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— Elles fonctionnaient toutes deux avec de l’uranium... Mais de deux types différents !

— Montrez-moi ça ! lança Jabba en se ruant sur l’écran. Ça y est, des serviettes avec des serviettes ! Enfin !

— En quoi diffèrent-ils ? questionna Fontaine. Ce doit être quelque chose de basique.

Soshi parcourut les données.

— Attendez... Je regarde...

— Quarante-cinq secondes ! annonça une voix.

Susan releva la tête. Le dernier cercle était presque invisible à présent.

— J’ai trouvé ! s’écria Soshi.

— Lisez ! dit Jabba qui suait à grosses gouttes. La différence ? Vite !

— Là, affirma Soshi en pointant du doigt un paragraphe.

Regardez !

Tous se plongèrent dans la lecture :

... Les deux bombes utilisaient deux combustibles différents... ayant des propriétés chimiques identiques. Par des procédés classiques, on ne peut séparer les deux isotopes. Ils sont, à l’exception d’une très légère différence de poids, parfaitement similaires.

— Le poids ! lança Jabba avec excitation. C’est ça ! La seule différence, c’est leur poids ! Faisons la soustraction !

— C’est parti, répondit Soshi en parcourant le document. J’y suis presque... ça y est, j’ai les chiffres ! Tout le monde examina les nouvelles informations :

... différence de masse infime...

... séparation par diffusion gazeuse...

... respectivement 39,529891.10-23 g * et 39,030582.10-23 g *...

– 391 –

— Les voilà enfin ! s’écria Jabba. Ce sont bien des poids !

— Trente secondes !

— Allez, murmura Fontaine. Faites la soustraction. Vite !

Jabba saisit sa calculatrice et entra les chiffres.

— C’est quoi, ces astérisques ? demanda Susan. Vous les voyez, juste après chaque nombre !

Jabba ne l’écoutait pas. Il tapotait sur son clavier avec frénésie.

— Pas de faute de frappe, surtout ! le pressa Soshi. Il nous faut le chiffre exact.

— S’il y a des astérisques, continuait Susan, c’est qu’il doit y avoir un renvoi en bas de page...

Soshi cliqua sur la fin du texte. Susan lut la note. Elle blêmit.

— Oh... Mon Dieu...

— Quoi ? demanda Jabba.

Tous se penchèrent, et poussèrent un soupir de désespoir.

Le minuscule alinéa indiquait :

* valeurs indicatives. Les résultats diffèrent suivant les laboratoires.

127.

Une chape de plomb s’abattit sur le groupe. Ils étaient silencieux et recueillis, comme les premiers hommes à l’imminence d’une éclipse ou d’une éruption volcanique, prêts à subir une succession d’événements contre lesquels ils ne pouvaient rien. Le temps semblait s’étirer à l’infini.

— Le dernier rempart tombe ! cria un technicien. C’est la foire d’empoigne. On est assailli de partout !

– 392 –

Sur l’écran situé à l’extrême gauche du mur, David et les agents Smith et Coliander assistaient à la scène, dans un silence médusé. Sur la RV, le mur n’était plus qu’un cercle pâle, cerné par un essaim noir et grouillant, des centaines de pillards qui attendaient l’ouverture de la brèche. À la droite de cet écran, l’image de Tankado, ses derniers instants diffusés en boucle.

Son regard désespéré, sa main tendue, l’anneau qui étincelait au soleil...

La caméra zoomait, faisait le point... Susan voyait le regard du Japonais, ses yeux remplis de regrets. Il ne voulait pas que les choses aillent si loin. Il voulait nous sauver... Sans cesse, elle le voyait tendre ses doigts, agiter sa bague sous le nez des gens.

Il voulait parler, mais n’y parvenait pas. Tout ce qu’il pouvait faire, c’était tendre cette main.

À Séville, le cerveau de Becker était en ébullition.

— Comment s’appellent ces deux isotopes ? U238 et...

Il soupira. Cela ne mènerait à rien. Il était linguiste, et non physicien.

— Les assaillants se préparent à entrer !

— Nom de Dieu ! rugit Jabba, fou de frustration. Quelle est la différence entre ces deux uraniums ? Il n’y a pas une seule personne ici qui puisse répondre ?

L’assemblée restait muette. Tous les techniciens présents dans la salle observaient la RV, impuissants. Jabba se retourna vers l’écran de l’ordinateur et leva les bras au ciel.

— Pour une fois qu’on a besoin d’un scientifique, on n’en voit pas la queue d’un !

Susan scrutait l’enregistrement QuickTime. Les dés étaient jetés... La mort de Tankado, rejouée dans un ballet sans fin. Il voulait parler, mais les mots ne sortaient pas, il tendait sa main estropiée... comme s’il voulait dire quelque chose. Il espérait encore sauver la banque de données... et on ne saura jamais comment.

— Les loups sont aux portes !

— C’est la fin ! articula Jabba, l’œil rivé à l’écran, le visage ruisselant de sueur.

– 393 –

Sur le graphique, le dernier mur avait quasiment disparu.

La pelote de lignes noires agglutinées autour du noyau formait une masse opaque et fourmillante. Midge détourna la tête.

Fontaine se tenait raide comme une statue. Brinkerhoff était au bord de l’évanouissement.

— Dix secondes !

Susan ne quittait pas des yeux l’image de Tankado. Le désespoir. Le regret. Sa main tendue, encore et encore, l’anneau étincelant, les doigts déformés présentés à la face des touristes.

Il essaie de leur dire quelque chose... Mais quoi ?

Sur l’écran de gauche, David était abîmé dans ses pensées.

— La différence, murmurait-il pour lui-même. La différence entre l’U238 et l’U235. Ce devrait être pourtant évident...

Un technicien commença le compte à rebours :

— Cinq... Quatre... Trois...

Le décompte parvint en Espagne avec un dixième de seconde de décalage. Cinq... Quatre... Trois...

David eut l’impression de recevoir à nouveau une décharge de pistolet électrique. Le monde s’arrêta de tourner. Trois... 238

moins 235... Trois ! Lentement, il se pencha vers le micro...

Au même instant, Susan fixait du regard la main infirme de Tankado. Soudain, elle oublia la bague... Elle oublia l’anneau gravé pour ne voir que la chair meurtrie... Les doigts. Trois doigts. Ce n’était pas l’anneau qui importait, mais les doigts !

Tankado n’essayait pas de dire quelque chose, il montrait la solution. Il révélait son secret, le nombre premier, l’antidote ! Il suppliait les gens de comprendre... Il priait pour que son secret parvienne d’une manière ou d’une autre à la NSA.

— Trois, murmura Susan, abasourdie.

— Trois, souffla Becker depuis l’Espagne.

Mais dans le chaos, personne ne réagit.

— Ils entrent ! cria un technicien.

La RV se mit à clignoter tandis que le noyau était submergé.

Des sirènes se mirent à hurler.

— Les données sortent !

— Ça télécharge de partout !

Susan se mouvait comme dans un rêve. Elle se tourna vers le clavier de Jabba. Dans son mouvement, son regard croisa

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celui de son fiancé, David Becker. Sa voix résonna une nouvelle fois dans les haut-parleurs.

— Trois ! La différence entre 238 et 235 !

Tout le monde leva les yeux.