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Quelque chose accrocha son regard. Il le reporta vivement sur l’écran, où des explosions venaient de se produire sur l’image du site du système de détente transmise par le drone.

« Nos gens sont entrés et tiennent à présent le portail, annonça le général Carabali, dont le visage venait d’apparaître. L’incertitude règne encore quant à la situation à l’intérieur. J’ignore si nous avons pris le contrôle du système de détente. Demandez au plus grand nombre d’unités disponibles chargées du soutien aux commandos de s’en rapprocher autant que possible.

— Capitaine Armus, vous avez la permission de viser toutes les cibles qui se présentent et de déclencher un tir de couverture. Ne touchez surtout pas le bâtiment hébergeant le système de détente. Le général Carabali se branche sur votre canal de commandement.

— Compris », répondit Armus aussi laconiquement que si Geary avait ordonné à la flotte de se reposer pour la nuit. « J’ouvre le feu. »

L’image transmise par le drone vacilla, des dizaines de faisceaux de particules émis par les lances de l’enfer frappant en même temps du haut du ciel et touchant leur cible avec une précision chirurgicale. Bunkers et véhicules blindés frémirent, criblés d’énormes trous.

Des alarmes se mirent à clignoter dans toute la flotte : les systèmes de quelques dizaines de vaisseaux souffraient de pannes ou de dysfonctionnements partiels. Moins sans doute qu’à Honneur, et sans jamais mettre un bâtiment hors de combat, mais de manière préoccupante malgré tout. Ironie aisément compréhensible, nombre de ces vaisseaux frappés par des défaillances de leurs systèmes avaient été épargnés lors des batailles précédentes. Aucun dommage majeur ne leur ayant été infligé, on n’avait pas eu besoin de réparer ou de remplacer leurs composants, si bien qu’ils avaient conservé leurs systèmes obsolescents, dont l’usure se manifestait à présent.

Geary reporta brusquement son attention sur la scène retransmise par le drone d’Iger. La vue était pour l’instant complètement obscurcie par un petit bombardement de projectiles cinétiques lancés par les cuirassés qui fondaient vers la surface. Simples blocs fusiformes de métal coulé, ces « cailloux » tenaient leur puissance de destruction de l’énergie cinétique qu’ils accumulaient durant leur chute depuis l’orbite.

Geary bascula sur une vue en surplomb du site transmise par un cuirassé d’Armus. Poussière et débris saturaient à présent l’atmosphère autour du bâtiment du système de détente, mais les senseurs à large spectre perçaient au moins partiellement cette dense grisaille pour distinguer les objets en mouvement. D’autres lances de l’enfer frappaient leurs cibles, hommes ou véhicules qui pilaient en crissant à la lisière de la zone bombardée. Des cailloux continuaient de s’abattre des cuirassés, visant non seulement les Syndics qui cherchaient à atteindre le site de la détente, mais forçant également tous ceux qui s’en trouvaient trop près à rentrer la tête dans les épaules. Moellons et décombres provenant de bâtiments voisins effondrés rebondissaient tout autour, créant de fausses cibles mouvantes captées par les senseurs de la flotte et sur lesquelles pleuvaient de nouveaux cailloux.

L’immeuble du système de détente lui-même restait intact, à l’exception, sous sa façade anodine, de quelques éraflures à son lourd blindage, causées par les impacts de shrapnels consécutifs au bombardement des édifices adjacents.

Geary arracha son regard à cette scène pour vérifier à nouveau la position des vaisseaux syndics. Dans quel délai leur donnerait-on l’ordre d’intervenir ? Les dirigeants syndics, certainement sidérés, désarçonnés par la faillite de leur plan qui avait paru se dérouler à la perfection jusqu’à ce que l’Alliance change brutalement la donne, devaient encore essayer de comprendre ce qui leur arrivait.

La flotte était à présent très éloignée de la région du camp de prisonniers, mais les navettes redescendaient aussi vite qu’elles le pouvaient sans éclater, et trois mille prisonniers de guerre attendaient encore leur sauvetage.

Si les Syndics contrôlaient encore le système de détente, une apocalypse pouvait se déclencher à tout moment au beau milieu du camp, balayant navettes, fusiliers et prisonniers.

Des alarmes retentirent : les quatre groupes de vaisseaux syndics s’ébranlaient enfin, se retournaient et accéléraient au maximum de leur capacité. Deux fondaient sur les cuirassés d’Armus et deux autres piquaient sur la flotte ou sur les navettes qui remonteraient bientôt de la surface pour la rejoindre.

« C’est loupé, lâcha Desjani avec un rictus féroce. Ils se sont divisés et, maintenant, leur seul moyen de marquer le coup est de se mettre à notre portée.

— C’est exact, convint Geary. Établissez une trajectoire d’interception du groupe Charlie. Je vais ordonner à Duellos de vous appuyer puis envoyer Tulev et Badaya aux trousses de Delta. »

Si la machine infernale des Syndics voulait bien ne pas se déclencher, Geary aurait gagné, durement frappé l’ennemi et complètement déjoué ses plans…

« Je reçois des transmissions du groupe de reconnaissance à la surface, annonça le général Carabali. Il demande à être exfiltré.

— Et le système de détente ?

— Le capitaine Hopper affirme qu’il est Hôtel Sierra. Dans notre jargon, amiral, ça veut dire…

— Je sais ce que ça veut dire. Le système de détente est HS. Ça se disait déjà avant ma naissance. Capitaine Geary ! Les fusiliers ont besoin d’être pris en stop.

— J’arrive », répondit-elle.

Nouvelles alertes sur l’écran de Geary. Les forces terrestres de la planète avaient lancé des aéronefs de combat, de vieux modèles aisément repérables depuis une orbite basse. Le Gardien les élimina en une succession de tirs de ses lances de l’enfer, pratiquement en frôlant la stratosphère, puis lança quatre navettes qui descendirent en spirale, protégées par un tir de barrage de leur vaisseau mère et des autres cuirassés.

Le groupe syndic Alpha, qui fondait déjà sur le site du système de détente, altéra légèrement sa trajectoire jusqu’à sillonner à son tour l’atmosphère vers les navettes du Gardian, le ventre de ses vaisseaux chauffé au rouge par la friction qui fatiguait leurs boucliers.

Plus haut, le groupe Bravo tenta une passe de tir désespérée sur le groupe des cuirassés d’Armus. Jane Geary imprima une inflexion au vecteur du Conquérant, du Fiable, du Vengeance et du Revanche, pour prendre Bravo en étau s’il insistait.

La principale vague de navettes atterrit de nouveau sur le site du camp de prisonniers.

Les groupes syndics Charlie et Delta contournaient de très loin la formation de l’Alliance, manifestement pour piquer sur les navettes dès que, chargées de leurs prisonniers libérés, elles remonteraient vers la flotte.

« Allez-y, Tanya », lâcha Geary avant de transmettre un ordre identique à Duellos, Tulev et Badaya, puis : « À toutes les unités de la première flotte, guidez-vous maintenant sur l’Invulnérable. Exécution immédiate. Amiral Lagemann, prenez toutes les mesures nécessaires pour couvrir le retour des navettes. » Ces mesures ne seraient sans doute pas indispensables, mais, si Lagemann devait ordonner à d’autres vaisseaux de se détacher de la formation, il disposerait de plus de deux cents croiseurs lourds, croiseurs légers et destroyers pour s’amuser.

Desjani glatit : elle venait d’envoyer l’Indomptable, le Risque-tout, le Victorieux et l’Intempérant sur un vecteur d’interception incliné qui grimpait vers le groupe Charlie. Derrière son bâtiment, les autres croiseurs de combat de l’Alliance s’arrachèrent à la flotte.