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— Non, dis-je.

— Non ?

— Non. Je ne veux pas être mêlé à un truc pareil.

— Ce n’est pas facile de te rendre heureux, Jud. Tu ne veux pas baiser l’impératrice Théodora, tu ne veux pas coucher avec Pulchérie Ducas, tu… hé, tu ne vas pas me dire que tu ne veux pas non plus d’Eudocie ?

— Cela ne me dérange pas de coucher avec l’une de tes ancêtres, lui répondis-je, en souriant. Cela ne me dérangerait même pas de donner un bébé à Eudocie. Que dirais-tu s’il se révélait que je suis ton multi-arrière-arrière-grand-père ?

— Ce n’est pas possible, dit Metaxas.

— Et pourquoi pas ?

— Parce qu’Eudocie est restée célibataire et sans enfant jusqu’en 1109. Ensuite, elle a épousé Basile Stratocius et a donné naissance à sept fils et trois filles durant les quinze années qui ont suivi, un des enfants étant mon ancêtre. Mon Dieu, comme elle est devenue grosse !

— Tout cela peut être changé, lui ai-je rappelé.

— De la merde, oui ! répliqua Metaxas. Tu crois peut-être que je ne surveille pas ma lignée ? Tu crois que j’hésiterais à t’effacer de l’histoire si je te prenais à altérer le mariage d’Eudocie ? Elle n’aura pas d’enfant avant que Basile Stratocius l’engrosse, c’est comme ça. Mais elle est à toi pour ce soir.

Et elle le fut. Me donnant la plus grande preuve d’hospitalité selon ses critères, Metaxas envoya son aïeule Eudocie dans ma chambre. Son corps souple et mince fut un peu petit pour moi ; ses petits seins durs ne remplissaient pas mes mains. Mais c’était une tigresse. Elle était vibrante d’énergie et de passion, elle grimpa sur moi et, en une vingtaine de rapides rotations des hanches, elle se balança jusqu’à l’orgasme, et ce ne fut que le début. Elle ne me laissa pas m’endormir avant l’aube.

Et dans mes rêves, je vis Metaxas m’escorter jusqu’au palais des Ducas, et me présenter mon multi-arrière-grand-père Léon, qui me déclara d’une voix tranquille : « Voici ma femme Pulchérie », et dans mes songes, il me sembla que c’était la plus jolie femme que j’eusse jamais vue.

37.

En tant que Guide, j’eus mes premiers ennuis lors de la tournée suivante. Comme j’étais trop fier pour demander l’aide de la Patrouille Temporelle, je me suis empêtré dans le paradoxe de la Duplication et j’ai aussi goûté au paradoxe du Déplacement Transitoire. Mais je pense m’en être assez bien sorti.

J’avais emmené neuf touristes assister à l’arrivée de la première croisade à Byzance quand les ennuis commencèrent.

— En 1095, dis-je à mes clients, le pape Urbain II a lancé un appel pour libérer la Terre sainte du joug des Sarrasins. Très vite, les chevaliers européens se sont enrôlés dans la croisade. Parmi ceux qui approuvaient une telle guerre de libération se trouvait l’empereur Alexis de Byzance, qui voyait dans cette croisade un moyen de reconquérir les territoires du Proche-Orient que Byzance avait dû abandonner aux Turcs et aux Arabes. Alexis envoya un mot disant qu’il serait tout à fait d’accord si quelques centaines de chevaliers expérimentés venaient l’aider à repousser les infidèles. Mais il en a reçu beaucoup plus que prévu, comme nous allons le voir dans un moment, en 1096.

Nous avons sauté jusqu’au 1er août 1096.

Après avoir escaladé les remparts de Constantinople, nous avons regardé la campagne environnante et nous nous sommes aperçus qu’elle était couverte de troupes : pas des chevaliers en cottes de mailles, mais un ramassis de paysans vêtus de haillons.

— C’est la croisade populaire, dis-je. Pendant que les soldats de métier préparaient l’itinéraire de leur marche, un petit illuminé puant et décharné nommé Pierre l’Ermite rassembla des milliers de pauvres et de fermiers et les conduisit à travers l’Europe jusqu’à Byzance. Ils volèrent et pillèrent tout le long du chemin, saccagèrent la récolte de la moitié de l’Europe et brûlèrent Belgrade à cause d’un différend avec les administrateurs byzantins. Mais trente mille d’entre eux parvinrent finalement ici.

— Lequel est Pierre l’Ermite ? me demanda le plus turbulent des membres du groupe, une femme de Des Moines nommée Marge Hefferin, épanouie et diplômée, environ la quarantaine.

Je vérifiai l’heure.

— Vous le verrez dans une minute et demie. Alexis a envoyé plusieurs de ses dignitaires pour inviter Pierre à la cour. Il veut que Pierre et sa bande restent à Constantinople jusqu’à l’arrivée des chevaliers et des barons, car ces gens se feraient massacrer par les Turcs s’ils s’enfonçaient en Asie Mineure sans une escorte militaire. Regardez : voilà Pierre.

Deux grands personnages byzantins très maniérés sortirent de la foule, retenant visiblement leur souffle et désirant sans doute se boucher le nez. Entre eux marchait un petit homme mal soigné, pieds nus, en haillons, sale, le menton saillant, les yeux brillants et le visage grêlé.

— Pierre l’Ermite, dis-je. Il va rencontrer l’empereur.

Nous avons sauté de trois jours. La croisade populaire était entrée dans la ville et faisait subir bien des dommages à la cité d’Alexis. Une bonne partie des maisons de la ville étaient en flammes. Dix croisés se tenaient sur le toit d’une des églises, arrachant les plaques de plomb pour les revendre. Une femme byzantine de haute naissance sortit de Sainte-Sophie et fut déshabillée puis violée sous nos yeux par quelques-uns des pieux pèlerins conduits par Pierre.

— Alexis a fait un mauvais calcul en laissant pénétrer cette racaille dans la ville, dis-je. Il tente maintenant de s’arranger pour les conduire de l’autre côté du Bosphore, en leur offrant un passage gratuit jusqu’en Asie. Ils commenceront à partir le 6 avril. Les croisés massacreront d’abord les colonies byzantines installées à l’ouest de l’Asie Mineure ; puis ils attaqueront les Turcs et seront pratiquement exterminés. Si nous avions le temps, je vous emmènerais en 1097, de l’autre côté pour voir les montagnes d’ossements qui bordent leur route. C’est tout ce qui reste des gens de la croisade populaire. Mais pendant ce temps, les professionnels sont en marche, allons les voir.

J’ai précisé à mes clients qu’il y avait quatre armées de croisés : l’armée de Raymond de Toulouse, l’armée du duc Robert de Normandie, celle de Bohémond et de Tancrède, et celle menée par Godefroi de Bouillon, Eustache de Boulogne et Baudouin de Lorraine. Certains de mes clients avaient déjà quelques connaissances de l’histoire des croisades et hochèrent la tête en entendant certains noms.

Nous avons sauté jusqu’à la dernière semaine de 1096.

— Alexis, dis-je, a retenu la leçon infligée par la croisade populaire. Il ne tient pas à ce que les vrais croisés restent longtemps à Constantinople. Ils doivent tous passer à Byzance pour se rendre en Terre sainte, mais il va les faire traverser en vitesse, et il demandera à leurs chefs de lui prêter serment d’allégeance avant de les recevoir.

Nous avons regardé l’armée de Godefroi de Bouillon planter ses tentes devant les murs de Constantinople. Nous avons vu les envoyés faire la navette, Alexis demandant le serment d’allégeance, Godefroi refusant. Je couvris habilement quatre mois en moins d’une heure, montrant comment la méfiance et l’hostilité grandissaient entre les chrétiens de la croisade et les chrétiens de Byzance, qui étaient censés collaborer à la libération de la Terre sainte. Godefroi refusait toujours de jurer allégeance ; Alexis ne gardait pas seulement les croisés en dehors des murs de Constantinople, il avait maintenant instauré le blocus de leur camp, espérant les affamer pour qu’ils s’en aillent ; Baudouin de Lorraine se mit à lancer des raids sur les faubourgs ; Godefroi captura un peloton de soldats byzantins et les fit mettre à mort près des murs de la ville. Et le 2 avril, les croisés mirent le siège devant Constantinople.