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— « Six de nos cités sont prises d’assaut. »

— « Et qui sont les assaillants ? Oh !… des Océanides. Sans doute un raid de représailles. Il n’y en a que deux ou trois devant chaque chapeau de puits. Aucun problème. Préviens la Sûreté et envoie les chasseurs Dehors. Je visionnerai les enregistrements demain matin. »

— « Oui, monsieur. »

« Poursuivant Trois au rapport : nous sommes en train de remplir la coque de Rorqual de mousse. »

— « Laissez-moi dormir. Je ne veux pas qu’on m’ennuie davantage avec ces problèmes de routine. Le C.U. me mettra à jour quand je me lèverai. »

— « Excusez-moi, monsieur. »

— « Brèche dans le chapeau de puits. Vingt-trois morts. »

— « … demain matin… » marmonna Furlong.

Dix heures plus tard, Furlong se réveilla, mangea, puis se rendormit. En fin d’après-midi, il trouva enfin la force de se lever, but deux pintes de stimulant, et se dirigea vers le rafraîchisseur d’un pas mal assuré.

« Mise à jour. »

Le C.U. analysa les dix-huit heures qui venaient de s’écouler et fit son compte rendu par-dessus le rugissement de l’écoulement laminaire air/eau. « En mer, rien de nouveau. Les vaisseaux Deux et Cinq progressent lentement ; arrivée prévue dans quatre jours environ. Le Trois et le Quatre sont en train de renflouer Rorqual. Aucun problème. Quatre chapeaux de puits envahis. Les dégâts et les pertes en vies humaines sont restés bien au-dessous des limites prévues. Trois Océanides ont été tués, un fait prisonnier. »

Furlong sortit la tête de la douche à pulsations. « Le prisonnier… est-il encore en vie ? »

— « Oui. Il a été conduit au Bio Labo pour être disséqué. »

— « Bien sûr. Avons-nous tiré de lui des informations ? Nous avons eu énormément de mal à découvrir leurs dômes, ces derniers temps. »

Le C.U. recouvrit l’écran de données. « Nous l’avons soumis, comme d’habitude, à la sonde psychique et à l’analyseur de mémoire-moléculaire-S.N.C. Voici ce que nous avons appris. Les Neurotechs doivent être en train de lui enlever le cerveau, pour voir si notre analyse électrique S.N.C. -M.M. correspond à leur analyse chimique. »

Furlong jeta un regard au profil. « Sapristi ! Quel énorme gaillard ! Prenez note de faire ficher ses gènes. Ainsi, il pense qu’il est protégé par un dieu ? Léviathan ? Prendrait-il le Moissonneur pour son dieu ? »

— « Apparemment, » dit le C.U. « Cela expliquerait l’acharnement qu’ils ont mis à défendre leur plateau continental. Avoir avec eux un dieu marin justifie le fait qu’ils revendiquent la mer. »

— « J’aimerais lui parler avant que l’équipe n’effectue la craniectomie. »

— « On retardera l’opération pour vous. Labo B-Dix-sept.

Crabe rouge était cloué sur la table de vivisection. Le pompage avait déjà commencé. Des tubes et des fils le maintenaient en vie tandis que des techs curieux étiquetaient et répertoriaient ses organes internes.

« J’ai les observations sur sa paroi aortique. Regardez-moi ce niveau d’oxydase de lysine ! »

— « Passez-moi le noyau de la rate. Le foie à présent. Où sont les fioles que j’ai demandées ? »

— « Écartez ce rétracteur. Il nous faut davantage de matière intervertébrale. »

Crabe Rouge essayait de se débattre, mais aucun de ses muscles n’obéissait. Il ne pouvait ni cligner de l’œil ni changer son rythme respiratoire. Il attendit.

« Est-il conscient ? » demanda Furlong.

— « Oui, d’après l’E.E.G., mais j’ai coupé ses terminaisons motrices, » expliqua le tech.

— « J’aimerais lui parler. »

— « Oui, monsieur. Une petite minute. L’équipe Ostéo va vérifier les attaches. Je n’ai pas envie que cette créature abîme nos instruments en se contorsionnant. »

Les épingles ensanglantées furent réassujetties à leurs montures. L’Océanide était suspendu au-dessus du champ de travail. Chacun des gros os était transpercé : deux grosses épingles dans la partie externe de l’os occipital, une dans chaque ilium, l’humérus et le fémur.

« Avant que vous ne lui rendiez le contrôle de ses muscles, ne pensez-vous pas que vous devriez lui refermer le ventre ? Je ne voudrais pas que quelque chose tombe, s’il toussait. »

— « Bonne idée, » dit le tech, en se levant et en s’étirant. « Très bien, Ace, fais quelques points de suture pour arrêter l’écoulement. Pose un clamp sur l’incision. Nous finirons demain. »

Furlong sortit pour prendre un repas léger. Ils le rappelèrent lorsque l’Océanide commença à remuer. Le champ de dissection fut refermé par une rangée de points, faits avec de larges fibres de peau. On roula la table plus loin et on mit à sa place une couchette moelleuse et absorbante. Le prisonnier resta suspendu.

« S’il vous donne du fil à retordre, ouvrez cet interrupteur. Cela paralysera ses terminaisons nerveuses. Nous serons de retour dans douze heures environ. Il nous faudra peut-être quatre ou cinq jours pour achever nos analyses. Nous avons un tas de formules à remplir sur lui. C’est un sujet intéressant. »

Furlong acquiesça. « Sans nul doute. Avons-nous son empreinte vocale ? »

— « Sa structure génétique n’est pas enregistrée, » dit le tech. « Il s’agit d’un hybride, pour le moins. Peut-être d’un authentique primitif. C’est pourquoi nous devons procéder lentement, pour en apprendre le plus possible. »

Furlong se tourna vers l’Océanide : un géant d’une grande robustesse, d’une taille d’un mètre quatre-vingt-cinq, avec un système pileux abondant et des organes génitaux développés. Furlong, avec son mètre trente, était grand pour un Néchiffe, mais il se sentait un peu écrasé.

« M’entends-tu ? »

Le géant grogna. Chaque muscle de son corps ressortait. Les tendons étaient rigides. Ses yeux lançaient des éclairs de haine.

« Je souhaiterais pouvoir te donner un peu plus de confort, le temps que nous bavarderons, mais j’ignore lequel de ces sélecteurs contrôle la douleur. Parle-moi de ton peuple. »

Silence.

« Parle-moi de ton dieu. Vous adorez une divinité qui ressemble à une baleine ? »

Le géant détournait obstinément les yeux. Les épingles métalliques dans ses os grincèrent.

« Ton dieu est mort, » reprit Furlong. « Nous avons mis à mort votre Rorqual. »

Crabe Rouge tourna un regard malveillant vers le Chef Suprême néchiffe. « Mon Dieu-baleine ne mourra jamais. Il nous a rendu une mer féconde. Il vous tuera pour ce que vous avez fait. » Il essaya de cracher, mais le lien autour de son cou était trop serré. Seules quelques petites gouttes frappèrent le visage de Furlong.

— « J’ai vu les navires de la fourmilière envoyer ton Dieu-baleine par le fond. Tiens, je vais avancer cet écran pour que tu te rendes compte par toi-même. Pas ce canal. Là, ce sont des vues de tes organes internes. Nous y voici. Regarde ! Rorqual est au fond de la mer. »

Crabe Rouge vit les vaisseaux de la fourmilière ancrés au-dessus du Moissonneur naufragé. Un optique se baissa vers un. thon mécanique, qui explorait la carcasse. Toutes les écoutilles étaient ouvertes.

« Regarde ! » fanfaronna Furlong. « Chaque compartiment est inondé. Ton Dieu-baleine n’est pas une divinité. Ce n’est qu’un bateau qui a sombré. Tout l’équipage est mort. »

— « Crétin ! » hurla Crabe Rouge. « Bien sûr que c’est un bateau, un bateau habité par notre dieu. Ouvre donc les yeux. Il n’y a pas d’équipage ! Rorqual est toujours vivant. Ce sont tes matelots néchiffes qui vont périr. »