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— Et pour mon projet avec Forteresse Digitale ? s’enquit-il d’une voix dure comme le roc.

Hale ricana.

— Faites-la, votre porte secrète. Je ne dirai rien à personne.

Puis son ton se fit menaçant :

— Mais si jamais vous me cherchez des noises, je dévoile tout à la presse. Je leur dis que Forteresse Digitale est piégée, et je fais couler cette putain d’agence !

Strathmore étudia la proposition de Hale. Elle était simple et honnête. Susan en vie, Forteresse Digitale munie d’une porte secrète. Tant que Strathmore ne poursuivait pas Hale, il ne ferait aucune révélation. Le commandant doutait que Hale puisse tenir sa langue bien longtemps. Quoique... Forteresse Digitale était sa seule garantie... Ça pourrait marcher. Au pire, Hale pourrait être supprimé plus tard si nécessaire.

— Décidez-vous, mon vieux ! C’est d’accord ou pas ?

– 268 –

Hale resserrait encore son bras sur Susan comme un étau.

Strathmore pouvait aussi décrocher son téléphone pour appeler la sécurité... Hale ne tuerait pas Susan, quoi qu’il en dise... Strathmore était prêt à parier sur sa propre vie. Hale serait totalement pris de court. Il paniquerait. Une fois face aux gardes, il n’aurait jamais le cran de passer à l’acte. Et finalement, après quelques pourparlers, il se rendrait. Mais si je fais ça, songea Strathmore, je peux dire adieu à mon projet.

Hale appuya encore plus fort sur la glotte de Susan, qui laissa échapper un cri de douleur.

— Alors ? Je la tue ?

Strathmore pesait le pour et le contre. En laissant Hale quitter la Crypto avec Susan, il n’avait aucune garantie. Hale pouvait rouler un certain temps, se garer en pleine forêt. Il serait alors armé... L’estomac de Strathmore se retourna. Ils seraient tous à sa merci jusqu’à ce que Hale libère Susan... Si tant est qu’il tienne parole. Je dois appeler la sécurité, décida-t-il, il n’y a pas d’autre solution. Il imagina Hale au tribunal, vidant son sac à propos de Forteresse Digitale.

Tout sera perdu ! Il y a forcément un meilleur moyen...

— Décidez-vous ! cria Hale, traînant Susan vers l’escalier.

Mais Strathmore ne l’écoutait pas. S’il fallait, pour sauver Susan, abandonner son projet, qu’il en soit ainsi. La perdre serait pire que tout. Strathmore n’était pas prêt à la sacrifier.

Hale tordait le bras de Susan derrière son dos et commençait à comprimer les cervicales.

— C’est votre dernière chance, mon vieux ! Passez-moi le flingue !

Le cerveau de Strathmore était en ébullition, à la recherche d’une option de rechange. Il existe toujours une autre solution !

Finalement, il se décida à parler, tout doucement, avec une pointe de tristesse.

— Non, Greg. Je suis désolé. Je ne peux pas vous laisser partir.

Hale eut un hoquet de stupeur.

— Quoi ?

— J’appelle la sécurité.

Susan tressaillit.

– 269 –

— Trevor ! Non !

Hale augmenta la pression sur le cou de la jeune femme.

— Ne me tentez pas !

Strathmore sortit son portable de sa poche et ouvrit le capot.

— Greg, je sais que vous bluffez.

— Vous ne pouvez pas faire ça ! cria Hale. Je dirai tout ! Je ruinerai votre projet ! Vous êtes à deux doigts de réaliser votre rêve ! Contrôler tous les échanges du monde ! Plus besoin de TRANSLTR, plus de limites. Toutes les informations accessibles. C’est une chance qui ne se présente qu’une fois dans une vie ! Vous ne pouvez pas la laisser s’échapper !

La voix de Strathmore était tranchante comme du métal.

— Ah oui ? Regardez-moi bien.

— Mais... Mais... Et Susan ? Si vous faites ça, je vais la tuer !

Strathmore resta de marbre.

— Je suis prêt à prendre ce risque.

— Foutaises. Vous tenez plus à elle qu’à Forteresse Digitale !

Elle vous fait trop bander pour que vous risquiez sa peau, je vous connais ! (Il se tourna vers la jeune femme.) C’est vrai Susan, il est dingue de toi !

Susan s’apprêtait à se révolter contre cette assertion, mais le commandant fut plus prompt qu’elle.

— Jeune homme ! Vous ne me connaissez pas ! Toute ma vie, j’ai pris des risques. Vous voulez mettre la barre plus haut, très bien, allons-y !

Il commença à composer un numéro sur le clavier de son téléphone.

— Vous m’avez grandement sous-estimé, mon p’tit gars.

Personne ne peut menacer la vie de mes employés et s’en sortir indemne !

Il porta l’appareil à son oreille et aboya :

— Standardiste ! Passez-moi la sécurité !

Hale tordit encore le cou de Susan.

— Je... Je vais la tuer. Je jure que je vais le faire !

— Non, vous ne le ferez pas, affirma Strathmore. Tuer Susan ne ferait qu’aggraver la... (Il s’interrompit et approcha le téléphone de sa bouche.) Allô ? La sécurité ? Ici le commandant

– 270 –

Strathmore. Nous avons affaire à une prise d’otage dans la Crypto ! Envoyez-nous des hommes ! Oui, tout de suite, nom de Dieu ! Nous avons aussi une panne de courant. Balancez-nous tout le jus que vous trouverez. Je veux que tout remarche dans cinq minutes ! L’employé Greg Hale a tué un technicien de la Sys-Sec. Il retient la cryptologue en chef prisonnière. Je vous autorise à utiliser les gaz lacrymogènes sur nous tous, s’il le faut.

Et si M. Hale refuse d’obtempérer, que vos snipers le descendent. J’en assumerai l’entière responsabilité. Dépêchez-vous !

Hale était pétrifié. Il n’en croyait pas ses oreilles. Son étreinte s’était un peu relâchée.

Strathmore fit claquer le rabat de son téléphone et le raccrocha à sa ceinture.

— À vous de jouer, Greg.

81.

Dans le hall de l’aéroport, Becker se tenait à côté de la cabine téléphonique, la vision encore trouble. Malgré son visage qui le brûlait et un reste de nausée, il était sur un petit nuage.

Tout était fini. Vraiment fini. Il allait pouvoir rentrer chez lui. A son doigt : la bague – son Graal du jour ! Il leva la main à la lumière, et observa l’anneau d’or. Sa vue était trop brouillée... il ne parvenait pas à lire l’inscription, mais cela ne semblait pas être de l’anglais. Le premier symbole pouvait être un Q, un O ou un zéro. Becker examina les caractères suivants. C’était absolument incompréhensible. Un vrai charabia... Cela ressemblait donc à ça, un secret d’État ?

Becker se dirigea vers la cabine téléphonique pour appeler Strathmore. Sitôt qu’il eut fini de composer le préfixe international, une voix de synthèse lui répondit :

– 271 –

Todas las líneas están ocupadas. Veuillez renouveler votre appel ultérieurement.

Dans un marmonnement d’irritation, Becker raccrocha. Il avait oublié ce détail : obtenir l’international depuis l’Espagne était une loterie. Tout était une question de hasard et de persévérance. Il retenterait sa chance dans quelques minutes.

Il faisait de son mieux pour oublier les tisons ardents dans ses yeux. Megan l’avait prévenu : s’il se frottait, la douleur empirerait, à un point inimaginable. Impatient, il composa à nouveau le numéro. Toujours pas de ligne ! Becker ne pouvait attendre plus longtemps. Ses yeux étaient en feu, il devait les rincer à l’eau. Strathmore patienterait encore une ou deux minutes. A moitié aveugle, Becker se dirigea vers les toilettes.