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Puis, Mladen stoppa sa BMW, bloquant l’Albanais.

— Attendez-moi, dit-il à Malko en sortant de la voiture.

Malko le vit monter à bord de la camionnette et rien ne se passa pendant dix bonnes minutes. Inquiet, il décida alors d’aller voir et ouvrit la portière de la camionnette. Mladen Lazorov appuyait son SZ sur le flanc de l’Albanais qui avait viré livide. Son regard allait de Malko à Mladen Lazorov avec une haine indicible. Il leur aurait bien arraché les yeux pour en faire du yoghourt.

— Je lui fais une offre, expliqua le policier. Ou il me dit où il a trouvé ce matériel ou il vient avec moi à la Milicja.

L’Albanais cracha par la portière, lança un regard noir à Mladen Lazorov et jeta une longue phrase au policier croate qui lui en fit répéter une partie, notant un numéro de téléphone. Il y eut encore un peu de dialogue, pas vraiment aimable à voir la tête des protagonistes, puis Mladen Lazorov remisa son SZ dans son holster et sortit de la camionnette. Aussitôt, l’Albanais démarra comme une fusée, abandonnant sur la chaussée le peu de caoutchouc qui restait encore sur ses pneus archi-usés.

— Alors ? demanda Malko.

— C’est un chauffeur de taxi qui lui a procuré le matériel, dit le policier. Un type qui fait la nuit et a une Mercedes bleue. Il lui a dit qu’il pouvait en avoir beaucoup d’autres. Il le rencontre dans un restaurant de Remuza. Il m’a donné le numéro de son taxi.

Une Mercedes bleue…

— Je me demande si ce n’est pas lui qui a participé à la tentative de meurtre contre moi, objecta Malko.

— C’est vrai, dans ce cas, cela change tout, reconnut Mladen Lazorov. Il ne faut pas risquer de l’alerter. Est-ce qu’il connaît votre amie ?

— Non.

— Bon. Ce type m’a dit que le taxi ne travaillait pas le dimanche, nous ne pouvons rien faire avant demain soir. Il prend son travail à dix heures. D’ici là, nous allons essayer de trouver quelque chose sur ce taxi.

Il était presque midi quand Mladen Lazorov déposa Malko devant L’Esplanade. Il devait faire 35°.

Malko se sentait mieux. Enfin il avait deux pistes : Sonia et le chauffeur de taxi. L’une d’elles le mènerait bien au mystérieux Boza. Sans parler de l’attitude étrange du père Jozo Kozari.

Swesda l’attendait dans le hall, en bustier noir et pantalon de soie orange, la taille serrée dans une large ceinture bleue. Ses traits se détendirent en voyant Malko.

— J’avais peur qu’il soit encore arrivé quelque chose, dit-elle. On m’a indiqué un restaurant à Tuscanac, c’est presque à la campagne et ils ont paraît-il, un agneau rôti délicieux.

— Va pour Tuscanac, dit Malko.

* * *

La pelouse bordant le lac de Maksimir disparaissait sous les couples vautrés autour de paniers de pique-nique. Il n’y avait pas beaucoup de distractions à Zagreb durant le week-end, et, dès les beaux jours, toute la ville se retrouvait là.

Le major Tuzla, en civil, assis sur un petit rocher, ressemblait à n’importe quel fonctionnaire en fin de carrière, bavardant avec un vieux copain. Boza Dolac, accroupi sur ses talons, ne semblait pas à l’aise sous le regard perçant de l’officier du KOS. Ce dernier le remit sur le gril pour la vingtième fois. Agacé de rencontrer un grain de sable dans sa belle mécanique.

— Tu es sûr qu’il n’y a pas moyen de le convaincre ? insista-t-il.

Boza Dolac secoua lentement la tête.

— Il est buté, affirma-t-il. Quand je lui ai dit que j’avais une occasion de frapper les Serbes, il a refusé de me suivre. Disant qu’il fallait attendre que les Tchekniks se déchaînent vraiment. Sinon, nous allions faire du tort à notre cause. En plus, il veut récupérer les armes pour les distribuer dans certains villages de Slavonie pour y former des milices d’auto-défense.

Le major Tuzla écoutait tout cela, ivre de rage. Finalement, Miroslav Benkovac n’était pas si idiot que cela… Seulement, lui ne s’était pas donné tout ce mal pour échouer au dernier moment.

— Bien, dit-il, nous allons donc mettre en route notre plan de secours. Est-ce que tout est prêt ?

— Oui, oui, affirma Boza Dolac. Il suffit de deux coups de téléphone. Aujourd’hui, ce serait bien, parce que Miroslav ne se trouve pas à Zagreb.

L’officier serbe lui jeta un regard perçant sans distinguer la moindre faille dans son expression.

— Tu es certain que le délai n’est pas trop court ?

— Certain.

De satisfaction, le major lui donna une petite tape sur l’épaule.

— Alors, vas-y et j’espère que tu ne t’es pas trompé sur les réactions de notre ami. C’est un coup que nous ne pourrons pas jouer deux fois… Si tout se passe bien, tu pars à Belgrade définitivement et je te donne là-bas un travail facile et bien payé. Tu l’as bien mérité.

De toute façon, il n’était pas prudent de laisser Boza Dolac traîner en Croatie. Il savait trop de choses. En cas de capture, cela pouvait se révéler dévastateur… Il se leva, épousseta quelques brins d’herbe et tendit la main à Boza Dolac :

— Mets tout en place et rejoins-moi ce soir au bureau. La sentinelle sera prévenue.

Il s’éloigna en direction de sa voiture pour regagner son petit appartement de la résidence SOPOT I, dans Novi Zagreb. Il y avait un match de foot intéressant à regarder à la télé. Maintenant, les dés étaient jetés, il ne restait qu’à attendre.

Chapitre XIII

Allongé sur le lit, Malko réfléchissait, n’arrivant pas à se déconnecter de sa mission. Après le déjeuner bucolique, ils étaient revenus à L’Esplanade et Swesda lui avait donné une nouvelle preuve de ses talents érotiques, tenant à ce qu’il lui fasse l’amour à peu près sur tous les meubles et même sur le balcon, face à la gare…

Maintenant, elle se détendait en prenant un bain tandis qu’il essayait de trouver un sens logique à tout ce qui s’était passé. Une chose était certaine : les armes volées étaient destinées à une utilisation bien précise. Ceux qui s’en étaient emparés n’allaient pas les garder indéfiniment. Or, à ce jour, il ne voyait pas clairement à quoi elles allaient servir. Que les extrémistes croates, nostalgiques des Oustachis, veuillent former une armée secrète, cela tenait debout. Mais dans ce cas, quel était le rôle des agents de Belgrade présents dans le circuit ?

Il y avait quelque chose de plus grave sous roche… Qui pouvait lui exploser à la figure à chaque instant.

Soudain, il se leva, éteignit CNN et entrouvrit la porte de la salle de bains.

— Je vais faire un tour, dit-il à Swesda.

La piste du chauffeur de taxi n’était pas exploitable immédiatement, mais il savait où habitait Sonia. Quelques heures de planque ne pouvaient pas lui faire de mal. Si les Croates avaient disposé de gens, c’est ce qu’ils auraient dû faire.

Il retrouva facilement l’avenue Prolerterskih Brigada et finit par repérer, non loin de l’entrée de l’immeuble où avait disparu Sonia, un endroit d’où il pouvait l’observer sans être trop visible. Quelques enfants jouaient dans les débris de la voiture détruite, en face, mais, à part eux, il n’y avait pas âme qui vive.

Plus d’une heure s’était écoulée lorsqu’il vit Sonia émerger de l’immeuble. Elle avait troqué son jeans pour une jupe à mi-mollets et portait un petit havresac. Elle gagna l’arrêt du tram un peu plus loin, ce qui donna largement à Malko le temps de prendre position pour la suivre. Apparemment, elle partait en voyage.

Où ?