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Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles!

XVIII. – L’idéal

Ce ne seront jamais ces beautés de vignettes,

Produits avariés, nés d’un siècle vaurien,

Ces pieds à brodequins, ces doigts à castagnettes,

Qui sauront satisfaire un cœur comme le mien.

Je laisse à Gavarni, poète des chloroses,

Son troupeau gazouillant de beautés d’hôpital,

Car je ne puis trouver parmi ces pâles roses

Une fleur qui ressemble à mon rouge idéal.

Ce qu’il faut à ce cœur profond comme un abîme,

C’est vous, Lady Macbeth, âme puissante au crime,

Rêve d’Eschyle éclos au climat des autans,

Ou bien toi, grande Nuit, fille de Michel-Ange,

Qui tors paisiblement dans une pose étrange

Tes appas façonnés aux bouches des Titans.

XIX. – La géante

Du temps que la Nature en sa verve puissante

Concevait chaque jour des enfants monstrueux,

J’eusse aimé vivre auprès d’une jeune géante,

Comme aux pieds d’une reine chat voluptueux.

J’eusse aimé voir son corps fleurir avec son âme

Et grandir librement dans ses terribles jeux;

Deviner si son cœur couve une sombre flamme

Aux humides brouillards qui nagent dans ses yeux;

Parcourir à loisir ses magnifiques formes;

Ramper sur le versant de ses genoux énormes,

Et parfois en été, quand les soleils malsains,

Lasse, la font s’étendre à travers la campagne,

Dormir nonchalamment à l’ombre de ses seins,

Comme un hameau paisible au pied d’une montagne.

XX. – Le masque

Statue allégorique dans le goût de la renaissance

à Ernest Christophe, statuaire

Contemplons ce trésor de grâces florentines;

Dans l’ondulation de ce corps musculeux

L’Élégance et la Force abondent, sœurs divines.

Cette femme, morceau vraiment miraculeux,

Divinement robuste, adorablement mince,

Est faite pour trôner sur des lits somptueux,

Et charmer les loisirs d’un pontife ou d’un prince.

– Aussi, vois ce souris fin et voluptueux

Où la Fatuité promène son extase;

Ce long regard sournois, langoureux et moqueur;

Ce visage mignard, tout encadré de gaze,

Dont chaque trait nous dit avec un air vainqueur:

«La Volupté m’appelle et l’Amour me couronne!»

À cet être doué de tant de majesté

Vois quel charme excitant la gentillesse donne!

Approchons, et tournons autour de sa beauté.

Ô blasphème de l’art! ô surprise fatale!

La femme au corps divin, promettant le bonheur,

Par le haut se termine en monstre bicéphale!

Mais non! ce n’est qu’un masque, un décor suborneur,

Ce visage éclairé d’une exquise grimace,

Et, regarde, voici, crispée atrocement,