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Damon resserra son étreinte.

— Elle l’apprendra, dit-il. Sois-en sûre, elle l’apprendra. Rappelle-toi, nous savons qu’elle est en vie et que quelqu’un peut l’atteindre.

— Tu crois vraiment que ce Terrien, cet Ann’dra, peut nous aider à la retrouver ?

— Je l’espère. Ce ne sera pas facile, mais nous ne nous attendions pas à ce que ça le soit. Maintenant, au moins, nous savons que c’est possible.

— Comment cela ? Il n’est pas des nôtres. Même s’il a quelque talent comparable à notre laran, il ne sait pas s’en servir.

— Nous devrons le lui apprendre, dit Damon. Cela non plus ne serait pas facile. Damon ferma la main sur la pierre-étoile qui pendait à son cou. Mais c’était la seule façon d’agir pour retrouver Callista. Et lui, Damon, devrait diriger les recherches. Mais il le redoutait, par tous les enfers de Zandru, comme il le redoutait !

— Jusqu’à hier soir, dit-il calmement afin de redonner confiance à Ellemir, tu ignorais toi-même que tu pouvais utiliser ton laran. Et pourtant, tu l’as fait, tu t’en es servi pour me sauver la vie.

Ellemir esquissa un sourire.

— Alors, reprit Damon, pour le moment, profitons de notre bonheur, et n’allons pas le gâter avec nos inquiétudes. En ce qui concerne les lois et les formalités, je pense que Dom Esteban sera bientôt de retour.

En prononçant ces paroles, il sentit une appréhension le glacer. Plus tôt que je ne pensais, et ce ne sera un bien pour aucun d’entre nous. Il se dépêcha de ne plus y penser, espérant qu’Ellemir n’en ait rien perçu.

— Quand ton père arrivera, continua-t-il, nous lui parlerons. En attendant, nous devons enseigner ce que nous pouvons à Andrew. Où est-il ?

— Il dort, je crois. Il était très fatigué, lui aussi. Faut-il que j’envoie quelqu’un le chercher ?

— Je pense que oui. Nous n’avons pas de temps à perdre. Pourtant, maintenant que nous nous sommes trouvés, je préférerais demeurer seul un instant avec toi.

Mais il souriait en disant cela. Ils partageaient déjà tous deux plus qu’il n’avait jamais partagé avec aucune femme. Il n’était pas comme ces adolescents qui se cramponnent à la première fille qui se présente. Ils pouvaient attendre. Brièvement, il saisit une pensée furtive d’Ellemir : Mais pas trop longtemps. Cela le réconforta.

— Nous aurons assez de temps, dit-il enfin en la laissant partir. Envoie un domestique le prier de venir, s’il est suffisamment reposé. Et maintenant, j’ai besoin de réfléchir.

Il s’éloigna d’Ellemir et se mit à fixer les flammes bleu-vert qui jaillissaient du bois résineux empilé dans la cheminée.

Andrew Carr était télépathe, et un télépathe potentiellement puissant. Il s’était mis en contact, et avait maintenu le contact, avec une étrangère, quelqu’un avec qui il n’avait aucun lien de consanguinité. Il avait peut-être accès à un endroit du surmonde fermé même à ceux qui avaient été formés à la tour. Cependant, il était entièrement ignorant et semblait peu porté à prêter foi à toutes ces étranges facultés. De tout son cœur, Damon souhaitait que quelqu’un d’autre pût venir initier cet homme. Le réveil de talents extra-sensoriels n’était pas une tâche aisée, même pour ceux qui avaient été entraînés à ce genre d’opération. Et pour une personne d’une autre planète, dont le milieu était inconcevablement différent, l’expérience, sans même la croyance et la confiance pour l’aider, serait probablement difficile et douloureuse. Damon s’était tenu à l’écart de ce genre de contact depuis qu’il avait dû quitter le Cercle de la tour. Ce ne serait pas facile pour lui de s’y remettre, de faire tomber ses barrières pour cet étranger. Malheureusement, il n’y avait personne d’autre pour accomplir cette tâche. Il fouilla la pièce du regard.

— Y a-t-il du kirian ici ?

Le kirian était une puissante drogue, extraite du pollen d’une plante rare des montagnes. Il avait le pouvoir, lorsqu’on le prenait en doses soigneusement mesurées, de faire baisser les barrières contre les rapports télépathiques. Damon n’avait pas décidé s’il allait le prendre ou le donner à Andrew. D’une façon ou d’une autre, cela faciliterait le contact. L’entraînement télépathique était généralement conduit par les gardiennes, mais le kirian pouvait augmenter provisoirement les facultés extra-sensorielles, même d’un non-télépathe, de façon à rendre le contact possible.

Ellemir hésita.

— Je ne crois pas, répondit-elle. Nous n’en avons plus au moins depuis que Domenic a dépassé la maladie du seuil. Callista n’en a jamais eu besoin, et moi non plus. Je vais chercher, mais j’ai peur que nous n’en ayons pas.

Damon sentit la peur le saisir au ventre. Assisté de la drogue, il lui aurait été possible de supporter la pénible besogne qui consistait à diriger et à contrôler l’éveil du laran chez un étranger. L’idée de travailler sans kirian était intolérable. Pourtant, si c’était le seul moyen de sauver Callista…

— Tu as la pierre-étoile, dit Ellemir. Tu t’en es servi pour me montrer ce que je devais faire…

— Ma mie, nous sommes du même sang et nous sommes très proches l’un de l’autre. Et pourtant, quand tu as touché le cristal, j’ai cru mourir, dit Damon gravement. Dis-moi. Est-ce que Callista a d’autres cristaux qui n’ont jamais servi ?

S’il pouvait procurer à Andrew une matrice qui n’avait jamais été en harmonie avec qui que ce soit, il pourrait travailler plus facilement avec Andrew.

— Je ne sais pas, dit Ellemir. Elle a beaucoup de choses que je n’ai jamais vues : des objets ayant trait à ses fonctions de gardienne. Je ne lui ai jamais posé de questions là-dessus, bien que je me sois demandé pourquoi elle les avait apportés plutôt que de les laisser à la tour.

— Peut-être est-ce parce que…

Damon hésita : il lui était très difficile de parler du temps qu’il avait passé dans le Cercle de la tour. Cela le rendait nerveux. Et pourtant, il fallait qu’il surmonte cette peur.

— Peut-être parce qu’une leronis, ou même un simple matrotechnicien, préfère ne pas se séparer de son matériel. Je ne peux dire pourquoi, mais on se sent mieux quand on l’a sous la main. Je ne me sers pas de ma pierre-étoile, mais je la garde autour du cou : c’est comme si elle faisait partie de moi-même. Il m’est désagréable, douloureux même, de m’en séparer.

— Oh ! Dieux, et Callista…, chuchota Ellemir. Elle a dit à Andrew qu’ils lui avaient pris sa pierre-étoile…

Damon acquiesça gravement.

— Donc, même si elle n’a pas été violée ni battue, elle souffre quand même. Pourquoi chercher à éviter un peu de douleur et d’angoisse, alors que je peux lui en éviter de biens pires ? Mène-moi à sa chambre. Il faut que je voie ses affaires.

Ellemir obéit sans poser de question. Quand ils furent dans la chambre qu’elles partageaient, elle lui dit d’une voix inquiète :

— Tu as dit… Ça ne va pas faire de mal à Callista que tu touches ses… ses affaires de gardienne ?

— C’est possible, mais ce ne sera pas pire que ce qu’elle a déjà enduré. De toute façon, c’est notre seule chance.

Mes hommes sont morts parce que j’étais trop lâche pour accepter ma condition : un télépathe qualifié. Si je laisse Callista aux mains de ces monstres pour éviter de me servir de mes dons… alors je ne vaux pas mieux qu’eux et je ne suis pas digne d’Ellemir… mais j’ai peur, mon Dieu, j’ai peur… Bienheureuse Cassilda, mère des Sept Domaines, soutenez-moi…

Sa voix ne trahissait pourtant aucune frayeur quand il reprit la parole.