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Le cheval

Paroles: Jacques Brel. Musique: Gérard Jouannest 1967

autres interprètes: Les Croquants (1999)

J'étais vraiment, j'étais bien plus heureux Bien plus heureux avant, quand j'étais ch’val Que je traînais, Madame, votre landau Jolie Madame, dans les rues de Bordeaux Mais tu as voulu que je sois ton amant Tu as même voulu que je quitte ma jument Je n'étais qu'un cheval oui, oui, mais tu en as profité Par amour pour toi, je me suis déjumenté. Et depuis toutes les nuits Dans ton lit de satin blanc Je regrette mon écurie Mon écurie et ma jument
J'étais vraiment, vraiment bien plus heureux Bien plus heureux avant, quand j'étais ch’val Que tu t’foutais, Madame, la gueule par terre Jolie Madame, quand tu forçais le cerf Mais tu as voulu qu’j'apprenne les bonnes manières Tu as voulu qu’je marche sur les pattes de derrière Je n'étais qu'un ch’val oui, oui, mais tu m'as couillonné, hein Par amour pour toi je me suis derrièrisé Et depuis, toutes les nuits Quand nous dansons le tango Je regrette mon écurie Mon écurie et mon galop
J'étais vraiment, vraiment bien plus heureux Bien plus heureux avant, quand j'étais ch’val Que je te promenais, Madame, sur mon dos Jolie Madame, en forêt d’Fontainebleau Mais tu as voulu que je sois ton banquier Tu as même voulu qu’je me mette à chanter Je n'étais qu'un ch’val oui, oui mais tu en as abusé Par amour pour toi, je me suis variété Et depuis toutes les nuits Quand je chante "Ne me quitte pas" Je regrette mon écurie Et mes silences d'autrefois
Et puis et puis, tu es partie radicale Avec un zèbre, un zèbre mal rayé Le jour, Madame, où je t'ai refusé D'apprendre à monter à cheval Mais tu m'avais pris ma jument Mon silence, mes sabots Mon écurie, mon galop Tu ne m'as laissé que mes dents Et voilà pourquoi je cours, je cours Je cours le monde en hennissant Me voyant refuser l'amour Par les femmes et par les juments
J'étais vraiment, vraiment bien plus heureux Bien plus heureux avant quand j'étais ch’val Que je promenais Madame, votre landau Quand j'étais ch’val et quand tu étais chameau!

Le colonel

Paroles: Jacques Brel. Musique: G. Wagenheim 1958

Colonel, faut-il Puisque se lève le jour Faire battre tous les tambours Réveiller tous les pandoures? Colonel, faut-il Faire sonner tous les clairons Rassembler les escadrons? Colonel, colonel, nous attendons
Le colonel s'ennuie. Il effeuille une fleur Et rêve à son amie Qui lui a pris son cœur. Son amie est si douce et belle Dans sa robe au soleil Que chaque jour passé près d'elle Se meuble de merveilles.
Colonel, faut-il Puisque voilà l'ennemi Faire tirer notre artillerie Disposer notre infanterie? Colonel, faut-il Charger tous comme des fous Ou partir à pas de loup? Colonel, colonel, dites-le nous
Le colonel s'ennuie. Il effeuille une fleur Et rêve à son amie Qui lui a pris son cœur. Ses baisers doux comme velours Tendrement, ont conduit A l'état-major de l'amour Le colonel ravi
Colonel, faut-il, Puisque vous êtes blessé Faut-il donc nous occuper De vous trouver un abbé? Colonel, faut-il Puisqu'est mort l'apothicaire Chercher le vétérinaire? Colonel, colonel, que faut-il faire?
Le colonel s'ennuie. Il effeuille une fleur Et rêve à son amie Qui lui a pris son cœur. Il la voit et lui tend les bras Il la voit et l'appelle Et c'est en lui parlant tout bas Qu'il entre dans le ciel
Ce colonel qui meurt Et qui meurt de chagrin Blessé d'une fille dans le cœur Ce colonel loin de sa belle C'est mon cœur loin du tien C'est mon cœur loin du tien

Le dernier repas

Paroles et Musique: Jacques Brel 1964

A mon dernier repas Je veux voir mes frères Et mes chiens et mes chats Et le bord de la mer A mon dernier repas Je veux voir mes voisins Et puis quelques Chinois En guise de cousins Et je veux qu'on y boive En plus du vin de messe De ce vin si joli Qu'on buvait en Arbois Je veux qu'on y dévore Après quelques soutanes Une poule faisane Venue du Périgord Puis je veux qu'on m'emmène En haut de ma colline Voir les arbres dormir En refermant leurs bras Et puis, je veux encore Lancer des pierres au ciel En criant: "Dieu est mort!" Une dernière fois
A mon dernier repas Je veux voir mon âne Mes poules et mes oies Mes vaches et mes femmes A mon dernier repas Je veux voir ces drôlesses Dont je fus maître et roi Ou qui furent mes maîtresses Quand j'aurai dans la panse De quoi noyer la Terre Je briserai mon verre Pour faire le silence Et chanterai à tue-tête A la mort qui s'avance Les paillardes romances Qui font peur aux nonnettes Puis je veux qu'on m'emmène En haut de ma colline Voir le soir qui chemine Lentement vers la plaine Et là, debout encore J'insulterai les bourgeois Sans crainte et sans remords Une dernière fois
Après mon dernier repas {x2} Je veux que l'on s'en aille Qu'on finisse ripaille Ailleurs que sous mon toit Après mon dernier repas Je veux que l'on m'installe Assis seul comme un roi Accueillant ses vestales Dans ma pipe, je brûlerai Mes souvenirs d'enfance Mes rêves inachevés Mes restes d'espérance Et je ne garderai Pour habiller mon âme Que l'idée d'un rosier Et qu'un prénom de femme Puis je regarderai Le haut de ma colline Qui danse, qui se devine Qui finit par sombrer Et dans l'odeur des fleurs Qui bientôt s'éteindra Je sais que j'aurai peur Une dernière fois.