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— Le Conseil des Quatre connaît tous nos souhaits, répondit Faï Rodis, nous n’avons rien à ajouter à ce que nous avons demandé par TVP.

— Et vos intentions ? interrogea brièvement Ghen Shi.

— Étudier le plus rapidement possible la planète Ian-Iah et son peuple.

— Comment pensez-vous procéder ? Vous rendez-vous compte qu’étudier une planète aussi vaste en un délai aussi bref est au-dessus de vos forces ?

— Tout dépendra des deux facteurs suivants, répondit Rodis tranquillement : la coopération de vos réceptacles du Savoir, des machines à mémoires, des académies et bibliothèques et la rapidité de vos moyens de locomotion sur la planète. Il est absurde de penser que nous pourrons apprendre tout ce que vos savants ont amassé pendant des millénaires. Mais nous pourrons saisir l’essentiel et approfondir la vie du peuple de Ian-Iah à travers l’histoire, la littérature et l’art. Une grande partie pourra être enregistrée par la machine à mémoire de l’astronef. Nous aimerions ramener sur Terre le maximum d’informations.

Zet Oug, le récent adversaire de Rodis à la télévision, posa une question rapide :

— Avez-vous réellement une liaison directe avec l’astronef ?

— Bien sûr. Et nous avons l’intention de vous montrer de nombreux enregistrements des machines à mémoire de l’astronef. Malheureusement, nos SVP ne peuvent déployer de projecteur sur grand écran. Chaque robot est programmé pour un auditoire de moins de mille personnes. Les sept SVP montreront simultanément les films à sept mille spectateurs.

Ghen Shi émit un sifflement qui cachait mal son inquiétude.

— Je pense que ce ne sera pas nécessaire !

— Pourquoi ?

— Le peuple de Ian-Iah n’est pas préparé à de tels spectacles.

— Je ne comprends pas, dit Rodis en souriant avec une gêne à peine perceptible.

— Cela n’a rien d’étonnant, dit soudain Tchoïo Tchagass qui était resté silencieux jusque-là, et, au son de sa voix tranchante, autoritaire et impatiente, les autres membres du Conseil sursautèrent et se tournèrent vers leur souverain, il y a beaucoup de choses que vous ne comprendrez pas ici. Et ce que vous nous montrerez peut être faussement interprété. Voilà pourquoi mon ami Ghen Shi redoute la projection de vos films.

— Mais la connaissance peut résoudre n’importe quelle perplexité et c’est pourquoi, il est d’autant plus important de montrer le plus possible de films, rétorqua Rodis.

Tchoïo Tchagass leva une main paresseuse vers les Terriens.

— Nous n’allons pas préjuger déjà de ce qui se passera au niveau de la compréhension. Je vais donner l’ordre aux instituts, aux bibliothèques et aux conservateurs d’art de vous préparer des notes et des films. Les machines à mémoire dont vous parlez n’existent pas chez nous, mais l’information codifiée dans ses moindres détails existe sous deux formes : la parole et l’image. Vous recevrez tout cela ici même, sans avoir à quitter les Jardins de Tsoam. Quant à la vitesse de locomotion de nos avions à gaz… Tchoïo Tchagass prononça lentement : elle est d’environ 1 000 km par heure terrestre et vous permettra d’atteindre rapidement n’importe quel point de notre planète.

Ce fut au tour des Terriens d’échanger des regards étonnés : le souverain de Tormans connaissait les mesures terriennes.

— Toutefois – poursuivit Tchoïo Tchagass – vous devrez indiquer à l’avance les lieux que vous voudrez visiter. Nos avions ne peuvent atterrir partout et toutes les régions de Ian-Iah ne sont pas sûres.

— Peut-être – proposa Rodis – pourrions-nous nous familiariser d’abord avec la planétographie générale de Ian-Iah ? Nous fixerons ensuite le plan de visites.

— C’est juste, acquiesça Tchoïo Tchagass en se levant, et, avec une affabilité soudaine, il dit : « Et, maintenant, veuillez aller dans les chambres du palais qui ont été préparées pour vous ».

Il ouvrit la marche, avançant sans bruit sur le tapis épais et franchit l’entrée latérale menant à un couloir dont les murs en métal mat scintillaient.

— Ce masque va-t-il toujours dissimuler votre visage ?

Il effleura à peine le petit bouclier transparent de Faï Rodis.

— Pas toujours – dit-elle en souriant – dès que je ne présenterai plus de dangers pour vous…

— Et qu’il en sera de même pour nous, dit le souverain en hochant la tête, en signe de compréhension. C’est la raison pour laquelle je ne vous convie pas à partager notre repas. Voilà, c’est ici. Il montra de la main une vaste salle aux grandes fenêtres dont le bas des vitres était camouflé. Vous pouvez vous considérer en parfaite sécurité. À demain !

Faï Rodis s’inclina en signe de remerciement.

Les Terriens allèrent regarder les chambres dont les portes se trouvaient sur le mur gauche, en face des fenêtres. Puis, ils revinrent dans la salle.

— L’architecture est étrange, c’est ainsi qu’on construit les hôpitaux psychiatriques chez nous, dit Evisa.

— Pourquoi le souverain suprême insiste-t-il tant sur la sécurité ? demanda Tivissa.

L’air sérieux, Rodis répondit :

— Il nous faut donc considérer que nous ne sommes pas en sécurité. Choisissez vos chambres et nous déciderons qui ira où, je transmettrai alors nos désirs à Tchoïo Tchagass.

Remarquant les visages étonnés de ses compagnons, elle expliqua :

— Je suis sûre que Tchoïo Tchagass va s’empresser d’avoir une conversation secrète avec moi. Pour eux, je suis votre souveraine et les souverains doivent se parler seul à seul.

— Vraiment ? s’étonna Evisa.

— Cela a été la cause de malheurs considérables dans l’ancien temps. Soyons des invités respectueux et soumettons-nous aux coutumes de nos hôtes. Mais il me faut connaître vos désirs et vos conseils à l’avance, sinon, comment pourrai-je répondre au souverain ?

— Tchedi peut, pour commencer, faire un résumé de ses propres observations lors du survol de Tormans, dit Vir Norine. Il nous sera alors plus facile de choisir une ligne de conduite.

— Je ne pense pas que j’en aie appris plus que vous, dit Tchedi, perplexe. Si Faï m’aide, je vais essayer… Nous sommes confrontés à une société originale sans équivalent dans l’histoire de la Terre ou dans les civilisations non communistes des autres planètes. On ignore, pour le moment, si elle se présente comme le développement extrême d’un capitalisme étatique de monopole, ou encore, comme celui d’un pseudo-socialisme-fourmilière. Comme vous le savez, ces deux formes se sont rejointes dans notre histoire terrestre pour établir des dictatures oligarchiques identiques. Les premiers temps, sur la Terre, le socialisme a imité le capitalisme dans sa course à la puissance matérielle et à la production de masse bon marché, lui sacrifiant parfois l’idéologie, l’éducation et l’art. Quelques pays socialistes d’Asie ont tenté de constituer un système socialiste, le plus rapidement possible, lui sacrifiant non seulement tout ce qui était possible, mais, ce qui est pire encore, les ressources naturelles et humaines de façon irréparable. En même temps, dans l’Amérique – pays capitaliste le plus puissant de l’EMD – en passe d’établir une dictature militaire, il devint indispensable de concentrer les industries les plus importantes entre les mains du gouvernement, afin de supprimer les fluctuations et la résistance des patrons. Cela s’est accompli sans la préparation indispensable de l’appareil gouvernemental. C’est précisément dans l’Amérique à la politique antisocialiste que des bandes de gangsters s’infiltrèrent dans toutes les industries, dans l’appareil gouvernemental, l’armée et la police, apportant partout terreur et corruption. Ce fut le début d’une lutte qui alla en s’amplifiant sous l’influence politique de bandits organisés. Ce fut le début de la terreur politique, qui entraîna un renforcement de la police secrète et se termina par la prise du pouvoir par une oligarchie du type gangstérien.