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Nous demandons:

– Ta mère est là?

Elle dit:

– Oui.

– Est-elle morte?

– Je ne sais pas.

Nous posons nos fagots et nous allumons le feu dans le fourneau, car il fait aussi froid dans la chambre que dehors. Ensuite, nous allons chez Grand-Mère et nous prenons à la cave des pommes de terre et des haricots secs. Nous trayons une chèvre et nous retournons chez la voisine. Nous chauffons le lait, nous faisons fondre de la neige dans une casserole et nous y cuisons les haricots. Les pommes de terre, nous les rôtissons au four. Bec-de-Lièvre se lève et, chancelante, vient s'asseoir près du feu.

La voisine n'est pas morte. Nous lui versons du lait de chèvre dans la bouche. Nous disons à Bec-de-Lièvre:

– Quand tout sera cuit, mange et donne à manger à ta mère. Nous reviendrons.

Avec l'argent que le cordonnier nous a rendu, nous avons acheté quelques paires de chaussettes, mais nous n'avons pas tout dépensé. Nous allons dans une épicerie pour acheter un peu de farine et prendre du sel et du sucre sans les payer. Nous allons aussi chez le boucher; nous achetons une petite tranche de lard et prenons un gros saucisson sans le payer. Nous retournons chez Bec-de-Lièvre. Elle et sa mère ont déjà tout mangé. La mère est restée au lit, Bec-de-Lièvre fait la vaisselle.

Nous lui disons:

– Nous vous apporterons un fagot de bois tous les jours. Un peu de haricots et de pommes de terre aussi. Mais, pour le reste, il faut de l'argent. Nous n'en avons plus. Sans argent, on ne peut pas entrer dans un magasin. Il faut acheter quelque chose pour pouvoir voler autre chose.

Elle dit:

– C'est fou ce que vous êtes malins. Vous avez raison. Moi, on ne me laisse même pas entrer dans les magasins. Je n'aurais jamais pensé que vous seriez capables de voler.

Nous disons:

– Pourquoi pas? Ce sera notre exercice d'habileté. Mais il nous faut un peu d'argent. Absolument.

Elle réfléchit et dit:

– Allez en demander à M. le curé. Il m'en donnait parfois quand j'acceptais de lui montrer ma fente.

– Il te demandait ça?

– Oui. Et parfois, il mettait son doigt dedans. Et après, il me donnait de l'argent pour que je ne dise rien à personne. Dites-lui que Bec-de-Lièvre et sa mère ont besoin d'argent.

Le chantage

Nous allons chez M. le curé. Il habite à côté de l'église dans une grande maison qui s'appelle la cure.

Nous tirons le cordon de la sonnette. Une vieille femme ouvre la porte:

– Qu'est-ce que vous voulez?

– Nous voulons voir M.le curé.

– Pourquoi?

– C'est pour quelqu'un qui va mourir.

La vieille nous fait entrer dans une antichambre. Elle frappe à une porte:

– Monsieur le curé, crie-t-elle, c'est pour une extrême-onction.

Une voix répond derrière la porte:

– Je viens. Qu'on m'attende.

Nous attendons quelques minutes. Un homme grand et maigre au visage sévère sort de la chambre. Il a une espèce de cape blanc et doré sur ses habits sombres. Il nous demande:

– Où est-ce? Qui vous a envoyés?

– Bec-de-Lièvre et sa mère.

Il dit:

– Je vous demande le nom exact de ces gens.

– Nous ignorons leur nom exact. La mère est aveugle et sourde. Elles habitent la dernière maison de la ville. Elles sont en train de mourir de faim et de froid.

Le curé dit:

– Bien que je ne connaisse absolument pas ces personnes, je suis prêt à leur donner l'extrême-onction Allons-y. Conduisez-moi.