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Elle en avait profité pour imprimer des copies des chèques qu‘il avait reçus. Après la confrontation devant le Washington Monument, elle les avait remises à son patron stupéfait, en lui imposant ses exigences. « Vous laissez le Président annoncer lui-même son erreur sur la météorite, ou je livre ces papiers à la presse. » Après un rapide coup d‘œil aux documents de Gabrielle, le sénateur s‘était engouffré dans sa limousine et avait disparu. Depuis, on était sans nouvelles de lui.

Le Président et Gabrielle approchaient maintenant de la salle de presse, d‘où montaient les murmures des journalistes impatients. Pour la deuxième fois en vingt-quatre heures, le président des États-Unis allait faire une déclaration exceptionnelle.

— Qu‘allez-vous leur dire ? demanda Gabrielle.

Le visage étonnamment calme, Herney laissa échapper un soupir.

— Il y a une chose que j‘ai apprise et réapprise au fil des ans, répondit-il en lui posant la main sur l‘épaule. Rien ne remplace la vérité.

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Envahie par une fierté inattendue, Gabrielle regarda Zach Herney avancer vers la scène. Il allait avouer publiquement la plus grosse erreur de sa vie mais, curieusement, il n‘avait jamais paru aussi digne et imposant.

133.

Rachel s‘éveilla dans l‘obscurité.

Le réveil lumineux indiquait 22 h 14. Elle n‘était pas dans son lit. Elle resta immobile de longues minutes, cherchant à se repérer, et la mémoire lui revint peu à peu... le panache géant...

le Washington Monument ce matin... l‘invitation de Zach Herney à venir se reposer chez lui.

Je suis dans une chambre de la Maison Blanche. J‘y ai passé toute la journée à dormir, réalisa-t-elle.

À la demande du Président, l‘hélicoptère des gardes-côtes avait embarqué au Washington Monument les trois rescapés épuisés pour les transporter jusqu‘à la résidence présidentielle, où ils avaient été examinés par des médecins avant de dévorer un petit déjeuner plantureux. On leur avait ensuite proposé d‘aller dormir dans l‘une des quatorze chambres de la maison.

Tous trois avaient accepté.

Rachel n‘en revenait pas d‘avoir dormi si longtemps. Elle alluma la télévision et découvrit avec stupéfaction que la conférence de presse du Président était terminée. Comme ses deux compagnons, elle avait proposé de paraître à son côté quand il annoncerait au monde la tromperie dont il avait été victime. C‘est notre erreur à tous, avaient-ils insisté. Mais Herney avait tenu à endosser seul la responsabilité.

— Il semble malheureusement, commentait un analyste politique, que la NASA n‘ait finalement découvert aucune trace de vie provenant de l‘espace. C‘est la deuxième fois en dix ans que l‘agence spatiale affirme à tort avoir trouvé des traces de vie

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extraterrestre sur une météorite. Cette fois-ci pourtant, un certain nombre de scientifiques indépendants faisaient partie des dupes.

— On aurait pu penser, reprit un autre commentateur, qu‘une escroquerie de cette envergure se révélerait dévastatrice pour la carrière politique du Président. Or, après l‘épisode du Washington Monument de ce matin, force est de reconnaître que les chances de réélection de Zach Herney n‘ont jamais été aussi grandes.

Le premier analyste hocha la tête :

— Pas de vie dans l‘espace donc, mais pas non plus pour la campagne du sénateur Sexton. D‘autant que des informations récentes font état de ses importantes difficultés financières...

Rachel détourna les yeux du poste. On frappait à la porte.

Michael, pensa-t-elle pleine d‘espoir. Elle ne l‘avait pas vu depuis le petit déjeuner. En arrivant à la Maison Blanche, son désir le plus cher était de s‘endormir dans ses bras, et elle sentait bien qu‘il y songeait aussi. Mais Corky s‘était assis sur le lit destiné à Tolland pour leur raconter avec force détails comment son urine lui avait sauvé la vie. À bout de forces, Rachel et Michael avaient abandonné la partie et s‘étaient réfugiés chacun dans leur chambre.

En se dirigeant vers la porte, elle se regarda dans le miroir et sourit à la vue de son accoutrement. Avant de se coucher, elle n‘avait trouvé dans le tiroir de la commode qu‘un vieux T-shirt de l‘équipe de football de Penn State, qui lui descendait jusqu‘aux genoux.

On toqua à nouveau.

Elle ouvrit et, à sa grande déception, se trouva nez à nez avec un agent du Secret Service. Une jolie femme, à l‘allure sportive, en blazer bleu marine.

— Mademoiselle Sexton, l‘occupant de la chambre de Lincoln a entendu votre poste de télévision. Il m‘a demandé de vous dire que, puisque vous étiez réveillée...

La jeune femme haussa les sourcils, visiblement habituée aux invitations nocturnes d‘une chambre à l‘autre dans la maison.

— Merci, fit Rachel en rougissant.

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Elle suivit sa messagère le long d‘un couloir somptueusement meublé, jusqu‘au seuil d‘une simple porte en bois.

— La chambre de Lincoln, dit la femme. Je suis censée rester postée devant. Dormez bien, et gare aux fantômes.

Rachel hocha la tête. Les légendes de revenants dans cette chambre étaient aussi anciennes que la Maison Blanche ellemême. On racontait que le spectre du grand Abraham y était apparu à Winston Churchill, comme à de nombreux autres occupants, notamment Eleanor Roosevelt, Amy Carter, l‘acteur Richard Dreyfuss – et des dizaines de valets et femmes de chambre. On rapportait aussi que le chien de Ronald Reagan restait des heures à aboyer devant la porte.

Ces pensées macabres rappelèrent à Rachel qu‘elle allait pénétrer dans un sanctuaire. Elle se sentit soudain gênée, debout sur le seuil, jambes nues, en T-shirt, comme une jeune étudiante pénétrant en catimini dans la chambre d‘un copain de palier.

— Est-ce bien orthodoxe ? demanda-t-elle à voix basse à son accompagnatrice. Il s‘agit tout de même de la chambre de Lincoln !

La jeune femme lui répondit avec un clin d‘œil :

— À cet étage, nous appliquons la politique du « ni vu ni connu ».

Merci, sourit Rachel.

Elle posa la main sur la poignée, frémissant d‘impatience.

— Rachel !

La voix nasillarde résonna dans le couloir comme une scie électrique.

Les deux femmes se retournèrent. Corky Marlinson arrivait en clopinant, appuyé sur deux béquilles. Sa jambe était emmaillotée dans un bandage impeccable.

— Moi non plus, je n‘arrive pas à dormir ! s‘écria-t-il.

Rachel baissa la tête, voyant s‘envoler son rendez-vous galant.

Corky déshabilla du regard la jolie fonctionnaire.

— J‘adore les femmes en uniforme.

Elle ouvrit son blazer, dévoilant une arme intimidante.

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Corky recula.

— Message reçu.

Puis, se tournant vers Rachel :

— Michael aussi est réveillé ? Vous allez le voir ? demanda-t-il, visiblement pressé de se joindre à la fête.

Rachel émit un grognement :

— C‘est-à-dire que...

L‘agent du Secret Service intervint, tirant de sa poche une feuille de papier.

— Professeur Marlinson, selon les termes de cette note que m‘a remise M. Tolland, j‘ai reçu l‘ordre de vous escorter jusqu‘à la cuisine pour que le chef vous prépare tout ce qu‘il vous plaira.