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— Nos systèmes auraient tôt fait de le repérer, dit Geary en évitant de se montrer tranchant. Ce ne sont pas des Syndics. »

Une fenêtre virtuelle s’ouvrit devant lui, révélant le lieutenant Iger. « Rien ne correspond à ces bâtiments dans les banques de données du service du renseignement, amiral.

— Sont-ils au moins humains ?

— Absolument, amiral. Même si nous ne pouvons pas les identifier, certaines caractéristiques de leur facture trahissent leur origine. Sol, précisa Iger d’une voix contrite.

— Sol ? » Geary fit de son mieux pour ne pas avoir l’air de s’irriter contre le lieutenant. « Tout ce qui est humain provient de Sol. Seriez-vous en train de me dire que ces vaisseaux appartiennent à Sol ?

— Non, amiral. Mais ils sont d’origine humaine. »

Geary jeta un coup d’œil sur les six vaisseaux des Danseurs qui entouraient le sien. L’information d’Iger n’était pas aussi inutile qu’il y paraissait au premier abord. « C’est l’identification la plus précise que vous pouvez me fournir ? Le Système solaire pour origine commune ?

— Si nous interprétons correctement les caractéristiques que nous captons, la facture de ces vaisseaux et celle de ceux qui nous sont familiers ont divergé à Sol, s’expliqua Iger.

— Il n’y a rien d’inhabituel dans les retransmissions de ce système stellaire relatives aux avis aux vaisseaux entrants, rapporta le lieutenant Yuon. À propos de la démilitarisation de Sol, ils emploient les mêmes termes que dans nos propres procédures d’entrée.

— Et pourtant ils sont là. » Desjani fit la grimace. « Six d’entre eux sont relativement gros mais plus petits que nous. Ni croiseurs lourds ni cuirassés. Ils ressemblent un peu à ces cuirassés de reconnaissance que l’Alliance a armés un certain temps.

— Ceux anéantis lors des combats ? s’enquit Geary, tout en connaissant déjà la réponse.

— Ouais. Ceux-là mêmes. » Tanya tapa une brève instruction. « Quels qu’ils soient, ils sont un peu plus petits que ces cuirassés de reconnaissance. Difficile de préciser leur type de blindage.

— Il faudra les observer à la manœuvre, intervint Iger. Nous disposerons alors d’assez de données pour calculer leur masse. Toute masse supérieure à celle qu’on pourrait raisonnablement attribuer à un vaisseau de cette taille devrait correspondre à sa cuirasse.

— Et pour les plus petits ? » demanda Geary. Son écran se remplissait à toute allure de données sur les six escorteurs, dont la silhouette de barracuda rappelait celle des destroyers de l’Alliance et des avisos syndics en un peu plus petit. « Leur masse est encore inférieure à celle des avisos syndics.

— Des corvettes ? suggéra Desjani. Non. Ils sont encore plus petits que les “Nickels” syndics.

— À qui appartiennent-ils ? interrogea la sénatrice Suva. Vous devriez le savoir. Comment pouvez-vous l’ignorer ? »

Geary soupira et se massa le front d’une main. « L’Alliance ne dispose actuellement d’aucune information sur l’origine de ces vaisseaux, quelle que soit leur provenance, sénatrice.

— Quelle peut-elle bien être ?

— Je crois le savoir. » Le sénateur Sakaï avait réussi à retenir leur attention à tous. « J’ai beaucoup étudié l’histoire, reprit-il. Y compris l’époque où l’humanité faisait ses premiers pas hors du Système solaire. Les vaisseaux en partaient dans toutes les directions, mais ils empruntaient deux routes principales. La première s’enfonçait à l’intérieur du bras de la Galaxie que nous occupons actuellement. Ce qui, dans cette direction, s’est d’abord traduit par des colonies proches de Sol, puis par l’Alliance et ces autres coalitions de systèmes que sont la République de Callas et la Fédération du Rift, et ensuite, au-delà, par les Mondes syndiqués. L’autre voie longeait le même bras de la Galaxie, mais vers l’extérieur. Certaines des premières colonies humaines y ont vu le jour. Ces vaisseaux proviennent peut-être d’étoiles diamétralement opposées à notre propre expansion. »

Geary entra la même recherche que tout le monde et vit apparaître une image de la Galaxie près de son écran : l’espace colonisé par les hommes s’y inscrivait en surbrillance. Cette vue lui donna à réfléchir. Nous qui croyons avoir fait tant de chemin ! Bon, peut-être pour des hommes. Des centaines d’années-lumière, sans doute. Des distances inimaginables. Mais examinons mieux la région de la Galaxie que nous avons explorée et colonisée ; ce n’est qu’une infime partie d’un unique bras de la Voie lactée, laquelle n’est qu’une galaxie parmi d’innombrables autres. Je suis habitué à l’immensité de l’espace, mais, même à moi, il est interdit d’appréhender celle de l’univers.

Rione reprit la première la parole. « Je ne m’étais pas rendu compte jusque-là de la forme asymétrique qu’avait prise l’expansion humaine. En termes de systèmes stellaires et de distances parcourues, le plus clair s’est fait vers l’intérieur et le moyeu de la Galaxie. Nous avons donc essaimé vers le bas et le centre. Je m’en étais toujours plus ou moins doutée. Mais les données m’affirment pourtant que nous avons commencé par aller vers l’extérieur.

— Quelque chose a dû arrêter notre progression, avança Costa d’une voix cauteleuse. Peut-être une autre menace comme celle des Énigmas qui, elle, bloque notre expansion vers l’intérieur ?

— Comment un tel secret aurait-il pu rester préservé si longtemps et si près de la Vieille Terre ? demanda Rione. Les Syndics nous ont caché pendant un siècle l’existence des Énigmas, mais cela parce que leurs quelques contacts avec eux se sont produits dans des régions de l’espace très éloignées de notre territoire, en même temps que la guerre limitait les communications de façon drastique.

— Et aussi parce qu’après avoir fait chou blanc sur tant de planètes et dans tant de systèmes nous avions cessé de chercher d’autres espèces intelligentes, ajouta Charban. Dans les premiers temps de l’expansion humaine, nous nous attendions à faire ces rencontres d’un jour à l’autre. »

Le regard de Geary était rivé sur les images de plus en plus précises des vaisseaux inconnus que les senseurs de l’Indomptable affichaient sur son écran. « Ils ont l’air humains. Les vaisseaux, je veux dire. Nous avons acquis une certaine expérience de l’architecture de vaisseaux extraterrestres. Je ne vois rien en ceux-là qui ressemble aux divergences qu’accusent les bâtiments des Bofs, des Énigmas ou des Danseurs avec les nôtres.

— Que dois-je faire ? demanda Desjani.

— Gagner la Vieille Terre, ordonna Geary. Transmettez le message d’arrivée standard aux autorités de Sol. Poursuivons notre mission jusqu’à ce que quelque chose ou quelqu’un s’y oppose. »

Un sénateur avait-il envie de mettre son grain de sel ? En tout cas, nul ne s’y risqua, sans doute parce qu’ils n’entrevoyaient aucune ligne d’action plus fructueuse pour l’heure.

« Ces vaisseaux ont peut-être été construits par des hommes, mais regardez toute la ferraille dont ils se hérissent, fit remarquer Desjani après avoir légèrement ajusté le cap de l’Indomptable. Ils ont l’air de sortir d’un film de science-fiction. Comment appelleriez-vous ces machins ?

— Garnitures et fanfreluches, commandant, répondit le lieutenant Castries. Vous avez raison. Ces vaisseaux évoquent les illustrations d’un livre d’heroic fantasy spatiale, avec rois, princesses et magiciens. Ils croulent sous la déco. Nos systèmes cherchent à comprendre la destination de tous ces appendices, mais je ne crois pas qu’ils aient d’autre but que l’enjolivure.

— Est-ce pour la même raison que leurs ailerons sont si grands ? demanda le lieutenant Yuon. Ils sont bien plus hauts que ne l’exigerait l’hébergement de senseurs ou de générateurs de boucliers. »