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Ils me demandent ce que sont mes projets.

— Je n’en ai qu’un seul, mais d’importance, réponds-je : tenter de vivre encore un certain temps.

Laura pense que le plus simple est de me planquer dans leur appartement durant quelques jours, histoire de laisser les choses se tasser. Il faudra faire attention aux femmes de chambre, mais nous trouverons bien le moyen de me soustraire à leur curiosité quand elles viendront faire le ménage.

Je les remercie, les yeux humides de reconnaissance. S’il y a beaucoup de fumiers sur notre boule bleue, on y rencontre parfois des gens de cœur.

Le duc Adrian nous laisse peu après, pour aller player au tennis. Vu son âge, il ne joue plus qu’en double et il a rendez-vous avec trois autres cacochymes de son tonus pour échanger des balles mollassonnes. Ces messieurs se ménagent et, loin de se feinter, jouent aux pieds de l’adversaire. On a les balles de ses artères.

— Vous voulez boire quelque chose ? demande Laura. Le duc ne voyage jamais sans son pur malt de 30 ans d’âge.

— Je ne suis pas fana de whisky, jolie Laura.

— Alors un petit coup de mon bordeaux ?

— Volontiers.

Elle nous sert. Ma pomme, après le second verre, une sorte d’obscur chagrin me chope en pensant aux deux petites Danoises trucidées. C’est à cause de moi qu’elles sont mortes, ces ravissantes friponnes. Va falloir faire gaffe à mes nouveaux hôtes, surtout éviter de les compromettre.

— Vous semblez bien tristounet ? remarque la duchesse de Belleville.

— Ne craignez-vous pas que je vous entraîne dans de funestes mésaventures ?

Elle s’écarquille la prunelle.

— Non. Pourquoi ? J’ai confiance en vous.

Charmante femme. Notre promiscuité me trouble ; pourtant j’ai beaucoup donné. Mais je marche à l’ambiance. De me trouver en tête à tronche avec Laura me fait friser la peau des vestibules. Des dessous mutins traînent sur des dossiers de chaises, qui m’embrasent le sang dans les conduits. Chasse tes convoitises impures, Sana. Tu ne vas pas encorner un hôte aussi aimable, qui te sauve la mise avec tant de spontanéité !

Je cueille, sur la table basse, une brochure consacrée à Phuket, éditée par le tourisme thaï. Elle nomenclate les hôtels du pays. Ça me déclenche une chouette idée.

— Laura, que je fais, vous allez me trouver odieux, mais je voudrais solliciter de vous une aide nouvelle.

— Avec plaisir, répond-elle sans hésiter.

Je lui tends l’opuscule dei.

— J’aimerais que vous téléphoniez à la réception de chacun des hôtels de Phuket en demandant si M. Trembleur et Mme Déprez y sont descendus.

— Facile ! dit-elle.

La voilà qui s’installe devant l’appareil bigophonique, ma brochure en main. Elle commence par appeler le premier de la liste et continue en cochant au fur et à mesure le nom de l’établissement contacté. J’écoute en mordillant les petites peaux mortes cernant mes ongles, ce qui est, chez moi, un signe de forte nervouze.

Laura déballe à chaque interlocuteur le même baratin. Sachant que des amis à elle devaient passer quelques jours à Phuket, elle aimerait les retrouver, etc.

Partout, la réponse est négative.

Lorsqu’elle a terminé son tour de piste, elle m’adresse une mimique désolée. Nada !

— Tant pis, la consolé-je.

Et je viens prendre place auprès d’elle sur le divan. Elle porte un short very short qui révèle ses cuisses brunes recouvertes d’un fin duvet blond, surprenant, non ?

Tu penses que je devrais me retenir d’y poser ma main ? Oui, n’est-ce pas ? Moi aussi. Alors pourquoi la posé-je tout de même ? Pourquoi mes doigts entreprennent-ils un massage caressant ? Quel diable les pousse à s’insinuer entre l’arbre et l’écorce ? Entre le short et la cuisse ? Progressivement, jusqu’à effleurer sa chatte aux rivages frisés ? Hein, dis, pourquoi ? Suis-je donc goret jusqu’à ce point de non-retour ? Quelque part, deux admirables filles que j’ai fait jouir commencent à se minéraliser dans les roideurs de la mort, et ma nature dégueulasse m’entraîne à séduire l’épouse d’un Anglais d’élite (ce qui est tellement rare !) dans la pièce contiguë à celle du drame ! Abjection, Votre Honneur ! Ce forfait me rend malheureux. Je me comporte en renégat de la dignité humaine. Ah ! triste salaud, voyou lubrique, comment rachèteras-tu tant de vilenies, et à quel prix, homme insalubre, chacal insane ?

— Je vous demande pardon, balbutié-je, éperdu de confusion, mais je ne peux m’en empêcher.

— Je vois, répond Laura en dégrafant son short.

Comme je lui suis reconnaissant de partager ma honte ! Quelle femme remarquable ! Et quelle baiseuse ! Une causeuse ! Qui narre sa vie sexuelle en prenant du chibre. Qui laisse se dévider ses souvenirs. S’en grise, s’en dope !

— Oui, vas-y ! Fourre ! J’ai connu un camionneur deux fois plus membré que toi, sans te vexer ! Je faisais du stop. Il m’a fait grimper près de lui et m’a prise dans son camion. Un pinardier ! Il puait comme un bouc ! C’était super ! J’ai cru, quand il m’a sodomisée, qu’il allait me faire éclater la bagouze ! Je suis restée deux jours sans pouvoir m’asseoir. Et la fois où ils étaient quinze ! Des rugbymen ! Toute l’équipe ! J’adore le rugby : c’est un jeu si viril ! J’avais seize ans et j’étais venue dans les vestiaires leur demander des autographes. Les salauds ! Tu parles d’un début ! Oui, plus vite, Santantonio, fais-moi fumer les miches. Griffe-moi les fesses ! Plante tes ongles, n’aie pas peur ! Quoi, le duc ? Il me fait sabrer par son maître d’hôtel quand on va en Ecosse. Un voyeur, le vieux. Un pourlécheur ! Chaque âge a ses plaisirs ! Oh ! dis, tu as de drôles d’initiatives ! Tu mérites ta réputation, grand tringleur. C’est chouette de se faire miser avec un doigt dans le fion et une langue sur les mamelons. Continue comme ça, je vais démarrer. Ah ! Y a que les Français pour vous enfiler aussi somptueusement. C’est aux petits détails qu’on les reconnaît. Le doigt dans le cul, c’est la classe ! J’ai comme envie d’entonner la Marseillaise !

LES IDÉES DU DUC

Ce que j’estime assez exceptionnel dans mon cas, c’est que, plus ma position est critique, plus je trouve des occasions de me vider les burnes, à croire que le désespoir de ma situation est générateur de coups de bite. Ce qui t’indique à quel point la Providence m’a à la chouette pour m’approfusionner ainsi en compensations charnelles.

J’entends la môme Laura qui opère un petit canter sur son bidet. Chouette gosse, aussi peu apte à devenir une duchesse britannique que moi à remplacer au pied levé ce grand glandeur de prince Charles ; encore que si tu me confiais la mère Diana, j’en ferais un meilleur usage que sa pomme ! Huit jours avec moi et elle largue ses langueurs, la pauvrette, son teint d’endive, son anorexie et ses grands chapeaux à la con. Leur orgueilleuse royauté, aux Rosbifs, va périr par le divorce.

Jadis, les princes, on les mariait quand ils étaient encore sur le pot et la dynastie suivait son petit monarque de chemin. Maintenant qu’on les laisse contracter des mariages d’amour, c’est la Berezina. Regarde ces pauvres Windsor, depuis la Margaret, toutes ces faillites matrimoniales ! Qu’un de ces quatre, la Couine Elisabête (et méchante)) elle-même va quitter son duc d’Edimbourg qui finit par se momifier, à toujours marcher à un pas d’elle, les mains dans le dos pour pouvoir flatter les couilles du mec qui le suit de trop près. Edouard VIII qui a cassé la cabane en abdiquant pour la Simpson. Il a donné le fâcheux exemple à ses nièces, petits-neveux et à toute la sainte family. Dorénavant, ça bordélise à Buckingham, les palais crament, les princesses taillent des pipes en public. Où ça va, ça ? que demandait toujours Francisque.