Préambule des articles justificatifs
Les quatre articles suivants, qui représentent la pensée de quatre esprits délicats et sévères, n’ont pas été composés en vue de servir de plaidoirie. Personne, non plus que moi, ne pouvait supposer qu’un livre empreint d’une spiritualité aussi ardente, aussi éclatante que les Fleurs du Mal, dût être l’objet d’une poursuite, ou plutôt l’occasion d’un malentendu.
Deux de ces morceaux ont été imprimés; les deux derniers n’ont pas pu paraître.
Je laisse maintenant parler pour moi MM. Édouard Thierry, Frédéric Dulamon, J. B. d’Aurevilly et Charles Asselineau.
C. B.
Note sous une phrase de Fr. Dulamon.
C’est ce que j’ai fait dans mon livre d’une manière lumineuse; plusieurs morceaux non incriminés réfutent les poèmes incriminés. Un livre de poésie doit être apprécié dans son ensemble et par sa conclusion.
C. B.
Note sous une phrase de Custine.
Ni moi, non plus. – Il est présumable que M. de Custine, qui ne me connaissait pas, mais qui était d’autant plus flatté de mon hommage qu’il se sentait injustement négligé, se sera renseigné auprès de quelque âme charitable, laquelle aura collé à mon nom cette grossière épithète.
Notes et documents pour mon avocat
Le livre doit être jugé dans son ensemble, et alors il en ressort une terrible moralité.
Donc je n’ai pas à me louer de cette singulière indulgence qui n’incrimine que 13 morceaux sur 100. Cette indulgence m’est très funeste.
C’est en pensant à ce parfait ensemble de mon livre que je disais à M. le Juge d’Instruction:
Mon unique tort a été de compter sur l’intelligence universelle, et de ne pas faire une préface où j’aurais posé mes principes littéraires et dégagé la question si importante de la Morale.
(Voir, à propos de la Morale dans les Œuvres d’Art, les remarquables lettres de M. Honoré de Balzac à M. Hippolyte Castille, dans le journal la Semaine.)
Le volume est, relativement à l’abaissement général des prix en librairie, d’un prix élevé. C’est déjà une garantie importante. Je ne m’adresse donc pas à la foule.
Il y a prescription pour deux des morceaux incriminés: Lesbos et Le Reniement de Saint Pierre, parus depuis longtemps et non poursuivis.
Mais je prétends, au cas même où on me contraindrait à me reconnaître quelques torts, qu’il y a une sorte de prescription générale. Je pourrais faire une bibliothèque de livres modernes non poursuivis, et qui ne respirent pas, comme le mien, L’horreur du mal. Depuis près de 30 ans, la littérature est d’une liberté qu’on veut brusquement punir en moi. Est-ce juste?
Il y a plusieurs morales. Il y a la morale positive et pratique à laquelle tout le monde doit obéir.