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La saveur florale et fruitée était plus évidente cette fois. La troisième fois, le breuvage était plus frais.

« Bois ! »

Slurp !

Clic ! LEPTOÂME FAUCHEUX.

ARNOLD possédait huit pattes obéissantes, quatre paires coordonnées. La seconde paire oscillait dans l’air comme des antennes, écoutant, humant. Chaque patte était dotée d’une filière, comme les araignées, d’où sortaient des fils robustes. Ses yeux, de trois mètres cinquante de diamètre, clignotaient sur sa tête pareille à une tourelle. Ses pattes puissantes brassaient l’océan, soulevant des gerbes d’écume. ARNOLD était à présent un Faucheux, avec un corps de quatre cents mètres de long !

« Chef Suprême, nous avons repéré Rorqual, » annonça Poursuivant Deux.

— « Capturez-le ! » commanda Furlong depuis la fourmilière.

L’Armada fit demi-tour. ARNOLD attendait tranquillement, les jambes repliées dans le dos. Seuls ses yeux remuaient, aux aguets. Un épais banc de brume roula par-dessus sa poupe. L’hovercraft décrivit un cercle autour de lui, puis rejoignit son hangar : ennuis de moteur. Le brouillard engloutit les navires de la fourmilière.

« Tu ne pourras pas t’échapper ainsi, » fit Furlong.

Les senseurs se réglèrent pour voir au travers de la vapeur d’eau, et continuèrent à retransmettre des images à son écran. Il y eut un moment de confusion sur le pont lorsque les grutiers sortirent de leurs cabines extérieures et se rendirent aux postes de télécommande, sous le pont. Mais ils manquaient d’entraînement et seraient un peu maladroits tant qu’ils ne se seraient pas familiarisés avec les optiques du bateau. Des Bricoleurs s’occupèrent de l’hovercraft. Les archers avalaient leurs stimulants. Les robots-tueurs se mirent en mouvement.

ARNOLD-FAUCHEUX écoutait les conversations qui lui parvenaient des navires de la fourmilière. Il se tapit dans le brouillard.

« Essayez d’encercler le Moissonneur, » dit Furlong. « Je ne veux pas qu’il nous échappe, cette fois-ci. Si vous pouvez vous approcher suffisamment, enclenchez les grues avant et attendez les autres bateaux avant de tenter l’abordage. Nous ne savons pas combien d’Océanides peuvent se trouver à bord. Rappelez-vous, ce bateau peut en transporter jusqu’à dix mille ! »

ARNOLD attendait, sa seconde paire de pattes dressée en l’air, sur le qui-vive. Un vaisseau approchait lentement. Les autres entreprirent une rapide manœuvre d’encerclement. Ils demeuraient à huit kilomètres de distance, en arc de cercle. Il se tourna vers le navire qui se rapprochait. Ses grues compactes s’ouvrirent : distance, 880 mètres : la longueur de deux bâtiments.

ARNOLD fouetta l’eau de ses huit pattes, se précipitant en avant. Il planta la D-1 sur le pont avant de l’ennemi pour repousser les pinces ; la G-1 cracha un jet de polymère visqueux pour prendre au lasso les grues adverses. Les grutiers néchiffes se démenaient aux commandes, mais le Faucheux était vif et agile, et il les ficela en un paquet bien net. Les escadrons de guerriers grouillaient sur les ponts, telles des fourmis, et couraient en rond dans le brouillard.

« Mettez-vous en formation ! À l’abordage ! »

ARNOLD posa ses deux premières paires de pattes sur le pont principal du vaisseau de chasse et se souleva hors de l’eau. Le bateau ennemi donna sèchement de la bande. ARNOLD s’enfonça davantage dans l’eau, et en avala une goulée.

Furlong bondit sur ses pieds. « Rorqual a éperonné Poursuivant Deux ! Ils coulent ! Allez vite les repêcher ! »

ARNOLD tendit la G-3 en avant et arracha les panneaux de descente du vaisseau. Il se pencha en arrière, fit culbuter le bateau pour permettre à la mer de déferler dans la cale. Lui-même continuait à en avaler. Un second navire apparut. Il le repoussa à l’aide de la D-4. Plusieurs grappins tombèrent sur son dos. Il les fit choir avec sa troisième paire de pattes. Des vagues les balayèrent. Il s’efforça de maintenir le bateau sous l’eau, jusqu’à ce qu’il commence à perdre sa flottabilité. Deux autres navires arrivèrent, munis de pinces et de crochets de remorque. Il se rua sur eux, s’enfonçant davantage. Le bateau captif se débattait toujours. Il sentit les puissants propulseurs l’entraîner à trente brasses de fond. À soixante brasses, le navire frémit. Ses compartiments étanches commencèrent à se gondoler. La pression n’incommodait pas ARNOLD. Il garda ses pores ouverts. La mer circulait librement à travers son corps. Ils se posèrent sur le fond. Il lâcha le bateau. »

« Que s’est-il passé ? » questionna Furlong. Sur trois des portions de son écran, il ne voyait pas grand-chose de plus que des ponts embrumés. Sur la quatrième portion, rien.

Le capitaine de Poursuivant Trois répondit : « Poursuivant Deux a engagé le combat avec l’ennemi et l’a détruit. Malheureusement, Poursuivant Deux est échoué à deux cents brasses de fond. Le bout de sa poupe est visible. »

Furlong suivait les opérations ; le brouillard se dissipa, lui permettant de voir de près la grue-senseur toucher la quille de l’épave, qui se dressait à six mètres hors de l’eau. Le nez du bateau reposait sur le fond. Aucun signe de vie : les tôles étaient fracturées, et l’inondation avait mis hors service les cyberéléments.

« Commencez tout de suite le renflouage. Je veux que Rorqual et Poursuivant Deux soient remis en état le plus rapidement possible. »

— « Oui, monsieur. »

À l’aide de leurs thons mécaniques, les trois vaisseaux de la fourmilière vinrent se ranger contre la coque de Poursuivant Deux. Chacun d’eux fit passer un filin dans une écoutille du navire submergé, puis ils entreprirent de remplir la cale de mousse : des bulles de polymère solide remplies d’air. Tandis que l’extraction progressait, d’autres senseurs motorisés cherchaient Rorqual.

« Il est à flot ! »

Une quille noire et lisse affleurait ; longue d’une centaine de mètres, haute de trois mètres.

— « Continuez à lui insuffler de l’air. Mais commencez à le remorquer vers le chantier naval.

— « Tout de suite, monsieur. »

— « Qu’est-il arrivé à Rorqual ? »

— « Il est toujours au fond. Nous le voyons sur notre scope. Mais il a glissé de la corniche et repose à cinq cents brasses de fond, dans une fosse. Cela va nous demander un certain temps pour le repêcher. »

— « Bon, que Poursuivant Cinq ramène l’épave au port. Vous deux, restez sur place jusqu’à ce que vous ayez renfloué Rorqual. »

— « C’est entendu, monsieur. »

Furlong se leva et s’essuya le front. « Bon travail, » dit le C.U. « Avec trois bateaux de pêche, nous allons connaître des jours meilleurs. »

— « Et les deux vaisseaux endommagés seront remis à neuf d’ici un an ou deux. »

— « Oui… Vous pouvez vous reposer maintenant. Je réunirai le Conseil dans douze heures. »

Furlong se glissa derrière un rideau, passa devant les énormes postes terminaux et s’effondra sur sa couchette.

« Des pillards ! Des pillards ! »

Furlong, à moitié endormi, se redressa sur son lit. « Qu’y a-t-il encore ? » Il se frotta les yeux. Ces deux heures de sommeil n’avaient suffi qu’à l’engourdir.

« Un intrus dans le jardin ! » annonça l’écran.

— « Ce n’est pas une raison pour réveiller un Chef Suprême ! » grogna-t-il. « Appelle le Contrôle des Chasses. »