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— Jason est en camp d’été, annonça Astor. Nick traîne toute la journée à la maison à attendre que la puberté lui fasse pousser la moustache.

— Seigneur ! s’exclama Rita.

— Nicky est un petit con, souffla Astor. Il voulait que je baisse mon pantalon pour qu’il puisse voir.

Cody fouetta son yaourt glacé le transformant en crème glacée.

— Écoute, Rita, je suis désolée de te déranger en plein repas, dit Kathy.

— On vient de terminer. Je peux t’offrir un café ? proposa Rita.

— Oh, non, je n’en bois plus qu’une tasse par jour, répondit Kathy. Ce sont les ordres du docteur. Mais je viens au sujet de notre chien : je me demandais si vous aviez vu Fripon ? Cela fait deux jours qu’il a disparu et Nick se fait un sang d’encre.

— Moi, je ne l’ai pas vu. Attends que je demande aux enfants, répondit Rita.

Mais alors qu’elle se tournait vers nous, Cody me regarda, se leva sans un mot puis quitta la pièce. Astor se leva également.

— On l’a pas vu, dit-elle. Pas depuis qu’il a renversé la poubelle la semaine dernière.

Et elle sortit elle aussi. Ils avaient laissé leur dessert sur la table, alors qu’il en restait la moitié.

Rita les regarda s’en aller bouche bée, puis elle se tourna de nouveau vers sa voisine.

— Je suis désolée, Kathy. Personne ne l’a vu, apparemment. Mais on ouvrira l’œil, promis ! Je suis sûre qu’il va revenir. Dis à Nick de ne pas s’inquiéter. Elle continua à papoter une minute avec Kathy tandis que je considérais le yaourt glacé et m’étonnais de la scène qui venait de se dérouler sous mes yeux.

La porte d’entrée se referma et Rita vint se rasseoir devant son café tiède.

— Kathy est très gentille, déclara-t-elle. Mais ses garçons ne lui laissent pas une minute de répit. Elle est divorcée. Son ex a acheté une maison à Islamorada : il est avocat. Il vit là-bas, alors Kathy a dû élever les enfants toute seule et je trouve qu’elle n’est pas toujours très ferme. Elle travaille comme infirmière dans le cabinet d’un podologue du côté de l’université.

— Et quelle est sa pointure ? l’interrompis-je.

— Je parle comme une commère, c’est ça ? demanda Rita. Elle se mordit la lèvre. Pardon. C’est peut-être parce que je m’inquiète un peu… Je suis sûre que c’est… Elle secoua la tête et me regarda. Dexter, est-ce que tu as…

Je ne sus jamais la suite parce qu’à cet instant mon téléphone portable se mit à sonner.

— Excuse-moi, dis-je en m’approchant de la table près de l’entrée, là où je l’avais posé.

— Doakes vient d’appeler, m’annonça Deborah sans prendre la peine de me saluer. Le type à qui il a parlé est en train de s’enfuir. Doakes le suit pour voir où il va, mais il a besoin de notre renfort.

— Vite, mon cher Watson, il n’y a pas une minute à perdre répliquai-je. Mais Deborah n’était pas d’humeur littéraire.

— Je passe te prendre dans cinq minutes, dit-elle.

CHAPITRE XIX

Je quittai Rita après une brève explication et sortis attendre dehors. Deborah tint parole et cinq minutes et demie après son appel nous filions vers le nord, le long de Dixie Highway.

— Ils sont à Miami Beach, m’informa-t-elle. Doakes m’a dit qu’il était allé voir le mec, Oscar. Il lui a expliqué ce qui se passait. Oscar lui a demandé de le laisser un peu réfléchir. Doakes a dit d’accord, je t’appelle. Mais il s’est posté dans la rue pour surveiller la maison et, dix minutes plus tard, voilà que le mec est sorti de chez lui muni d’un sac de voyage et a sauté dans sa voiture.

— Pourquoi chercherait-il à s’enfuir maintenant ?

— Tu ne t’enfuirais pas si tu savais que Danco voulait ta peau ?

— Non, répondis-je, tout en imaginant avec un certain plaisir ce que je ferais si je me retrouvais nez à nez avec le Docteur. Je lui préparerais un piège et j’attendrais qu’il vienne. Et là…, pensai-je, sans en faire part à Deborah.

— Oui, bon, Oscar, ce n’est pas toi.

— Si peu de gens le sont… remarquai-je. Où est-ce qu’il va ? Elle fronça les sourcils et secoua la tête.

— Pour l’instant il a l’air de rouler sans but et Doakes est en train de le filer.

— Où est-ce qu’il pourrait nous conduire ? demandai-je.

Deborah secoua de nouveau la tête et doubla une vieille Cadillac décapotable pleine d’adolescents hystériques.

— On s’en fiche, dit-elle en remontant la bretelle qui menait à Palmetto Expressway le pied au plancher. Oscar est la meilleure piste qu’on ait. S’il essaie de quitter la région, on le cueille, mais tant qu’il reste dans les parages il faut qu’on le suive de près pour voir ce qui se passe.

— Très bien, c’est vraiment une excellente idée, mais que risque-t-il de se passer exactement ?

— Qu’est-ce que tu veux qu’on en sache, Dexter ? rétorqua-t-elle brusquement. Ce qu’on sait, c’est que ce type sera une cible, tôt ou tard. Et lui aussi le sait maintenant. Peut-être qu’il essaie juste de voir s’il est suivi avant de s’enfuir. Merde, dit-elle en donnant un coup de volant pour éviter un vieux camion à plateforme remplie de cageots de poulets. Il devait rouler à cinquante à l’heure, n’avait pas de feux arrière et trois hommes étaient assis sur le chargement, retenant leur chapeau cabossé d’une main et s’agrippant à la cargaison de l’autre. Deborah les gratifia d’un coup de sirène alors qu’elle les dépassait. Les trois hommes ne bronchèrent pas.

— Bref, dit-elle en redressant le volant avant d’accélérer de nouveau. Doakes nous veut du côté de Miami au cas où Oscar se montrerait un peu trop téméraire. On va rester en face et remonter Biscayne Boulevard.

C’était logique : tant qu’Oscar restait sur Miami Beach, il ne pouvait fuir dans aucune direction. S’il tentait d’emprunter à toute vitesse l’un des ponts ou de filer vers le nord après Haulover Park, puis de traverser, on était là pour le pincer.

A moins qu’il n’ait un hélicoptère planqué quelque part, il était coincé. Je laissai Deborah conduire en paix ; elle continua à foncer vers le nord et réussit à ne tuer personne.

Parvenus à l’aéroport, nous bifurquâmes vers l’est sur la 836. La circulation se fit un peu plus dense, et Deborah, très concentrée, se faufila adroitement entre les voitures. Je gardai mes pensées pour moi tandis qu’elle déployait ses années de pratique à conduire dans Miami et gagnait ce qui s’apparentait à une course suicide à cent à l’heure contre un millier de participants. Nous arrivâmes sans encombre à l’échangeur de l’I-95 et continuâmes jusqu’à Biscayne Boulevard. Je pris une profonde inspiration puis expirai doucement, tandis que Deborah se glissait dans la circulation du centre-ville et retrouvait une vitesse normale.

La radio grésilla et la voix de Doakes se fit entendre dans le haut-parleur.

— Morgan, quelle est votre position ? Deborah saisit le micro et répondit :

— Biscayne, devant le pont de MacArthur Causeway.

Il y eut un bref silence, puis Doakes reprit :

— Il s’est arrêté près du pont mobile de Venetian Causeway. Postez-vous de l’autre côté.

— Message reçu, répondit Deborah, et je ne pus m’empêcher d’observer :

— Je me sens très important tout à coup de t’entendre dire ça.

— Qu’est-ce que ça veut dire ? demanda-t-elle.

— Oh, rien, répondis-je.

Elle me lança un regard, son regard de flic sérieux, mais son visage était encore jeune et, l’espace d’un instant, il me sembla que nous étions redevenus gosses, assis dans la voiture de police de Harry en train de jouer aux gendarmes et aux voleurs sauf que, cette fois-ci, je jouais le rôle d’un gentil, une sensation des plus troublantes.