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— Nous avons rencontré quelques agents de cette clique, déclara Geary. J’en ai deux en détention. »

Rione lui décocha un regard aigu. « Et personne n’est intervenu pour exiger leur relaxe ?

— Ils ne sont pas censés exister, visiblement. De sorte que nul ne les a réclamés ni même ne consent à admettre leur existence.

— Ça doit poser un rude dilemme à quelqu’un. » Rione eut un rire âpre. « Qu’allez-vous faire, amiral ? Continuer de vous plier aux ordres comme un bon petit soldat ?

— C’est cela ou remettre ma démission, dit Geary. Mais, jusque-là, les ordres se font plutôt rares. Je n’ai aucune certitude à cet égard, mais j’ai l’impression que, s’agissant des vaisseaux obscurs, le gouvernement s’est refermé comme une huître. Il refuse de reconnaître qu’il a construit les vaisseaux obscurs, que ceux-ci sont devenus fous, que la flotte dont je dispose est moins puissante que la force ennemie. Il n’élève sans doute pas d’obstacles, ne m’interdit pas de faire le nécessaire pour les empêcher de nuire, mais il a l’air d’espérer que je m’y attelle dans le seul cadre de mes ordres conventionnels et de la défense normale de l’Alliance. »

Rione sourit. « N’est-il pas étonnant que tant de puissants se retrouvent incapables de réagir quand ils sont confrontés à l’adversité ? Qu’ils se déclarent subitement impotents ? Vous allez donc arrêter les vaisseaux obscurs. Comment ? »

Au tour de Geary de hausser les épaules. « Vous venez d’avouer que vous aviez écouté la conférence.

— Oui. Une base secrète. Apparemment hors d’atteinte. » Rione réfléchit. « Je dois admettre que votre plan est meilleur que le mien. Je sais que je finirai par retrouver mon mari et que je ferai payer les responsables, mais, quant à la manière précise dont je devrai m’y prendre, je suis complètement perdue. » Elle regarda autour d’elle. « Vous ne gardiez pas du vin, naguère, dans cette cabine ?

— Pas pour le moment. » Geary l’observa longuement, le menton en appui sur ses mains entrelacées, puis il décida de se confier entièrement à elle. « Que savez-vous d’Unité Suppléante ? »

Rione resta coite un instant puis coula un regard vif dans sa direction. « J’ai d’abord cru à un mythe, mais certains programmes et autres dépenses classifiées dont j’ai eu connaissance pendant la guerre m’ont amenée à reconsidérer la question.

— On ne s’en est jamais ouvert à vous ?

— À moi ? J’étais peut-être sénatrice de l’Alliance, co-présidente de la République de Callas et brièvement membre du Grand Conseil, mais aussi la citoyenne d’une puissance alliée, pas de l’Alliance. On ne m’informait pas officiellement de certains projets, mais j’étais au courant malgré tout. De tout ce qu’on m’a caché et que je n’ai jamais découvert de mon côté, je n’ai aucune idée. Êtes-vous en train de me dire que vous avez réellement trouvé Unité Suppléante ?

— Nous croyons savoir où elle est et pourquoi personne ne l’a jamais découverte, mais pas tout ce qui s’y trouve. Toute suggestion de votre part nous serait bien utile », ajouta-t-il.

Rione s’accorda une minute de réflexion, le regard perdu. « Sans doute de quoi permettre au gouvernement et à l’armée de continuer à fonctionner si d’aventure Unité tombait aux mains des Syndics. Quoi qu’il en soit, cette légende court depuis longtemps. Mais quel que soit le volume des effectifs prévus en cas de malheur, il ne peut pas être très élevé de façon régulière. Si des masses de gens devaient être acheminés et rapatriés par navette, on ne pourrait pas garder très longtemps le secret.

— Une gestion par équipage restreint ?

— C’est ce que je crois.

— Il m’est venu à l’idée qu’en dehors des vaisseaux obscurs d’autres choses, d’autres gens pouvaient aussi se cacher à Unité Suppléante », lâcha Geary.

Rione inspira lentement et profondément, seule réaction visible à cette annonce. « Des gens dont la présence ailleurs pourrait poser des problèmes ? Très perspicace de votre part, amiral. C’est probablement là qu’est mon mari. Le seul endroit où je ne l’ai pas cherché, puisque j’ignorais son existence.

— Nous croyons que l’Invincible s’y trouve également. Lui aussi a disparu sans laisser de traces.

— Le cuirassé extraterrestre ? Un objet aussi massif serait très, très difficile à dissimuler. Bon, dois-je vous supplier ? Où est-ce ?

— Dans un système stellaire binaire. Pas très loin d’ici en termes de distances interstellaires. »

Elle soutint son regard et laissa échapper un petit rire. « Oh, très futé. Comment l’avez-vous deviné ?

— Les Danseurs ont pratiquement dessiné une cible autour. À notre intention.

— Je leur en dois une. » Rione lui adressa un sourire conquérant. « Vous y allez ?

— Nous y allons. Pour détruire la base des vaisseaux obscurs.

— Et comment comptez-vous justifier une attaque d’Unité Suppléante, Black Jack ? »

Geary écarta les bras. « Autant que nous puissions en juger, Unité Suppléante est occupée et utilisée par une force hostile. Le seul moyen de la sauver…

— … est de la détruire ? » Rione sourit de nouveau. « Permettez-moi de vous accompagner et de vous assister dans cette tâche. »

Il lui retourna son sourire. « Vous m’accompagneriez que je le veuille ou non, n’est-ce pas ?

— Je trouverais un moyen, en effet.

— En ce cas, je préfère vous savoir officiellement présente afin de pouvoir vous tenir à l’œil. J’informerai sa commandante de votre retour à bord de l’Indomptable et du fait qu’il vous faut une cabine.

— Elle sera sûrement ravie de l’apprendre.

— En fait, elle s’inquiétait pour vous et votre époux », répondit Geary.

Rione fit la moue et détourna le regard. « En dépit de tout ?

— Tanya ne vous aime pas et ne vous fait pas entièrement confiance, mais elle déteste qu’on fasse du mal aux gens.

— Sauf quand elle y pourvoit elle-même, n’est-ce pas ? Avec un gros canon. » Rione poussa un soupir. « Je suis une garce éhontée. Je manipule les gens. Je vois mal pourquoi quelqu’un se soucierait de ce qui m’arrive.

— Vous avez quelques qualités qui vous sauvent. Je sais que vous méritez mieux que ce que l’Alliance vous a réservé jusqu’ici. Et j’entends bien faire mon possible pour redresser la situation.

— L’Alliance… L’Alliance est bien davantage que les gens qui prétendent représenter ses intérêts. Je vais m’employer moi aussi à rectifier certaines choses, amiral. Contentez-vous de me conduire là où je trouverai mon mari et où je serai à portée de certains de ceux qui se sont octroyé le droit de jouer au démiurge avec son existence et la mienne.

— Je ferai de mon mieux, promit Geary. Si vous disposiez d’informateurs qui pourraient nous aider à découvrir le moyen d’accéder au probable portail de l’hypernet d’Unité Suppléante, ça nous avancerait beaucoup.

— Je ferai tout mon possible. » Rione se leva, les yeux baissés. « J’ai renoncé depuis longtemps à l’idée que les gens, dans leur grande majorité, pouvaient faire preuve d’un minimum de correction et je… ne me lie pas aisément. Je ne sais pas exactement pourquoi vous m’aidez, mais je vous en suis reconnaissante. Merci. »