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— En effet.

— Dépêchez-vous de le publier, monsieur Langdon.

Chantez la geste de Marie Madeleine. Le monde actuel a besoin de troubadours.

Langdon resta silencieux, laissant ce message d'un autre temps s'instiller en lui.

La lune nouvelle se levait au-dessus de la cime des arbres.

Tournant la tête vers Rosslyn, Langdon se sentit tenaillé par la même convoitise enfantine. Connaître le secret de Rosslyn. Mais il n'osait pas importuner son hôtesse. Pas de questions, se disait-il. Ce n'est pas le moment. Il jeta un coup d'œil au papyrus dans la main de Marie, puis vers Rosslyn.

— Allez-y, posez-la, cette question qui vous brûle les lèvres, murmura Marie Saunière, une lueur d'amusement dans les yeux. Vous l'avez bien mérité.

Langdon se sentit rougir.

— Vous voulez savoir si c'est bien ici que le Graal est enterré...

— Pouvez-vous me répondre ?

Elle laissa échapper un petit rire désabusé.

— Les hommes ne peuvent décidément pas accepter de le laisser reposer en paix... Qu'est-ce donc qui vous fait croire qu'il est à Rosslyn ?

Langdon lui montra le papyrus dans sa main.

— Le dernier poème de votre mari l'évoque spécifiquement.

Mais il mentionne aussi une Lame et un Calice veillant sur le Graal. Or je n'ai pas vu une seule représentation de Lame ou de Calice dans la chapelle.

— Et à quoi ressemblent-ils, cette Lame et ce Calice ?

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Langdon se rendait compte qu'elle se moquait gentiment de lui, mais il lui décrivit rapidement les deux symboles.

Soudain, l'écho d'un lointain souvenir anima les traits de la vieille dame.

— Ah oui, bien sûr, la Lame, qui représente tout ce qui est masculin... elle ressemble bien à cela n'est-ce pas ?

Elle traça un signe dans la paume de sa main.

— Oui, fit Langdon, surpris par la variante « fermée » que Marie avait dessinée.

— Et son complément, le Calice, symbole du féminin.

— Exact, reprit Langdon.

— Et vous me dites que vous ne les avez pas vus parmi les centaines de symboles que l'on trouve à Rosslyn ?

— Hélas, non.

— Dormirez-vous mieux cette nuit si je vous les montre à présent ?

Sans attendre sa réponse, elle avançait déjà sur le chemin menant à la chapelle. Langdon s’élança derrière elle.

Elle alluma la lumière en entrant et montra le sol à Langdon

: — Les voilà ! La Lame et le Calice. Langdon scruta les dalles nues.

— Mais je ne vois rien...

La vieille dame poussa un soupir et se mit à marcher sur le dallage, suivant le même itinéraire qu'avaient suivi, quelques heures plus tôt, les touristes guidés par le frère de Sophie.

Langdon avait beau reconstituer mentalement le symbole que dessinait ce parcours, il ne comprenait toujours pas.

— Mais c'est l'étoile de Dav...

Langdon s'interrompit brusquement, incapable d'articuler un mot.

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La Lame et le Calice, fusionnés en un unique symbole.

Le sceau de Salomon... l'union parfaite entre l'homme et la femme qui marquait l'entrée du saint des saints... le lieu où étaient censés résider les Dieux complémentaires, Yahvé et Shekinah.

Langdon eut besoin de quelques instants pour retrouver la parole.

— C'est exactement ce que dit le poème! s'exclama Langdon. La concordance est parfaite...

Le Graal se trouve à Rosslyn !

— Apparemment, fit Marie avec un sourire tranquille.

Les conséquences de sa déduction le firent frissonner.

— Mais alors, il est caché dans la crypte ? Elle partit d'un rire espiègle.

— En esprit seulement. L'un des devoirs sacrés du Prieuré était de le rapporter sur sa première terre d'adoption, en France, après des siècles de déplacements successifs destinés à le protéger de ses ennemis. Lorsque mon mari a été nommé Grand Maître, il a reçu pour mission de rapatrier le Saint-Graal et de lui trouver un sanctuaire qui soit digne d'une reine.

— Et a-t-il réussi ?

Le visage de la vieille dame se fit plus grave :

— Monsieur Langdon, au nom de tout ce que vous avez fait pour moi, et en tant que directrice de la Fondation Rosslyn, je peux vous affirmer que le Graal n'est plus ici aujourd'hui.

Mais cela ne suffisait pas à Langdon.

— Et pourtant, la clé de voûte est censée révéler son emplacement actuel. Pourquoi M. Saunière a-t-il alors expressément mentionné Rosslyn dans le premier vers du quatrain ?

— Peut-être l'avez-vous mal interprété. Vous n'ignorez pas que le Graal peut parfois être trompeur. Et mon mari aussi...

— Mais il ne pouvait être plus clair... Nous nous trouvons au-dessus d'une crypte enfouie sous la Lame et le Calice, eux-mêmes surmontés d'une voûte étoilée, dans une chapelle qui

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porte le nom de la Rose Ligne, construite par des Templiers et des francs-maçons... Il semble difficile d'imaginer une correspondance plus limpide.

— Attendez, que je le relise, dit-elle en déroulant le parchemin.

Sous l'ancienne Roslin, le Saint-Graal nous attend La Lame et le Calice la protègent du temps Ouvragée avec art par les maîtres des maîtres Sous la voûte étoilée enfin elle repose

Après un court silence songeur, un sourire amusé éclaira le visage de Marie Saunière :

— Ce Jacques...

— Vous avez compris ce qu'il voulait dire ?

— Comme vous venez de le constater en parcourant le sol de cette chapelle, il y a plusieurs façons de voir les choses simples.

Langdon, pourtant habitué aux doubles sens que chérissait Saunière, ne comprenait toujours pas. Elle laissa échapper un bâillement.

— Je vais vous faire une confidence, monsieur Langdon. Je n'ai jamais été officiellement dans le secret de l'emplacement du Saint-Graal. Mais j'ai été mariée au Grand Maître du Prieuré, et mon intuition féminine m'a permis de deviner certaines choses.

Je regrette beaucoup qu'après vous être donné tout ce mal, vous soyez obligé de quitter Rosslyn sans réponse définitive. Et pourtant, quelque chose me dit que vous la trouverez un jour.

Elle s'imposera à vous, avec l'évidence d'une révélation. Et ce jour-là, je ne doute pas que vous saurez en garder le secret.

Ils entendirent quelqu'un franchir le seuil de la chapelle.

— Je me demandais où vous étiez, tous les deux ! lança la voix claire de Sophie qui venait de paraître à la porte.

— J'allais rentrer, dit sa grand-mère en l'embrassant sur le front. Bonne nuit, Princesse. N'oblige pas M. Langdon à veiller trop tard.

Ils sortirent sous le porche et regardèrent la vieille dame s'éloigner d'un pas lent et tranquille.

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Quand Sophie se tourna vers lui, ses yeux luisaient d'une profonde émotion.

— Je ne m'attendais vraiment pas à ce que notre jeu de piste se termine ainsi..., murmura Sophie.

Moi non plus, pensa Langdon conscient de l'orage intérieur qu'elle vivait. Les nouvelles qu'elle avait reçues aujourd'hui avaient transfiguré sa vie.

— Ça va ? lui demanda-t-il. Vous avez eu votre lot d'émotions fortes, ce soir...

— J'ai retrouvé une famille, dit-elle avec un sourire heureux mais fatigué. Il va me falloir quelque temps pour digérer mon histoire...

Et comme Langdon se taisait.

— Vous allez rester un peu ici ? Au moins quelques jours ?

— Non, Sophie, je préfère rentrer à Paris, soupira Langdon.

Je repartirai demain matin. Vous avez besoin de rester entre vous.

Si elle était déçue, elle ne le manifesta pas. C'était peut-être mieux ainsi. Soudain, elle lui prit la main et l'entraîna vers le sommet de la colline. La lueur pâle de la lune perçait les nuages, éclairant les stèles grises du cimetière et faisant danser des reflets métalliques sur la petite rivière qui s'écoulait au fond du vallon. Ils restèrent là longtemps, sans parler, la main dans la main, en proie à la même fatigue heureuse.