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— Je ne peux pas croire, avait-il dit en fixant les caméras avec une lueur douloureuse dans le regard, que le Président oserait déshonorer la mémoire de ma femme avec ces mensonges malveillants.

La performance télévisuelle du sénateur Sexton avait été si convaincante que même Gabrielle s‘était demandé pendant une seconde s‘ils avaient vraiment couché ensemble. Et, en le voyant mentir avec une telle facilité, Gabrielle avait compris que le sénateur était un homme vraiment dangereux.

Ces derniers temps, bien qu‘elle fût certaine d‘avoir misé, dans la course présidentielle, sur le concurrent le plus efficace, Gabrielle avait commencé à douter. En travaillant étroitement avec Sexton, elle avait eu l‘occasion de découvrir l‘homme derrière la façade et, comme un enfant qui visite les coulisses d‘un studio de cinéma, elle avait ressenti une sévère désillusion.

Bien que la foi de Gabrielle dans le message de Sexton demeurât intacte, elle commençait à se demander si le sénateur était vraiment le Président qu‘elle souhaitait au pays.

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10.

— Ce dont je vais vous parler, Rachel, est classifié UMBRA, fit le Président. Cette classification est bien supérieure à votre habilitation actuelle.

Rachel sentit les parois d’Air Force One se resserrer. Le Président l‘avait fait venir à Wallops Island, l‘avait invitée à bord de son avion, lui avait servi du café, lui avait révélé qu‘il avait l‘intention de se servir d‘elle à des fins politiques contre son propre père, et maintenant il lui annonçait qu‘il avait l‘intention de lui communiquer illégalement des informations classifiées. Si affable que Zach Herney fût apparu en surface, Rachel Sexton venait de comprendre quelque chose d‘important : quand le Président avait la main, il ne la lâchait plus.

— Il y a deux semaines, reprit Herney, les yeux rivés à ceux de son interlocutrice, la NASA a fait une découverte.

Ces paroles flottèrent un moment dans l‘air avant que Rachel ne parvînt à les interpréter. Une découverte de la NASA ? Dans les récents rapports qu‘elle avait vus passer, elle n‘avait rien lu d‘extraordinaire concernant l‘activité de l‘Agence spatiale. Ses seules découvertes relatives à la NASA concernaient les limites budgétaires que celle-ci venait une fois de plus de repousser en raison d‘un nouveau projet.

— Avant de continuer, reprit le Président, j‘aimerais savoir si vous partagez le cynisme de votre père au sujet de l‘exploration spatiale.

Rachel se cabra.

— Monsieur le Président, j‘ose espérer que vous ne m‘avez pas fait venir jusqu‘ici pour que je demande à mon père de cesser ses attaques contre la NASA.

Il rit.

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— Mon Dieu, non ! J‘ai, suffisamment fréquenté le Sénat pour savoir que personne ne peut empêcher Sedgewick Sexton de faire quoi que ce soit.

— Mon père est un opportuniste, monsieur le Président. La plupart des hommes politiques qui réussissent le sont. Et, malheureusement, la NASA s‘est transformée toute seule en opportunité.

La récente série d‘échecs de la NASA était devenue si intolérable que l‘on ne savait plus si l‘on devait en rire ou en pleurer : les satellites se désintégraient les uns après les autres, les sondes n‘envoyaient pas les signaux attendus, la station spatiale internationale voyait son budget décupler et les pays associés aux projets se défilaient les uns après les autres. Les milliards se volatilisaient et le sénateur Sexton surfait sur le désastre, comme sur une vague qui semblait destinée à l‘amener jusqu‘aux rives de la Maison Blanche.

— J‘admets, poursuivit le Président, que la NASA a pris des airs de catastrophe, ces temps-ci. Chaque fois que je reprends mon souffle, ils me donnent un nouveau motif de réduire son financement.

Rachel vit une ouverture et se précipita sur l‘occasion.

— Et pourtant, monsieur le Président, je viens juste de lire que vous leur avez accordé un dépassement de trois autres millions de dollars en urgence la semaine dernière. Pour empêcher la faillite, n‘est-ce pas ?

Le Président partit d‘un petit rire.

— Votre père a dû jubiler quand il a vu ça, non ?

— Vous lui avez tendu les verges pour vous battre.

— Est-ce que vous l‘avez entendu au dernier débat télévisé ? « Zach Herney est un toxico de l‘espace et les contribuables sont les sponsors de son vice. »

— Mais vous ne cessez de le pousser à continuer, monsieur le Président.

Herney acquiesça.

— Je n‘ai jamais caché que je suis un supporter de la NASA.

Je l‘ai toujours été. Je suis un enfant de la conquête de l‘espace et je n‘ai jamais hésité à exprimer mon admiration et ma fierté pour notre programme spatial. Pour moi, les hommes et les

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femmes de la NASA sont les pionniers de l‘histoire moderne. Ils tentent l‘impossible, ils acceptent l‘échec et reviennent inlassablement à leur planche à dessin alors que tout le monde les accable de critiques...

Rachel resta silencieuse, sentant que, malgré son calme apparent, le Président bouillait d‘une rage indignée devant les attaques à répétition du sénateur contre la NASA. Rachel se demandait ce que l‘Agence avait bien pu découvrir. Le Président prenait manifestement son temps avant d‘en venir au fait.

— Aujourd‘hui, fit Herney d‘une voix plus tendue, j‘ai l‘intention de changer complètement votre opinion sur la NASA.

Rachel lui jeta un regard perplexe.

— Vous avez déjà ma voix, monsieur le Président, vous devriez peut-être vous concentrer sur le reste du pays.

— C‘est bien ce que j‘ai l‘intention de faire. (Il avala une gorgée de café et sourit.) Et je vais vous demander de m‘aider...

(Il se pencha vers elle.) D‘une façon tout à fait inhabituelle, ajouta-t-il.

Rachel sentit que Herney la fixait intensément, un peu comme un chasseur qui essaie de deviner si sa proie a l‘intention de fuir ou de combattre. Malheureusement, Rachel savait qu‘il n‘y avait pas d‘issue.

— Je suppose, poursuivit le Président, en versant de nouveau du café dans leurs deux tasses, que vous connaissez le projet EOS ?

Rachel hocha la tête.

— Earth Observation System, le système d‘observation de la terre. Je crois que mon père m‘en a parlé une ou deux fois.

Face à cette tentative de sarcasme, le Président fronça les sourcils. En vérité, le père de Rachel avait bien évoqué le système d‘observation de la terre chaque fois qu‘il avait pu.

C‘était l‘un des projets les plus onéreux et les plus controversés de la NASA. Il s‘agissait de mettre en place une série de cinq satellites conçus pour étudier et analyser les problèmes environnementaux de la planète : diminution de la couche d‘ozone, fonte des glaces polaires, réchauffement de l‘atmosphère, déforestation... EOS devait fournir des données