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McPherson s’assied donc à son bureau et parcourt la liste des Choses-à-faire qu’il a laissée la veille. Il y ajoute plusieurs points qui lui sont apparus dans la soirée et en chemin.

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Il décroche le téléphone, enclenche la touche qui correspond à Don Freiburg. La journée commence.

Le fait de devenir un programme blanc implique que l’offre sur Abeille-Tempête fait désormais partie du circuit principal de l’approvisionnement militaire public en Amérique. C’est un processus d’une effroyable complexité qui comporte des centaines de variables, et très peu de gens, sinon personne, en comprennent toutes les facettes. En tout cas, pas McPherson ; il se concentre sur la partie du processus qui est importante pour son travail, comme tout le monde. Il est par conséquent expert en matière de fournitures en technologie aérospatiale pour l’Air Force, et sait peu de chose ou rien sur les autres domaines. Apprendre à connaître son propre domaine est déjà assez difficile.

Tout commence au sein même de l’Air Force, de la façon suivante : l’un des commandements opérationnels, mettons le Groupe de Défense Stratégique de Phase Un (G.D.S.P.U.), établit un Constat de Nécessité Opérationnelle (C.N.O.) accompagné d’une Analyse de Nécessité d’un Elément de Mission (A.N.E.M.) et le transmet au Q.G. de l’U.S.A.F. (Q.G.U.S.A.F.). Si le Q.G.U.S.A.F. décide que le C.N.O. correspond à un programme important, ils rédigent une Justification à l’intention du Nouveau Départ des Systèmes Majeurs (J.I.N.D.S.M.), qui est revue par le Groupe d’Evaluation des Requêtes (G.E.R.), et la version revue est ensuite soumise au Secrétariat de l’Air Force (S.A.F.). Si le S.A.F. conclut que la J.I.N.D.S.M. représente un Programme Qualifié d’Acquisition par l’Air Force (P.Q.A.A.F.), il approuve le J.I.N.D.S.M., qui devient un J.I.N.D.S.M.A. Le S.A.F. présente ensuite le J.I.N.D.S.M.A. dans le cadre du Mémorandum sur le Programme d’Objectifs de l’Air Force (M.P.O.A.F.) au Secrétariat de la Défense (S.D.). Si le S.D. approuve le M.P.O., et par conséquent le J.I.N.D.S.M.A., le Q.G.U.S.A.F. prépare et publie une Directive de Gestion de Programme (D.G.P.), et une action de Systématisation des Plannings Programmes et Budgets (S.P.P.B.) est engagée. La Phase d’Exploration Conceptuelle (P.E.C.) a commencé. Dans cette phase, on explore les divers Concepts Préliminaires de Systèmes Opérationnels (C.P.S.O.), et ceux-ci, au total, constituent la Phase de Passage en Revue (P.P.R.). A partir de la P.P.R., le Q.G.U.S.A.F. prépare un Rapport sur la Conception du Système (R.C.S.), qui est de nouveau revu par le G.E.R. et par le Conseil de Révision d’Acquisition de Systèmes par l’Air Force (C.R.A.S.A.F.), après quoi on le soumet de nouveau au S.A.F. Si le S.A.F. approuve le R.C.S., on le remet entre les mains du Conseil de Révision d’Acquisition de Systèmes par le Ministère de la Défense (C.R.A.S.M.D.), qui le recommande au S.D. Si le S.D. approuve le R.C.P. – décision qui marque un tournant de première importance –, le Q.G.U.S.A.F. publie une nouvelle D.G.P. et le programme entre dans sa Phase de Validation et Démonstration (P.V.D.).

Tout est bien clair ? Bon. C’est à ce stade que le programme entre en rapport avec l’industrie privée. Si le S.A.F. et le S.D. sont convenus que le projet devait rester top-secret, le programme devient alors super-noir et les personnels de l’Air Force au Pentagone même ne contactent qu’une ou deux entreprises. Généralement, du moins. Il y a aussi des programmes noirs ordinaires, que l’on confie également directement aux entreprises comme dans le cas des super-noirs ; on en parle à deux ou trois personnes au Congrès, pour qu’elles s’imaginent au fait de tous les petits secrets du Pentagone.

Mais la grande majorité des programmes sont ceux que l’on appelle des programmes blancs, et ceux-ci exigent des procédures beaucoup plus compliquées. Au cours de la P.V.D., le Q.G.U.S.A.F. commence à lancer des Appels d’Offres (A.O.) et des Appels à Informations (A.I.) aux entreprises adéquates du secteur de la Défense afin d’obtenir leurs opinions. Les compagnies intéressées répondent par des suggestions techniques basées sur leur prise en considération de l’A.O., et celles-ci deviennent parties constituantes du Processus de Coordination des Décisions (P.C.D.). En fin de compte, le Q.G.U.S.A.F. émet un ultime A.O., qui est en principe publié dans le Commerce Business Daily. À ce stade, il y a déjà eu un important combat tactique entre les entreprises intéressées, chacune d’entre elles ayant tenté de faire inscrire dans l’A.O. final des conditions qu’elle seule est capable de remplir. Mais l’A.O. est maintenant lancé à tous, et la course est engagée.

En règle générale, les compagnies disposent de quatre-vingt-dix jours pour soumettre des propositions au Directeur du Programme (D P.), qui est colonel ou général de brigade dans l’Air Force. Après soumission, le processus d’estimation des propositions s’engage. Il est en partie conduit par le Centre d’Examen et d’Evaluation de l’Air Force (C.E.E.A.F.), qui est une branche du Commandement aux Systèmes de l’Air Force (C.S.A.F.) installé sur la base de l’Air Force d’Andrews ; l’autre partie est conduite par le O.G.U.S.A.F. au Pentagone, ou par le D.P. A partir de ces unités et de quelques autres, on constitue un Comité d’Evaluation et de Sélection des Sources (C.E.S.S.), commandé par une Autorité de Sélection des Sources (A.S.S.), qui est en général – mais pas toujours – le D.P. Les divers auteurs de propositions sont convoqués et cuisinés sur les moindres détails de leurs propositions puis, lorsque les six semaines de ce processus sont écoulées, le C.E.S.S. fait son estimation, qui est ensuite résumée par l’A.S.S., laquelle se sert de ce résumé pour justifier sa décision vis-à-vis de ses supérieurs. La décision d’octroyer le programme à l’un des concurrents (ou de l’octroyer à deux concurrents mis en compétition, ou en situation de leader/suiveur) est par conséquent, en dernier ressort, celle de l’A.S.S., mais celle-ci se conforme en général aux recommandations du C.E.S.S., et elle doit également s’assurer de l’aval de ses supérieurs au niveau du S.A.F., voire du S.D.

Tout est clair ?

Mais en attendant, à ce stade, Dennis McPherson ne doit se préoccuper que de mettre en forme une proposition qui tienne debout face aux essais techniques et aux exigences budgétaires dont le C.E.S.S. ne tardera pas à décider. Il ne reste pas trop de jours ; et c’est donc plus près de 5 h 30 que de 4 heures qu’il parvient enfin à se libérer pour son premier rendez-vous, avec Dan Houston, au sujet du projet Foudre en Boule sur lequel, par esprit de vengeance, Lemon a exigé qu’il travaille, dans le « temps libre » laissé par l’offre Abeille-Tempête.

McPherson se rappelle encore parfaitement la bévue qui l’a conduit à avoir ça sur le dos. Il se trouvait au restaurant des cadres de la L.S.R., il entrait en compagnie d’Art Wong et, en réponse à quelque chose qu’Art avait dit, sans prendre le temps de réfléchir (ou de regarder autour de lui), il avait déclaré : « Je suis foutrement content de ne pas faire le boulot que vous faites. A mon avis, tout le programme de défense balistique n’est qu’un trou noir où s’engouffrent l’argent et l’énergie. » Il s’était retourné, pour découvrir Stewart Lemon planté là à le regarder.