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Nous répétons encore que si les faits qui nous occupent se fussent renfermés dans le mouvement mécanique des corps, la recherche de la cause physique de ce phénomène rentrait dans le domaine de la science ; mais dès qu'il s'agit d'une manifestation en dehors des lois de l'humanité, elle sort de la compétence de la science matérielle, car elle ne peut s'exprimer ni par les chiffres, ni par la puissance mécanique. Lorsque surgit un fait nouveau qui ne ressort d'aucune science connue, le savant, pour l'étudier, doit faire abstraction de sa science et se dire que c'est pour lui une étude nouvelle qui ne peut se faire avec des idées préconçues.

L'homme qui croit sa raison infaillible est bien près de l'erreur ; ceux mêmes qui ont les idées les plus fausses s'appuient sur leur raison, et c'est en vertu de cela qu'ils rejettent tout ce qui leur semble impossible. Ceux qui ont jadis repoussé les admirables découvertes dont l'humanité s'honore faisaient tous appel à ce juge pour les rejeter ; ce que l'on appelle raison n'est souvent que de l'orgueil déguisé, et quiconque se croit infaillible se pose comme l'égal de Dieu. Nous nous adressons donc à ceux qui sont assez sages pour douter de ce qu'ils n'ont pas vu, et qui, jugeant l'avenir par le passé, ne croient pas que l'homme soit arrivé à son apogée, ni que la nature ait tourné pour lui la dernière page de son livre.

VIII

Ajoutons que l'étude d'une doctrine, telle que la doctrine spirite, qui nous lance tout à coup dans un ordre de choses si nouveau et si grand, ne peut être faite avec fruit que par des hommes sérieux, persévérants, exempts de préventions et animés d'une ferme et sincère volonté d'arriver à un résultat. Nous ne saurions donner cette qualification à ceux qui jugent, a priori, légèrement et sans avoir tout vu ; qui n'apportent à leurs études ni la suite, ni la régularité, ni le recueillement nécessaires ; nous saurions encore moins la donner à certaines personnes qui, pour ne pas faillir à leur réputation de gens d'esprit, s'évertuent à trouver un côté burlesque aux choses les plus vraies, ou jugées telles par des personnes dont le savoir, le caractère et les convictions ont droit aux égards de quiconque se pique de savoir-vivre. Que ceux donc qui ne jugent pas les faits dignes d'eux et de leur attention s'abstiennent ; personne ne songe à violenter leur croyance, mais qu'ils veuillent bien respecter celles des autres.

Ce qui caractérise une étude sérieuse, c'est la suite que l'on y apporte. Doit-on s'étonner de n'obtenir souvent aucune réponse sensée à des questions, graves par elles-mêmes, alors qu'elles sont faites au hasard et jetées à brûle-pourpoint au milieu d'une foule de questions saugrenues ? Une question, d'ailleurs, est souvent complexe et demande, pour être éclaircie, des questions préliminaires ou complémentaires. Quiconque veut acquérir une science doit en faire une étude méthodique, commencer par le commencement et suivre l'enchaînement et le développement des idées. Celui qui adresse par hasard à un savant une question sur une science dont il ne sait pas le premier mot, sera-t-il plus avancé ? Le savant lui-même pourra-t-il, avec la meilleure volonté, lui donner une réponse satisfaisante ? Cette réponse isolée sera forcément incomplète, et souvent, par cela même, inintelligible, ou pourra paraître absurde et contradictoire. Il en est exactement de même dans les rapports que nous établissons avec les Esprits. Si l'on veut s'instruire à leur école, c'est un cours qu'il faut faire avec eux ; mais, comme parmi nous, il faut choisir ses professeurs et travailler avec assiduité.

Nous avons dit que les Esprits supérieurs ne viennent que dans les réunions sérieuses, et dans celles surtout où règne une parfaite communion de pensées et de sentiments pour le bien. La légèreté et les questions oiseuses les éloignent, comme, chez les hommes, elles éloignent les gens raisonnables ; le champ reste alors libre à la tourbe des Esprits menteurs et frivoles, toujours à l'affût des occasions de se railler et de s'amuser à nos dépens. Que devient dans une telle réunion une question sérieuse ? Il y sera répondu ; mais par qui ? C'est comme si au milieu d'une troupe de joyeux vivants vous alliez jeter ces questions : Qu'est-ce que l'âme ? Qu'est-ce que la mort ? et d'autres choses aussi récréatives. Si vous voulez des réponses sérieuses, soyez sérieux vous-mêmes dans toute l'acception du mot, et placez-vous dans toutes les conditions voulues : alors seulement vous obtiendrez de grandes choses ; soyez de plus laborieux et persévérants dans vos études, sans cela les Esprits supérieurs vous délaissent, comme le fait un professeur pour ses écoliers négligents.

IX

Le mouvement des objets est un fait acquis ; la question est de savoir si, dans ce mouvement, il y a ou non une manifestation intelligente, et en cas d'affirmative, quelle est la source de cette manifestation.

Nous ne parlons pas du mouvement intelligent de certains objets, ni de communications verbales, ni même de celles qui sont écrites directement par le médium ; ce genre de manifestation, évident pour ceux qui ont vu et approfondi la chose, n'est point, au premier aspect, assez indépendant de la volonté pour asseoir la conviction d'un observateur novice. Nous ne parlerons donc que de l'écriture obtenue à l'aide d'un objet quelconque muni d'un crayon, tel que corbeille, planchette, etc. ; la manière dont les doigts du médium sont posés sur l'objet défie, comme nous l'avons dit, l'adresse la plus consommée de pouvoir participer en quoi que ce soit au tracé des caractères. Mais admettons encore que, par une adresse merveilleuse, il puisse tromper l'oeil le plus scrutateur, comment expliquer la nature des réponses, alors qu'elles sont en dehors de toutes les idées et de toutes les connaissances du médium ? Et qu'on veuille bien remarquer qu'il ne s'agit pas de réponses monosyllabiques, mais souvent de plusieurs pages écrites avec la plus étonnante rapidité, soit spontanément, soit sur un sujet déterminé ; sous la main du médium le plus étranger à la littérature, naissent quelquefois des poésies d'une sublimité et d'une pureté irréprochables, et que ne désavoueraient pas les meilleurs poètes humains ; ce qui ajoute encore à l'étrangeté de ces faits, c'est qu'ils se produisent partout et que les médiums se multiplient à l'infini. Ces faits sont-ils réels ou non ? A cela nous n'avons qu'une chose à répondre : voyez et observez ; les occasions ne vous manqueront pas ; mais surtout observez souvent, longtemps et selon les conditions voulues.

A l'évidence, que répondent les antagonistes ? Vous êtes, disent-ils, dupes du charlatanisme ou le jouet d'une illusion. Nous dirons d'abord qu'il faut écarter le mot charlatanisme là où il n'y a pas de profits ; les charlatans ne font pas leur métier gratis. Ce serait donc tout au plus une mystification. Mais par quelle étrange coïncidence ces mystificateurs se seraient-ils entendus d'un bout du monde à l'autre pour agir de même, produire les mêmes effets et donner sur les mêmes sujets et dans des langues diverses des réponses identiques, sinon quant aux mots, du moins quant au sens ? Comment des personnes graves, sérieuses, honorables, instruites se prêteraient-elles à de pareilles manoeuvres, et dans quel but ? Comment trouverait-on chez des enfants la patience et l'habileté nécessaires ? car si les médiums ne sont pas des instruments passifs, il leur faut une habileté et des connaissances incompatibles avec un certain âge et certaines positions sociales.

Alors on ajoute que, s'il n'y a pas supercherie, des deux côtés on peut être dupe d'une illusion. En bonne logique, la qualité des témoins est d'un certain poids ; or c'est ici le cas de demander si la doctrine spirite, qui compte aujourd'hui ses adhérents par milliers, ne les recrute que parmi les ignorants ? Les phénomènes sur lesquels elle s'appuie sont si extraordinaires que nous concevons le doute ; mais ce que l'on ne saurait admettre, c'est la prétention de certains incrédules au monopole du bon sens, et qui, sans respect pour les convenances ou la valeur morale de leurs adversaires, taxent sans façon d'ineptie tous ceux qui ne sont pas de leur avis. Aux yeux de toute personne judicieuse, l'opinion des gens éclairés qui ont longtemps vu, étudié et médité une chose, sera toujours, sinon une preuve, du moins une présomption en sa faveur, puisqu'elle a pu fixer l'attention d'hommes sérieux n'ayant ni un intérêt à propager une erreur, ni du temps à perdre à des futilités.