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Race de Caïn, sur les routes

Traîne ta famille aux abois.

II

Ah! race d’Abel, ta charogne

Engraissera le sol fumant!

Race de Caïn, ta besogne

N’est pas faite suffisamment;

Race d’Abel, voici ta honte:

Le fer est vaincu par l’épieu!

Race de Caïn, au ciel monte,

Et sur la terre jette Dieu!

CXX. – Les litanies de Satan

Ô toi, le plus savant et le plus beau des Anges,

Dieu trahi par le sort et privé de louanges,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Ô Prince de l’exil, à qui l’on a fait tort,

Et qui, vaincu, toujours te redresses plus fort,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi qui sait tout, grand roi des choses souterraines,

Guérisseur familier des angoisses humaines,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi qui, même aux lépreux, aux parias maudits,

Enseignes par l’amour le goût du Paradis,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Ô toi qui de la Mort, ta vieille et forte amante,

Engendras l’Espérance, – une folle charmante!

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi qui fais au proscrit ce regard calme et haut

Qui damne tout un peuple autour d’un échafaud.

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi qui sais en quels coins des terres envieuses

Le Dieu jaloux cacha les pierres précieuses

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi dont l’œil clair connaît les profonds arsenaux

Où dort enseveli le peuple des métaux,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi dont la large main cache les précipices

Au somnambule errant au bord des édifices,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi qui, magiquement, assouplis les vieux os

De l’ivrogne attardé foulé par les chevaux,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi qui, pour consoler l’homme frêle qui souffre,

Nous appris à mêler le salpêtre et le soufre,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi qui poses ta marque, ô complice subtil,

Sur le front du Crésus impitoyable et vil,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Toi qui mets dans les yeux et dans le cœur des filles

Le culte de la plaie et l’amour des guenilles,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Bâton des exilés, lampe des inventeurs,

Confesseur des pendus et des conspirateurs,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Père adoptif de ceux qu’en sa noire colère

Du paradis terrestre a chassés Dieu le Père,

Ô Satan, prends pitié de ma longue misère!

Prière

Gloire et louage à toi, Satan, dans les hauteurs

Du Ciel, où tu régnas, et dans les profondeurs

De l’Enfer, où, vaincu, tu rêves en silence!

Fais que mon âme un jour, sous l’Arbre de Science,