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macroscopiques aux environnementalistes afin qu‘ils soient mieux armés pour prévoir l‘avenir de la planète.

Malheureusement, le projet EOS avait connu une série d‘échecs successifs et Zach Herney avait dû monter en première ligne pour le soutenir. Il s‘était appuyé sur le lobby écologiste pour arracher 1,4 milliard de dollars au Congrès. Mais, loin de fournir les données promises, EOS s‘était rapidement enlisé dans

un

cauchemar

de

lancements

ratés,

de

dysfonctionnements informatiques et de conférences de presse consternées de la direction de la NASA. Le seul à sourire ces temps-ci était le sénateur Sexton, qui ne cessait de rappeler aux électeurs les montants engloutis par le Président dans le programme EOS – « l‘argent des contribuables » –, et combien ses retombées avaient été médiocres.

Le Président plongea un sucre dans sa tasse.

— Si surprenant que cela puisse paraître, la découverte dont je vous parle a été faite par EOS.

Rachel ne comprenait plus. Si l‘EOS venait de connaître une réussite aussi importante, la NASA l‘aurait certainement annoncée. Alors que son père crucifiait EOS dans les médias, c‘était l‘occasion rêvée pour l‘Agence spatiale de redorer son blason.

— Je n‘ai rien entendu, concernant une quelconque découverte d‘EOS, fit Rachel.

— Je sais. La NASA préfère garder la bonne nouvelle secrète quelque temps.

Rachel en doutait.

— Jusqu‘ici, monsieur, j‘avais plutôt l‘impression que, dès que la NASA avait une information à communiquer, elle sautait sur l‘occasion.

La discrétion n‘était effectivement pas le fort des relations publiques de l‘Agence. Et le contenu de leurs annonces, lors des conférences de presse, était souvent si maigre que les collègues de Rachel au NRO en faisaient des gorges chaudes.

Le Président fronça les sourcils.

— Ah oui, j‘oubliais, je parle à un disciple de Pickering, le grand prêtre de la sécurité du NRO. Est-ce qu‘il grogne toujours autant contre les langues trop bien pendues de la NASA ?

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— La sécurité est son travail, monsieur. Il la prend très au sérieux.

— Il a sacrement intérêt. Je trouve seulement abscons de voir que deux agences qui ont tant de choses en commun trouvent toujours le moyen de se bagarrer pour un oui ou pour un non.

En collaborant avec William Pickering, Rachel avait appris depuis longtemps que, si la NASA et le NRO étaient deux agences spatiales américaines, elles avaient des philosophies diamétralement opposées. Le NRO était une agence militaire, dont toutes les activités étaient classées secret-défense, tandis que la NASA était, selon William Pickering, un repère d‘universitaires et de savants qui ne résistaient jamais à la tentation de crier sur les toits toutes leurs découvertes en faisant courir des risques à la sécurité nationale. Certaines technologies parmi les plus sophistiquées de la NASA – lentilles à haute résolution pour télescopes satellitaires, systèmes de communication à très longue portée, systèmes d‘imagerie radio – avaient ainsi la regrettable habitude de surgir dans l‘arsenal de gadgets des services de renseignements ennemis et d‘être utilisées pour espionner les États-Unis. Bill Pickering maugréait souvent que, si les scientifiques de la NASA avaient une grosse cervelle, ils avaient surtout une grande gueule.

Un contentieux encore plus lourd entre les deux agences touchait aux lancements des satellites du NRO sur lesquels la NASA avait la haute main : nombre des récents échecs de l‘Agence spatiale avaient directement affecté la Maison Pickering. Entre tous, l‘échec le plus spectaculaire avait été celui du 12 août 1998, lorsqu‘une fusée Titan IV, lancée conjointement par la NASA et l‘armée de l‘air américaine, avait explosé quarante secondes après sa mise à feu, détruisant instantanément un satellite du NRO baptisé Vortex 2 qui avait coûté la modique somme d‘ 1,2 milliard de dollars. Pickering semblait peu disposé à oublier cet « incident ».

— Alors pourquoi la NASA n‘a-t-elle pas fait connaître sa réussite récente ? insista Rachel sur un ton de défi. C‘était pourtant le moment ou jamais d‘annoncer une bonne nouvelle.

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— La NASA est restée silencieuse, rétorqua le Président, parce que je le lui ai ordonné.

Rachel se demanda si elle avait bien entendu. S‘il disait vrai, le Président s‘infligeait une sorte de hara-kiri politique, complètement incompréhensible pour elle.

— Cette découverte, fit Herney, est... absolument stupéfiante dans ses implications.

Rachel se sentit parcourue d‘un frisson. Dans le monde des services de renseignements, l‘expression « implications stupéfiantes » était rarement synonyme de bonne nouvelle.

Toutes ces cachotteries autour de l‘EOS étaient-elles liées à la découverte d‘un désastre environnemental ?...

— Y a-t-il un problème ?

— Pas le moindre problème. Ce que l‘EOS a découvert est absolument extraordinaire.

Rachel garda le silence.

— Voyons, Rachel, supposons que je vous dise que la NASA vient de faire une découverte scientifique majeure... dont la signification est tellement bouleversante... qu‘elle justifierait tous les dollars que les Américains ont dépensés dans la conquête de l‘espace ?

Rachel ne parvenait pas à y croire. Le Président se leva.

— Allons faire un tour, s‘il vous plaît, mademoiselle.

11.

Rachel suivit le président Herney sur la passerelle scintillante d‘ Air Force One. En descendant les marches, elle sentit l‘air vif clarifier son esprit. Malheureusement, cela ne faisait que rendre les déclarations du Président plus saugrenues encore.

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La NASA aurait fait une découverte d‘une telle importance scientifique qu‘elle justifierait tout l‘argent investi dans la recherche spatiale ?

La jeune femme ne pouvait imaginer, s‘agissant d‘une découverte de cette importance, qu‘une seule possibilité – le Saint-Graal de la NASA : le contact avec une forme de vie extraterrestre. Rachel connaissait cependant assez bien le sujet pour savoir qu‘une telle hypothèse restait extrêmement improbable.

En tant qu‘analyste d‘un service de renseignements, Rachel devait sans cesse répondre aux questions de ses proches qui voulaient en savoir plus sur de prétendus contacts avec des extraterrestres que le gouvernement aurait dissimulés. Elle était souvent consternée par les théories que ses amis, pourtant cultivés, lui débitaient tout à trac – des histoires d‘accidents de soucoupes volantes que le gouvernement cacherait dans des bunkers secrets, de cadavres d‘extraterrestres congelés dans la glace, ou encore d‘enlèvements de citoyens sur lesquels on mènerait des expériences médicales.

Ces rumeurs étaient bien sûr absurdes, il n‘y avait pas d‘extraterrestres, ni de dissimulation du gouvernement à cet égard.

Tous ses collègues de la communauté du renseignement savaient comme elle que, dans leur immense majorité, les témoignages sur les ovnis ou les enlèvements d‘extraterrestres étaient le simple produit d‘imaginations exaltées ou émanaient de patrons de presse désireux de faire grimper leurs tirages. Et, quand on retrouvait des preuves photographiques de l‘existence de ces ovnis, il s‘avérait que ces photos, comme par hasard, étaient toujours réalisées à proximité de bases militaires aériennes américaines où l‘on expérimentait des prototypes secrets. Quand Lockheed avait commencé ses essais autour d‘un nouveau bombardier furtif sur la base aérienne Edwards, les témoignages relatifs aux ovnis, aux environs de la base, s‘étaient brusquement multipliés.