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L'ingénieur ordonna la phase suivante :

— Orientation des miroirs.

Les panneaux réfléchissants s'ajustèrent pour capter au mieux la lumière et la canaliser. En voyant l'intensité d'éclairage s'élever considérablement sur les écrans, Karen eut un frisson et passa son bras autour de celui de Benjamin.

L'opérateur demanda au micro :

— Monsieur, pouvons-nous procéder ?

Denker répondit d'un hochement de tête sans aucune ambiguïté. Il enfila son masque antique ; Wheelan fit de même.

Les ingénieurs étaient rivés aux écrans de contrôle. L'opérateur enclencha la séquence et annonça :

— Alignement des pyramides.

Les reliques de bronze pivotèrent et s'illuminèrent. Les quatre rayons convergèrent sur la météorite. Quelques longues secondes s'écoulèrent sans que rien ne se passe.

Tout à coup, la caméra thermique réagit. La température se mit à grimper par paliers sans cesse plus marqués.

L'un des ingénieurs se précipita au micro :

— Monsieur, nous avons une réaction plus puissante que prévu, devons-nous interrompre ?

La météorite devint rouge, puis très vite, incandescente. Elle brillait de l'intérieur. Sur les écrans, on la vit soudain commencer à vibrer sur son socle. Elle paraissait presque vivante.

— Monsieur, le risque de fission est réel. Devons-nous stopper ?

Denker ne réagissait pas. Il demeurait immobile à quelques pas de la météorite qui les éclairait, lui et Wheelan, d'une lueur flamboyante. À travers la clarté qui brouillait la vue, Ben crut voir son professeur faire un signe de croix.

Dans la salle de contrôle, les appareils s'affolaient. Les ingénieurs, paniqués, hésitaient encore. L'un d'eux se rua enfin sur le module de rotation des pyramides pour les placer en position de sécurité et interrompre le flux, mais avant que Ben ait pu l'empêcher de l'atteindre, une incroyable lumière blanche emplit tous les écrans, débordant les capteurs et surpassant toutes les limites de mesure.

Dans un réflexe de sécurité, Ben entraîna Karen à terre et se coucha sur elle pour la protéger. Une puissante déflagration ébranla toute la structure, un choc sourd, plus violent qu'une énorme bombe, un tonnerre absolu qui fit trembler le sol et enfonça partiellement le volet blindé de la fente d'observation. Karen hurla.

— Refermez le toit ! s'époumona l'opérateur alors que les appareils en surtension disjonctaient les uns après les autres en projetant des gerbes d'étincelles.

Les écrans étaient hors service. Plus aucune image ne parvenait de l'intérieur de l'enceinte.

Alors que les sirènes d'alerte se déclenchaient, les occupants du poste de contrôle, hagards, étaient sous le choc. Aucune procédure ne prévoyait une telle violence. Face au désastre, les gardes ne demandèrent pas leur reste. Ils prirent la fuite pendant que les ingénieurs et l'opérateur tentaient de maîtriser plusieurs débuts d'incendie.

Le regard fixe, Karen semblait hermétique à cette fin du monde. Elle saignait du nez. Ben la souleva dans ses bras et quitta la salle aussi vite qu'il le put.

85

Dans le couloir des cellules, Ben et Karen s'arrêtèrent devant la seule dont la porte était fermée.

— L'agent venu livrer la pyramide est sûrement enfermé là-dedans, commenta Ben.

Karen reprit son souffle en chancelant. Voyant qu'elle ne réagissait pas, il insista :

— Pourquoi n'ouvrez-vous pas ce verrou ? Vous ne voulez pas le libérer ?

— Peux pas, répondit-elle d'une voix pâteuse. J'arrive à peine à tenir debout. Depuis l'explosion, mes oreilles sifflent et j'ai l'impression d'être saoule.

Le fait est que, mollement appuyée contre le mur, l'agent Holt en donnait l'apparence. Au loin, les sirènes d'alerte retentissaient toujours et dans la débâcle, on entendait le rotor de l'hélico.

— Alors dites-lui au moins quelque chose à travers la porte, que ce type sache que c'est nous. Je n'ai vraiment pas envie qu'il me saute à la gorge.

Elle glissa le long du mur et déclara avec une diction approximative :

— Ici l'agent Holt, on vient vous délivrer !

Puis à voix basse, elle ajouta :

— J'allais oublier, on a un code de reconnaissance…

Elle hurla :

— Tequila vermouth !

Aucune réponse. Horwood lâcha :

— Affligeant.

— C'est pas moi qu'ai choisi.

Horwood repoussa les verrous.

— C'est bizarre, s'étonna Karen, il aurait dû répondre « cul sec »…

À peine Ben avait-il déverrouillé la porte qu'elle s'ouvrit violemment, le projetant contre le mur d'en face. Un homme fit irruption, prêt à en découdre, armé d'un pied de lit dans chaque main. En voyant Ben affalé sur le sol, il s'arrêta net.

— Horwood ?

Benjamin écarquilla les yeux.

— West ?

Alloa l'aida à se relever et salua Holt.

— Excusez-moi pour la porte dans la tronche, mais ce sont de vrais fondus ici.

Karen éclata de rire comme une démente.

— Fondus, c'est le mot !

— Faites pas attention, elle n'est pas dans son état normal. On a eu des journées fatigantes ces derniers temps.

— C'était quoi, l'explosion de tout à l'heure ? Les troupes de Sa Gracieuse Majesté ont enfin débarqué ?

— Pas encore, mais elles ne devraient pas tarder. Un satellite aura forcément repéré la déflagration.

— Où sommes-nous ?

— Sur une île nazie, quelque part dans les Shetland.

West fit une drôle de tête. Horwood soupira :

— Je me doute que ça a l'air bizarre, mais c'est la vérité. On vous expliquera. Mais au fait, que fabriquez-vous là ? Est-ce vous qui leur avez livré la pyramide ?

— On était en vacances avec Fanny. Tout se passait à merveille, mais elle a voulu vous passer un coup de fil pour savoir comment avançaient vos recherches.

— On a fait des progrès à tout péter. Littéralement.

— Super. En attendant, elle a trouvé que le directeur donnait de vos nouvelles de façon trop évasive. Vous connaissez Fanny, elle a insisté au point qu'il a fini par lui lâcher que vous et Karen aviez disparu. Elle est devenue folle. Elle l'a cuisiné jusqu'à comprendre que vos ravisseurs menaçaient de vous exécuter si on ne leur remettait pas un machin sacré avec un cristal dedans.

— Boum ! ricana Karen, qui s'affaissait de plus en plus comme une ivrogne le long du mur.

Ben l'aida à s'asseoir par terre pendant que West continuait à raconter :

— Quand j'ai su que vous étiez en danger, j'ai proposé de rentrer pour vous aider. Après ce qu'on a vécu, je ne pouvais pas vous abandonner.

— C'est vraiment très gentil. Vous m'en voyez touché, mais vous n'auriez pas dû. Surtout avec le bébé.

— Quel bébé ?

— Le bébé qu'attend Fanny.

West fit à nouveau une drôle de tête, mais pas la même. En tirant sur la jambe du pantalon de Benjamin, Karen lui souffla à voix basse :

— Hey, je crois qu'il n'était pas au courant. Techniquement, ça s'appelle une gaffe.

West serra les poings.

— Comment savez-vous que ma femme est enceinte alors que je l'ignore ?

Ben sentit le poids de sa fatigue s'abattre d'un coup sur ses épaules.

— C'est une longue histoire.

— Aussi compliquée que celle de l'île nazie ?

— Pas tout à fait, n'exagérons rien.

West montait en pression à vue d'œil.

— Benjamin, d'homme à homme, c'est qui le père ?