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— Nicolas, tu es insupportable ! Éteins cette lampe et dors ! Ou alors, tiens, donne-moi la lampe, je te la rendrai demain matin.

— Oh ! non... oh ! non, j’ai crié.

— Qu’il la garde, sa lampe ! a crié Papa, et qu’on ait un peu de paix, dans cette maison !

Alors, Maman a fait un gros soupir, elle est partie et moi je me suis mis sous ma couverture, et là, avec la lampe c’était chouette comme vous ne pouvez pas vous imaginer, et puis je me suis endormi.

Et quand Maman m’a réveillé la lampe était au fond du lit, elle était éteinte et elle ne voulait plus se rallumer !

— Bien sûr, a dit Maman. La pile est usée et c’est impossible de la remplacer. Enfin, tant pis, va faire ta toilette.

Et pendant que nous prenions le petit déjeuner, Papa m’a dit :

— Écoute, Nicolas, cesse de renifler. Que cela te serve de leçon : tu as utilisé l’argent que je t’avais donné pour acheter quelque chose dont tu n’avais pas besoin et qui s’est tout de suite cassé. Ça t’apprendra à être plus raisonnable.

Eh bien, ce soir, Papa et Maman vont être drôlement contents de voir comme j’ai été raisonnable. Parce qu’à l’école j’ai échangé ma lampe qui ne marche plus contre le chouette sifflet à roulette de Rufus, qui marche très bien.

La roulette

Geoffroy, qui a un papa drôlement riche qui lui achète tout ce qu’il veut, apporte tout le temps des choses terribles à l’école.

Aujourd’hui, il est venu avec une roulette dans son cartable, et il nous l’a montrée à la récré. Une roulette, c’est une petite roue avec des numéros peints dessus, et où il y a une bille blanche.

— On fait tourner la roue, nous a expliqué Geoffroy, et quand elle s’arrête, la bille se met en face d’un des numéros ; et si on a parié que c’est en face de ce numéro qu’elle allait s’arrêter, bing ! on a gagné à la roulette.

— Ça serait trop facile, a dit Rufus. Il y a sûrement un truc.

— Moi, j’ai vu comment on y joue dans un film de cow-boys, nous a dit Maixent. Mais la roulette était truquée, alors le jeune homme sortait son revolver, il tuait tous les ennemis, il sautait par la fenêtre pour monter sur son cheval et il partait au galop, tacatac, tacatac, tacatac !

— Ah ! je savais bien qu’il y avait un truc ! a dit Rufus.

— Imbécile, a dit Geoffroy, c’est pas parce que la roulette du film de cet imbécile de Maixent était truquée, que ma roulette est truquée aussi !

— Qui est un imbécile ? ont demandé Rufus et Maixent.

— Moi, j’ai vu qu’on jouait à la roulette dans une pièce à la télé, a dit Clotaire. Il y avait une nappe sur une table avec des numéros, et les gens mettaient des fiches sur les numéros, et ils s’énervaient drôlement quand ils les perdaient, leurs fiches.

— Oui, a dit Geoffroy, dans la boîte où il y avait ma roulette, il y avait aussi une nappe verte avec des numéros et des tas de fiches, mais ma mère n’a pas voulu que j’amène tout à l’école. Mais ça ne fait rien, on pourra jouer quand même.

Et Geoffroy nous a dit qu’on n’aurait qu’à parier sur des numéros, et que lui ferait tourner la roulette, et que le numéro qui sortirait gagnerait.

— Et avec quoi on va jouer, j’ai demandé, puisqu’on n’a pas de fiches ?

— Ben, a dit Geoffroy, on a tous des sous. Alors, on va jouer avec les sous, tant pis ; on fera comme si c’étaient des fiches. Celui qui gagne prend tous les sous des copains.

— Moi, a dit Alceste, qui mangeait sa deuxième tartine de la récré, mes sous, j’en ai besoin pour acheter un petit pain au chocolat, à la sortie.

— Ben justement, a dit Joachim, si tu gagnes les sous des copains, tu pourras acheter des tas de petits pains au chocolat.

— Ah ! oui ? a dit Eudes. Alors, parce que le gros a choisi par hasard un numéro, il va se payer des petits pains au chocolat avec mes fiches ? Jamais de la vie ! C’est pas du jeu, ça !

Et Alceste, qui n’aime pas qu’on l’appelle le gros, s’est drôlement fâché, et il a dit qu’il allait gagner tout l’argent d’Eudes et qu’il mangerait les petits pains devant lui, qu’il ne lui en donnerait pas et que ça le ferait bien rigoler, non mais sans blague.

— Bon, a dit Geoffroy, ceux qui veulent pas jouer, ils jouent pas, et puis voilà ! On ne va pas passer la récré à discuter ! Choisissez vos numéros !

On s’est tous accroupis autour de la roulette, on a mis nos sous par terre et on a choisi nos numéros. Moi, j’ai pris le 12, Alceste le 6, Clotaire le 0 Joachim le 20, Maixent le 5, Eudes le 25, Geoffroy le 36 et Rufus n’a rien voulu prendre parce qu’il a dit qu’il n’allait pas perdre ses sous à cause d’une roulette truquée.

— Oh la la ! Oh la la ! Ce qu’il m’énerve, celui-là ! a crié Geoffroy. Puisque je te dis qu’elle n’est pas truquée !

— Prouve-le, a dit Rufus.

— Allez, quoi ! a crié Alceste. On y va ?

Geoffroy a fait tourner la roulette et la petite bille blanche s’est arrêtée devant le numéro 24.

— Comment, le 24 ? a dit Alceste, qui est devenu tout rouge.

— Ah ! Je vous avais bien dit qu’elle était truquée, a dit Rufus. Personne ne gagne !

— Si, monsieur, a dit Eudes. Moi je gagne ! J’avais le numéro 25, et le 25 c’est le plus près du 24.

— Mais, où est-ce que tu as joué à la roulette, toi ? a crié Geoffroy. Tu as joué le 25 et si le 25 ne sort pas, tu as perdu et puis c’est tout ! J’ai bien l’honneur de vous saluer.

— Geoffroy a raison, a dit Alceste. Personne ne gagne et on recommence.

— Minute, a dit Geoffroy, minute. Quand personne ne gagne, c’est le patron de la roulette qui ramasse tout !

— A la télé, en tout cas, c’était comme ça, a dit Clotaire.

— On t’a pas sonné, a crié Alceste, on n’est pas à la télé, ici ! Si c’est pour jouer comme ça, je reprends ma fiche et puis j’ai bien l’honneur de vous saluer.

— T’as pas le droit, tu l’as perdue, a dit Geoffroy.

— Puisque c’est moi qui l’ai gagnée, a dit Eudes.

Alors, on s’est tous mis à discuter, mais on a vu que le Bouillon et M. Mouchabière, qui sont nos surveillants, nous regardaient de l’autre bout de la cour, alors on s’est mis d’accord.

— Allez, a dit Geoffroy, la première fois, c’était pour de rire. On recommence...

— Bon, a dit Rufus. Je prends le 24.

— Je croyais que tu ne voulais pas jouer parce qu’elle était truquée, ma roulette ? a demandé Geoffroy.

— Justement, a dit Rufus. Elle est truquée pour que ce soit le 24 qui sorte, tiens ! On l’a bien vu au dernier coup.

Geoffroy a regardé Rufus, il a mis un doigt sur son front et il a commencé à visser, et avec son autre main il a fait tourner la roulette. Et puis la bille s’est arrêtée devant le numéro 24, Geoffroy s’est arrêté de visser et il a ouvert des yeux tout ronds. Rufus, qui avait un gros sourire sur sa figure, allait ramasser les sous, mais Eudes l’a poussé.

— Non, monsieur, a dit Eudes, tu vas pas ramasser ces sous. Tu as triché.

— J’ai triché, moi ? a crié Rufus. Mauvais joueur, voilà ce que tu es ! J’ai joué le 24 et j’ai gagné !

— La roulette est truquée, c’est toi-même qui l’as dit, a crié Geoffroy. Elle doit pas s’arrêter deux fois de suite sur le même numéro.

Alors, là, ça a été terrible, parce que tout le monde s’est battu avec tout le monde, et le Bouillon est arrivé avec M. Mouchabière.

— Arrêtez ! Silence ! a crié le Bouillon. Ça faisait un moment que nous vous observions, M. Mouchabière et moi-même. Regardez-moi bien dans les yeux ! Qu’est-ce que vous manigancez ? Hmm ?

— Ben, on jouait à la roulette et ils trichent tous, a dit Rufus ; j’avais gagné, et...