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La maîtresse l’a regardé avec des yeux tout ronds. « Mais... mais, elle a dit, Georges, il ne faut pas dire des choses comme ça ! – Vous avez vu, mademoiselle ? Qu’est-ce que je vous disais ? » a dit Agnan. « Si tu ne veux pas rester en retenue, Agnan, a crié la maîtresse, je te prierai de garder tes réflexions pour toi ! » Agnan s’est mis à pleurer. « Vilain cafard ! » a crié quelqu’un, mais la maîtresse n’a pas su qui c’était, sinon, j’aurais été puni, alors, Agnan s’est roulé par terre en criant que personne ne l’aimait, que c’était affreux et qu’il allait mourir, et la maîtresse a dû sortir avec lui pour lui passer de l’eau sur la figure et le calmer.

Quand la maîtresse est revenue, avec Agnan, elle avait l’air fatiguée, mais heureusement, la cloche a sonné la fin de la classe. Avant de partir, la maîtresse a regardé le nouveau et lui a dit : « Je me demande ce que tes parents vont penser. – Vilain cafard », a répondu Djodjo en lui donnant la main.

La maîtresse avait tort de s’inquiéter, parce que les parents de Djodjo ont dû penser qu’il avait appris tout le français dont il avait besoin.

La preuve, c’est que Djodjo n’est plus revenu à l’école.

Le chouette bouquet

C’est l’anniversaire de ma maman et j’ai décidé de lui acheter un cadeau comme toutes les années depuis l’année dernière, parce qu’avant j’étais trop petit.

J’ai pris les sous qu’il y avait dans ma tirelire et il y en avait beaucoup, heureusement, parce que, par hasard, maman m’a donné de l’argent hier. Je savais le cadeau que je ferais à maman : des fleurs pour mettre dans le grand vase bleu du salon, un bouquet terrible, gros comme tout.

A l’école, j’étais drôlement impatient que la classe finisse pour pouvoir aller acheter mon cadeau. Pour ne pas perdre mes sous, j’avais ma main dans ma poche, tout le temps, même pour jouer au football à la récréation, mais, comme je ne joue pas gardien de but, ça n’avait pas d’importance. Le gardien de but c’était Alceste, un copain qui est très gros et qui aime bien manger. « Qu’est-ce que tu as à courir avec une seule main ? » il m’a demandé. Quand je lui ai expliqué que c’était parce que j’allais acheter des fleurs pour ma maman, il m’a dit que lui, il aurait préféré quelque chose à manger, un gâteau, des bonbons ou du boudin blanc, mais, comme le cadeau ce n’était pas pour lui, je n’ai pas fait attention et je lui ai mis un but. On a gagné par 44 à 32.

Quand nous sommes sortis de l’école, Alceste m’a accompagné chez le fleuriste en mangeant la moitié du petit pain au chocolat qui lui restait de la classe de grammaire. Nous sommes entrés dans le magasin, j’ai mis tous mes sous sur le comptoir et j’ai dit à la dame que je voulais un très gros bouquet de fleurs pour ma maman, mais pas des bégonias, parce qu’il y en a des tas dans notre jardin et ce n’est pas la peine d’aller en acheter ailleurs. « Nous voudrions quelque chose de bien », a dit Alceste et il est allé fourrer son nez dans les fleurs qui étaient dans la vitrine, pour voir si ça sentait bon. La dame a compté mes sous et elle m’a dit qu’elle ne pourrait pas me donner beaucoup, beaucoup de fleurs. Comme j’avais l’air très embêté, la dame m’a regardé, elle a réfléchi un peu, elle m’a dit que j’étais un mignon petit garçon, elle m’a donné des petites tapes sur la tête et puis elle m’a dit qu’elle allait arranger ça. La dame a choisi des fleurs à droite et à gauche et puis elle a mis des tas de feuilles vertes et ça, ça a plu à Alceste, parce qu’il disait que ces feuilles ressemblaient aux légumes qu’on met dans le pot-au-feu. Le bouquet était très chouette et très gros, la dame l’a enveloppé dans un papier transparent qui faisait du bruit et elle m’a dit de faire attention en le portant. Comme J’avais mon bouquet et qu’Alceste avait fini de sentir les fleurs, j’ai dit merci à la dame et nous sommes sortis.

J’étais tout content avec mon bouquet, quand nous avons rencontré Geoffroy, Clotaire et Rufus, trois copains de l’école. « Regardez Nicolas, a dit Geoffroy, ce qu’il peut avoir l’air andouille avec ses fleurs ! – Tu as de la veine que j’aie des fleurs, je lui ai dit, sinon, tu recevrais une gifle ! Donne-les-moi, tes fleurs, m’a dit Alceste, je veux bien les tenir pendant que tu gifles Geoffroy. » Alors, moi, j’ai donné le bouquet à Alceste et Geoffroy m’a donné une gifle. On s’est battus et puis j’ai dit qu’il se faisait tard, alors on s’est arrêtés. Mais j’ai dû rester encore un peu, parce que Clotaire a dit : « Regardez Alceste, maintenant c’est lui qui a l’air d’une andouille, avec les fleurs ! » Alors, Alceste lui a donné un grand coup sur la tête, avec le bouquet.

« Mes fleurs ! j’ai crié. Vous allez casser mes fleurs ! » C’est vrai, aussi ! Alceste, il donnait des tas de coups avec mon bouquet et les fleurs volaient de tous les côtés parce que le papier s’était déchiré et Clotaire criait « Ça ne me fait pas mal, ça ne me fait pas mal ! »

Quand Alceste s’est arrêté, Clotaire avait la tête couverte par les feuilles vertes du bouquet et c’est vrai que ça ressemblait drôlement à un pot-au-feu. Moi, j’ai commencé à ramasser mes fleurs et je leur disais, à mes copains, qu’ils étaient méchants. « C’est vrai, a dit Rufus, c’est pas chouette ce que vous avez fait aux fleurs de Nicolas ! – Toi, on ne t’a pas sonné ! » a répondu Geoffroy et ils ont commencé à se donner des gifles. Alceste, lui, est parti de son côté, parce que la tête de Clotaire lui avait donné faim et il ne voulait pas être en retard pour le dîner.

Moi, je suis parti avec mes fleurs. Il en manquait, il n’y avait plus de légumes ni de papier, mais ça faisait encore un beau bouquet, et puis, plus loin, j’ai rencontré Eudes.

« Tu fais une partie de billes ? » il m’a demandé, Eudes. « Je ne peux pas, je lui ai répondu, il faut que je rentre chez moi donner ces fleurs à ma maman. » Mais Eudes m’a dit qu’il était encore de bonne heure et puis moi, j’aime bien jouer aux billes, je joue très bien, je vise et bing ! presque toujours, je gagne. Alors, j’ai rangé les fleurs sur le trottoir et j’ai commencé à jouer avec Eudes et c’est chouette de jouer aux billes avec Eudes, parce qu’il perd souvent. L’ennui, c’est que quand il perd il n’est pas content et il m’a dit que je trichais et moi je lui ai dit qu’il était un menteur, alors, il m’a poussé et je suis tombé assis sur le bouquet et ça ne leur a pas fait du bien aux fleurs. « Je le dirai à maman, ce que tu as fait à ses fleurs », je lui ai dit à Eudes et Eudes était bien embêté. Alors, il m’a aidé à choisir les fleurs qui étaient les moins écrasées. Moi je l’aime bien Eudes, c’est un bon copain.

Je me suis remis à marcher, mon bouquet, il n’était plus bien gros, mais les fleurs qui restaient, ça allait ; une fleur était un peu écrasée, mais les deux autres étaient très bien. Et alors, j’ai vu arriver Joachim sur son vélo. Joachim, c’est un copain d’école qui a un vélo.

Alors, là, j’ai bien décidé de ne pas me battre, parce que si je continuais à me disputer avec tous les copains que je rencontrais dans la rue, bientôt, il ne me resterait plus de fleurs pour donner à ma maman. Et puis, après tout, ça ne les regarde pas les copains, si je veux offrir des fleurs à ma maman, c’est mon droit et puis moi, je crois qu’ils sont jaloux, tout simplement, parce que ma maman va être très contente et elle va me donner un bon dessert et elle va dire que je suis très gentil et puis qu’est-ce qu’ils ont tous à me taquiner ?