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— Nous en sommes assez friands, admit Rico.

— Je sais que nous aimerions emmener autant de fusiliers que nous pourrions en embarquer, intervint Geary, mais nous ne prendrons avec nous que deux de vos bataillons, colonel. La place restée libre sur le Mistral sera réservée à une évacuation d’urgence. Il y a de bonnes chances pour que le nombre des évacués excède malgré tout la capacité du Mistral, auquel cas nous transférerons ensuite les gens sur de plus gros vaisseaux.

— Sous le feu ? demanda Young.

— Peut-être. Je sais que les conditions ne sont pas idéales, loin de là.

— Certains de mes pilotes de navette se porteront volontaires pour procéder aux transferts sous les tirs », déclara Rico.

Young renâcla. « Bizarre comme les fusiliers n’ont jamais aucun problème à trouver des volontaires.

— Nos sergents sont très persuasifs. Amiral, j’aimerais sincèrement avoir une idée plus précise de la menace que nous devrons affronter. Je sais ce que les vaisseaux obscurs peuvent nous balancer, mais à quelle espèce d’infanterie aurons-nous affaire ?

— Je ne pense pas que nous devrons affronter des troupes régulières, dit Geary. Peut-être des paramilitaires ou des forces de sécurité lourdement armées.

— Des forces de sécurité lourdement armées ? Comme des équipes d’intervention de la police, voulez-vous dire ? Ou quelque chose d’équivalent aux Vipères des Syndics ? avança Rico en citant les forces spéciales fanatisées qui travaillaient pour le SSI des Mondes syndiqués.

— Je n’en sais rien, répondit Geary. Y a-t-il dans l’Alliance quelque chose qui ressemble aux Vipères ?

— Des bruits circulent, amiral, mais je ne connais personne qui ait vu leurs pareils.

— Tant mieux. Je ne crois pas qu’on aurait pu garder entièrement secret un tel service. Si nul n’en a vu la trace, c’est probablement qu’il n’existe pas. » Geary prit brusquement conscience que ce dernier argument était pour le moins faiblard dans le cours d’une discussion portant sur une attaque d’Unité Suppléante, mais il préféra ne pas soulever ce point. « Voici l’autre aspect le plus difficile : les gens que nous rencontrerons croiront peut-être défendre les intérêts de l’Alliance. »

Les deux officiers le dévisagèrent. Rico se reprit le premier. « Nous allons devoir combattre des forces de l’Alliance ?

— Peu probable, répondit Geary. Comme nous l’avons vu à Ambaru, les soldats de nos forces terrestres ont refusé d’engager le combat contre des fusiliers de l’Alliance même quand on les a gavés de données fallacieuses. Et, selon les informations dont je dispose, on ne devrait pas trouver de troupes régulières à la base des vaisseaux obscurs. Toutefois, une force paramilitaire pourrait l’occuper et avoir reçu l’ordre de nous résister. Si nous rencontrons une telle situation, colonel Rico, je dois savoir au plus vite que vous êtes capable de la désamorcer, faute de quoi vous devrez éliminer tous ceux qui tenteront activement de s’opposer au succès de votre mission. »

Il se tourna vers Young. « Et, si d’aventure quelques vaisseaux obscurs se trouvent encore sur place quand nous frapperons leur base et s’avisent de nos intentions, ils chercheront à vous liquider. Ce sera formidablement risqué. S’ils décident de faire de vous leur cible prioritaire, j’aurai le plus grand mal à les en dissuader. Vous devez en être informée. »

Young sourit largement. « Nous avons l’habitude, amiral. Connaissez-vous cette blague, comme quoi TA ne veut pas dire transport d’assaut mais Tirez À vue ?

— Nous ferons le boulot, amiral, affirma le colonel Rico. Il s’agit bien de défendre l’Alliance, n’est-ce pas ?

— Vous avez ma parole, dit Geary. J’ai reçu des ordres du plus haut niveau pour cette opération.

— Alors nous ferons le travail, du moment que le bus nous conduit là-bas. »

Le capitaine Young lui décocha un regard de travers. « Le bus amènera vos resquilleurs là-bas, promit-elle. Après, ce sera à vos fusiliers de payer l’ardoise.

— Nous la gagnerons haut la main. C’est entendu, amiral.

— Excellent, lâcha Geary. Certaines réparations d’urgence doivent encore être finalisées sur quelques vaisseaux, si bien que la date du départ n’est fixée que pour dans une petite semaine. Que votre vaisseau et vos soldats se tiennent prêts.

— Nous pourrions lever le camp dans les vingt-quatre heures, amiral, affirma Young. Dès que les fusiliers seront prêts à embarquer. Nous avons déjà chargé le plus gros de leur équipement.

— Vingt-quatre heures », concéda Rico.

Après leur départ, Geary consulta les dernières mises à jour relatives à l’entretien et au réapprovisionnement. Le Formidable restait le dernier croiseur de combat immobilisé et il faudrait expédier les travaux en urgence dans les prochains jours. Tous les systèmes de propulsion principale du Téméraire seraient en état de marche dans trente-six heures, résultat obtenu sous la menace de le laisser à quai au départ de la flotte. Cette honteuse perspective (être le seul cuirassé à manquer le prochain combat) avait poussé son équipage et le personnel de maintenance qui collaborait avec lui à fournir des efforts surhumains pour achever les réparations.

L’amiral Timbal était en train de vider les réserves de Varandal de toutes les cellules d’énergie disponibles. En un si bref délai, ça ne suffirait pas à remplir à ras bord tous les vaisseaux, mais seuls les cuirassés et les croiseurs de combat seraient à moins de cent pour cent au départ. On faisait également face à une exaspérante pénurie de missiles spectres, et on était même, étonnamment, à court de mitraille. « Ce ne sont que des billes ! avait protesté Geary. De petites sphères métalliques ! En fabriquer davantage ne devrait pas être compliqué ! » Mais d’autres priorités s’étaient présentées entre-temps, de sorte que quelques vaisseaux partiraient les poches aux trois quarts vides.

La bonne nouvelle en matière de réserves de vivres, c’était qu’on avait chargé à bord des vaisseaux une énorme quantité de barres énergétiques susceptibles de servir de repas en situation de combat. La mauvaise, en revanche, c’était que presque tous les cartons étaient remplis de ces infectes Danaka Yoruk, manifestement stockées pour nourrir les prisonniers de guerre syndics qui, de manière assez inattendue, avaient ensuite été confiés à la garde de représentants du système de Midway. Geary envisagea sérieusement de prendre au mot la suggestion de Desjani : se servir des Danka Yoruk comme d’un substitut à la mitraille manquante.

Fatigué de consulter les rapports de situation, d’expédier ou de remettre à plus tard ce qui devait l’être, de s’assurer que les bonnes personnes occupaient le poste qui convenait, de planifier ce qu’on devrait faire à Unité Suppléante et de coordonner les interventions, Geary réussit enfin à trouver le sommeil.

« Amiral ! »

Il se réveilla en sursaut, secoué par le caractère d’urgence de l’appel. Il s’assit sur sa couchette et écrasa de la paume le plus proche panneau de com. « Ici ! Que s’est-il passé ?

— Ils… Ils sont revenus, amiral ! »

Onze

« Qui est revenu ? » rugit Geary, persuadé lui-même d’y mettre une patience infinie. Seuls les accents plus surpris qu’effrayés de son interlocuteur (effroi qu’il se serait attendu à ce que la voix de son correspondant le trahît s’il s’était agi des vaisseaux obscurs) le retinrent de foncer vers la passerelle sans attendre d’autres explications.

« Les Danseurs, amiral. Un paquet !

— Les Danseurs ? » C’était bien la dernière chose qu’il aurait escomptée. Il afficha l’image sur l’écran de sa cabine et la fixa, les yeux écarquillés.