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— Bien sûr que non. Ce sont des Syndics. Le général Carabali vous a-t-elle appris que certains signes semblent indiquer qu’ils ont subi un conditionnement mental ?

— Oui. Nos échanges ne m’ont pas permis de l’affirmer. En pareil cas, il est pratiquement impossible de distinguer entre un individu à qui on a implanté un blocage mental et une personne assez persuadée d’avoir raison pour refuser de revenir sur ses positions », ajouta-t-elle.

Geary se passa la main dans les cheveux tout en réfléchissant aux options qui s’offraient à lui. « Selon vous, détiennent-ils vraiment un engin nucléaire et, en ce cas, sont-ils prêts à le faire exploser ?

— Bonnes questions. Auxquelles je n’ai pas de réponses toutes prêtes. »

Quoi d’autre ? « Avez-vous eu l’impression qu’ils s’attendaient à des renforts ? Savent-ils que nous avons détruit toutes leurs navettes ?

— Ils savent ce qu’on leur en a dit, amiral. M’étonnerait qu’ils nous croient. »

Geary opina. Il se sentait éreinté. « Continuez de parlementer. S’il vous plaît.

— D’accord, puisque c’est si gentiment demandé. » La bouche de Rione se plissa en une moue dédaigneuse. « Je vais poursuivre les pourparlers jusqu’à ce que les fusiliers les liquident. Peut-être cela suffira-t-il à les distraire et à faciliter ainsi la tâche à nos gens. Avez-vous déjà conversé avec quelqu’un au moment de sa mort ?

— Non.

— Moi non plus. J’ai l’impression que je ne vais pas tarder à savoir l’effet que ça fait. »

Geary ferma les yeux en grimaçant à la fin de la communication. Il ne se redressa qu’au bout d’un long moment et se concentra de nouveau sur le plan de l’Invulnérable et la situation des fusiliers.

À bord du supercuirassé, ceux-ci avaient resserré et refermé le cordon sanitaire sphérique entourant la zone où, selon le major Dietz, devaient se terrer les Syndics ; ils avaient hermétiquement scellé, de toutes parts, les coursives et compartiments adjacents à ceux tenus par l’ennemi. Sur le plan que visionnait Geary, cinq compartiments étaient ainsi désignés. « Avons-nous la certitude qu’ils s’y trouvent ? demanda-t-il au major Dietz.

— Oui, amiral. Nous avons procédé à quelques opérations de reconnaissance, mais, avec leurs combinaisons furtives, on a du mal à se rendre compte avec précision. On évalue grosso modo leur nombre à une vingtaine, amiral.

— Bien joué, major. S’agissant de leur localisation. Savons-nous s’ils détiennent vraiment un troisième engin nucléaire ? »

Le compliment fit légèrement rougir le major ; il hésita un instant puis : « Nous avons envoyé des nanosenseurs, à peu près tout ce que nous avons réussi à faire passer entre les mailles du filet des contre-mesures posées par les Syndics sur les accès menant à leurs compartiments. Ils ne détectent aucune radiation suspecte signalant la présence d’un engin nucléaire, mais les capacités des nanosenseurs sont limitées par des problèmes de taille et d’énergie, et, si jamais les Syndics ont protégé leur engin avec un blindage supplémentaire, on aurait du mal à le repérer même avec un matériel plus sophistiqué.

— Comment pourrions-nous en avoir la certitude ?

— La certitude absolue ? En investissant ces compartiments et en les fouillant, amiral. »

L’amiral Lagemann étudiait lui aussi le plan de l’Invulnérable. « Il m’est venu une idée, déclara-t-il. Nous disposons d’une image assez précise de la disposition des lieux puisqu’elle se fonde sur nos patrouilles et les inspections du vaisseau par les drones chargés de dresser ses plans. Regardez un peu. »

Sur le plan, des points commençaient d’apparaître. « Chacun signale une présence syndic, expliqua Lagemann. En étudiant le déroulement dans le temps de cette détection, ces points nous montrent vers où les Syndics se dirigent depuis le tout début.

— Sur quoi se fondent ces détections ? demanda Geary.

— Mystification par les senseurs de Lamarr et indications fragmentaires détectées par d’autres senseurs. Pas une image parfaite, mais la meilleure à laquelle nous pouvions nous attendre en ayant affaire à des adversaires en combinaison furtive dans un environnement tel que celui de l’Invulnérable. Regardez les chemins qu’ont suivis les Syndics. Ils ont convergé simultanément sur les deux leurres, le poste de contrôle de l’ingénierie et la passerelle factices, en empruntant divers itinéraires qui, dans certains cas, montrent assurément que, ignorant la disposition des lieux, ils ont rebroussé chemin. Mais, même ainsi largement déployés, tout ce que nous avons détecté indique qu’ils piquaient vers ces deux compartiments. Après les avoir investis, ils se sont à nouveau dispersés pour progresser le long de cet axe. »

Le major Dietz hocha la tête. « Peu ou prou vers les secteurs que nous occupons actuellement et où nous opérons. Les émissions des mulets ont contribué en partie à leur masquer notre présence. Ils n’ont dû détecter quelques infimes indications sur notre position que quand les mulets persans ont cessé d’émettre.

— L’important étant qu’ils ne se sont dirigés que vers ces deux compartiments distincts au lieu d’envoyer un troisième groupe tenter de s’emparer de celui du contrôle de l’armement auquel ils auraient dû s’attendre.

— Ce qui arguerait en faveur de deux seuls engins nucléaires, conclut le général Carabali. Le raisonnement me paraît logique, mais pouvons-nous jouer notre chemise là-dessus ? »

Lagemann eut un sourire torve. « Si nous nous trompons et qu’ils disposent bel et bien d’un troisième engin, j’achète la chemise.

— Nous ne serions pas dans cette situation s’ils n’avaient pas tenté de nous la faucher, cette chemise, fit remarquer Dietz.

— Avez-vous bientôt fini ? demanda Geary, agacé.

— Pardon, lâcha Lagemann. Ces blagues n’ouvraient pas franchement de nouveaux horizons. Navré, encore une fois. Mais il me semble qu’on peut bien me pardonner une certaine légèreté, qui me permet d’oublier un instant les conséquences qu’aurait pour mon équipage et moi l’ordre d’un assaut des fusiliers donné à mon instigation. »

Geary détacha son regard du plan de l’Invulnérable. « Quelqu’un est-il d’avis que le temps joue en notre faveur ? »

Seule Carabali répondit, et par la négative. « Non, amiral. S’ils sont prêts à mourir pour mener leur mission à bien et s’ils disposent d’un engin nucléaire, il nous faut les frapper le plus tôt possible, avant que la nature même de l’Invulnérable ne leur fasse assez perdre les pédales pour qu’ils l’activent.

— Ils doivent assurément sentir la présence des fantômes dans les compartiments qu’ils occupent, convint le major Dietz. Dans la mesure où nous avons coupé l’alimentation de la majorité du matériel et des supports vitaux qui s’y trouvent, ils ont dû s’y engouffrer en masse derrière nous. La proximité de nombreux camarades est sans doute rassurante, mais elle ne suffit pas à supprimer la sensation d’effroi.

— Réalimentez votre équipement et réactivez aussi les supports vitaux, ordonna Carabali. Si certains de ces Syndics ont échappé aux rafles des fusiliers et n’ont pas été rendus cinglés par les fantômes, ils pourraient se diriger vers vous dès que vos émissions se feront plus puissantes. Vous aurez ainsi une chance de les éliminer. Amiral, j’aimerais pénétrer, dès qu’on sera prêts, dans les cinq compartiments où ils se sont barricadés. »