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— Il est pas vrai, celui-là, fit Desjani.

— En fait, c’est exactement la question que je me posais, répondit Geary. Est-il réel ou bien avons-nous sous les yeux une sorte d’avertissement préenregistré qu’auraient déclenché nos tentatives de communication ?

— Un répondeur automatique ? » Desjani héla ses lieutenants d’un geste. « Vérifiez auprès de nos experts s’ils peuvent affirmer que ce message nous a été adressé par un être humain. »

La réponse ne tarda pas : « Non. C’est une image numérique, assura l’officier des trans. Nous pouvons dire quand il a été envoyé, mais il n’y a pas de signature jointe qui nous permettrait de préciser la date où on l’a établi. Sans ce chronotimbre incorporé dans l’enregistrement, nous sommes dans l’incapacité de dire s’il a été composé il y a quelques heures ou six mois plus tôt. » Il marqua une pause. « Mais, reprit-il, et ce n’est qu’une opinion personnelle, je ne crois pas à un message en direct. L’expression était très basique : le genre de formules qu’on nous demande d’insérer dans des communications destinées à servir sur le long terme. »

Geary opina. « Toutefois, même préenregistré, ça ne signifie pas qu’il n’a pas été envoyé par quelqu’un plutôt que par un répondeur automatique.

— C’est vrai, amiral. Ça ne nous apprend rigoureusement rien, sinon que ceux qui occupaient ces installations n’ont pas franchement posé devant leur porte un paillasson de bienvenue à l’intention des visiteurs. »

Six heures plus tard, des sirènes d’alarme se mettaient à carillonner impérieusement. Geary était déjà en route vers la passerelle et il y arriva au pas de course avant de quasiment bondir dans son fauteuil près de Tanya Desjani. « Que se passe-t-il ?

— Nous en avons probablement débusqué quelques-uns », répondit-elle, laconique.

Geary dut étudier un bon moment son écran avant de comprendre ce qu’il avait sous les yeux.

Les immenses portes de certains des hangars d’amarrage étaient en train de coulisser vers l’intérieur. Compte tenu de la position actuelle de la flotte, son angle de vision ne lui permettait pas encore de distinguer ce qui se trouvait derrière, mais il n’y avait qu’une seule raison plausible à cette activité : les hangars s’apprêtaient à larguer quelque chose. « Quoi que contiennent ces hangars, nous devrions pouvoir l’affronter aisément. Ils ne peuvent pas abriter une force bien puissante. »

Il n’avait pas terminé sa phrase que les portes d’un nouveau hangar s’entrouvraient.

« Voulez-vous bien cesser ce manège ? » le tança Desjani.

Mais aucun autre ne s’ouvrit. Ceux qui avaient commencé allèrent jusqu’au bout, leurs portes entièrement rétractées. Là-dessus, plus rien.

« Ça fait une demi-heure, maugréa Desjani. Qu’est-ce qu’ils attendent ?

— Ils sont peut-être vides, spécula Geary. Croyez-vous qu’ils se soient ouverts parce qu’ils nous ont vus arriver ? Une fonction de maintenance automatisée s’apprêtant à s’occuper de nos vaisseaux ?

— Aucun robot de ces hangars ne posera le doigt sur l’Indomptable ! » Desjani fixa son écran d’un œil noir comme s’il allait lui fournir d’autres informations. « Vous avez peut-être raison, finalement. »

D’autres alarmes sonnèrent. « Ou peut-être pas », lâcha Geary.

Les proues arrondies évoquant des museaux de squales qui commençaient d’apparaître à mesure qu’elles émergeaient étaient indubitablement menaçantes. « Des croiseurs de combat, murmura Desjani, comme mise en appétit. Quatre. »

D’autres vaisseaux plus petits se montraient aux ouvertures des hangars. « Six croiseurs lourds, dix légers et vingt et un destroyers, compta le lieutenant Yuon.

— On n’aura aucun mal à les éliminer, exulta Desjani.

— Est-ce bien tout ce que nous aurons à braver ? » s’enquit Geary en faisant les gros yeux à son écran.

À présent extraits de leur quai d’amarrage, les vaisseaux obscurs se rassemblaient en une mince formation rectangulaire, de taille relativement réduite. « L’analyse des caractéristiques de leur coque confirme que deux de ces croiseurs de combat obscurs étaient présents à Bhavan, rapporta le lieutenant Yuon. Nous n’avions pas encore rencontré les deux autres.

— Les deux qui manquaient à Bhavan, souffla Geary. Je me demande bien pourquoi.

— Tout peut se briser, répondit Desjani. Ils avaient probablement besoin de grosses réparations. »

La formation ennemie pivotait et accélérait vers une interception de la force de Geary. « Quatre heures avant le contact sur les vecteurs actuels », annonça le lieutenant Castries.

La jubilation de Desjani avait viré à la suspicion. « Ils nous facilitent un peu trop le travail.

— Content d’apprendre que je ne suis pas le seul à le penser, lâcha Geary. S’ils continuent de foncer ainsi droit sur nous, nous les liquiderons dès la première passe de tir. Voyons s’ils s’entêtent sur ce vecteur. »

Il était loin d’avoir eu son content de sommeil depuis l’arrivée à Unité Suppléante et il se surprenait parfois à piquer brièvement du nez dans son fauteuil de commandement. Une heure plus tard, de nouvelles alarmes le remettaient sur le qui-vive.

« D’autres hangars sont en train de s’ouvrir », expliqua Desjani. La même séquence se reproduisit : ouverture des hangars, longue pause, apparition de proues de vaisseaux obscurs. Mais cette fois les premières à se montrer étaient plus massives que celles des croiseurs de combat. « Cuirassés.

— Quatre, précisa Yuon. Plus quatre croiseurs lourds, huit légers et dix-huit destroyers. »

À l’instar des croiseurs de combat, les cuirassés adoptèrent une étroite formation rectangulaire, évoluant sans doute plus lentement que la précédente mais avec une lourde et terrifiante assurance. Eux aussi pivotèrent et accélérèrent sur des vecteurs menant à une interception de la Première Flotte.

« Plus coriaces sans doute, mais pas hors de notre portée, estima Desjani. On n’a pas pu cacher grand-chose d’autre dans ces hangars.

— Pourquoi ne les a-t-on pas sortis tous ensemble ? se demanda Geary. Pourquoi nous dépêcher deux forces réduites au lieu d’une grosse ?

— Vous n’auriez jamais fait ça, reconnut-elle. La trajectoire de leurs croiseurs de combat vise le centre de notre formation. Black Jack ne s’y résoudrait jamais dans ces conditions.

— Qu’aurais-je fait ? marmonna Geary, cherchant à se mettre à la place du commandant d’un vaisseau obscur. Si je ne disposais que de ces unités pour défendre mes installations, je m’efforcerais de détourner l’attention de l’agresseur par une diversion, mais, même si le subterfuge prenait, je n’aurais fait que gagner du temps. » Il pointa la main vers son écran. « Nous avons deux atouts à protéger. Le Mistral et les Danseurs.

— Les Danseurs sont assez grands pour se défendre tout seuls, m’est avis, objecta Desjani. Leurs bâtiments sont capables de déjouer les manœuvres des vaisseaux obscurs, même celles de leurs quatre croiseurs de combat. Et, si ces croiseurs tentent d’atteindre le Mistral, nous les mettrons en pièces avant qu’ils n’arrivent à sa portée. »

Geary hocha la tête, plongé dans ses réflexions. « En ce cas, pourquoi créerais-je une telle situation si je commandais les vaisseaux obscurs ? Une pièce du puzzle doit nous manquer.

— Ces hangars ne doivent plus abriter grand-chose, répéta-t-elle. Peut-être une autre force se dissimule-t-elle derrière une des deux étoiles. Du moins si l’ennemi s’attendait à notre venue et qu’il a eu le temps de prendre position.