret. Bien au contraire, la doctrine du Prieuré a toujours été de ne jamais le divulguer.

— Jamais ? reprit Langdon, stupéfait.

— Bien plus que le Graal lui-même, c'est le mystère dont il est entouré qui nous intéresse, le merveilleux qui en fait toute la beauté. Certains voient dans le Saint-Graal le calice qui symbolise la rédemption et la vie éternelle. D'autres sont fascinés par la quête des documents secrets et son aventure ésotérique. Mais j'ai le sentiment que, pour la plupart d'entre nous, il est tout simplement un idéal très noble, un trésor inaccessible, qui introduit un peu de grâce dans le chaos du monde actuel.

— Mais si les documents demeurent cachés, la vérité sur Marie Madeleine sera perdue à jamais...

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— Vous croyez ? Regardez autour de vous, toutes les œuvres d'art et de musique, tous les livres qui racontent son histoire. Et il s'en crée sans cesse de nos jours. Le monde commence seulement à comprendre les périls qui le menacent, à reconnaître les impasses dans lesquelles il s'est engagé. À sentir qu'il est urgent de redonner sa place au Féminin sacré. Ne m'avez-vous pas dit que vous étiez en train de préparer un ouvrage sur la question ?