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— Oui… Mais il n’est pas ici, je vous le jure…

Marianne lui flanqua un coup derrière le crâne, avec la paume de sa main. Juste assez fort pour que son front aille heurter le bureau. Puis elle la ramena vers elle en martyrisant sa tignasse décolorée.

Elle continua ensuite à chuchoter des horreurs dans son oreille. À enfoncer le canon dans sa gorge.

— Aubert non plus voulait pas me le donner… Tu veux savoir comment j’ai réussi à lui faire cracher le morceau ? Remarque, ça a pas été très dur… Il a fait dans son froc dès qu’il m’a vue… C’est pas un homme, c’est une larve.

— Arrêtez… Je vous en prie…

— Je garde un très mauvais souvenir de toi, Nadine. C’est grâce à la manière très particulière dont tu as instruit mon dossier que j’ai pris perpète…

Marianne lui asséna un coup de genou au milieu du dos. Lui arracha encore un cri.

— Tu disais tout le temps que la prison allait me transformer… T’avais raison, Nadine. Je suis encore pire qu’avant, tu sais… Bien pire…

Marianne tira à nouveau sur ses cheveux, lui plia la nuque en arrière. La juge ouvrit la bouche de douleur, Marianne y enfonça le canon du pistolet. Testant la méthode de Franck.

— Tu ne m’as laissée aucune chance… C’est à cause de toi que j’ai été obligée de m’évader. Parce que je n’avais aucun espoir de sortir un jour de taule… À cause de toi que j’ai dû accepter ce boulot de merde…

Un son bizarre s’échappa de la gorge du juge.

— On parle pas la bouche pleine, madame le juge ! fit Marianne avec un sourire cruel.

Elle avait pivoté, la fixait à présent dans les yeux. Brandissant le couteau dans la main gauche.

— J’ai tué ton ami, le proc’… Je lui ai explosé sa sale gueule d’enfoiré ! Il est mort dans les pires souffrances… Je me suis amusée avec lui avant de lui fracasser le crâne par terre…

Forestier eut une sorte de sursaut dans la poitrine. Poussa un râle déchirant.

— Tu veux que je fasse la même chose avec toi ? Ça te tente ? Moi, ça me branche bien…

Forestier essaya de dire non avec la tête. Marianne retira le pistolet de sa bouche, lui asséna un coup de crosse dans les dents. L’émail céda sous le choc. Forestier cracha un peu de salive sanguinolente. Puis Marianne lui enfonça de nouveau le canon dans la gorge.

— Où est le dossier, Nadine chérie ?

— Là… Dans… Dans… le… sous…

— Je comprends rien… Dans ? Sous ?

— Dans le coffre… Sous mon bureau…

— Bien ! Tu deviens enfin raisonnable ! ajouta Marianne en se plaçant devant le meuble blindé. Comment on ouvre ce truc ?

— La clef… Dans… Dans mon sac… Dans le portefeuille…

Marianne attrapa le sac à main. En renversa le contenu sur le sol. Dans le portefeuille en cuir, une poche avec fermeture éclair contenait la clef du paradis.

— Il faut… La combinaison, articula Forestier en bavant encore un peu de sang. 3-3-4

Marianne tomba sur une pile de dossiers.

— Pochette mauve, indiqua Forestier.

— Merci, Nadine. Tu es très coopérative…

— Vous avez vraiment tué Xavier ?

Marianne hocha la tête, Forestier fondit en larmes. Marianne eut un pincement aux tripes. La juge pleurait l’homme qu’elle aimait. Ça me ferait mal, à moi aussi, si on me tuait Daniel. Mais justement, je vais faire le nécessaire pour que ça n’arrive pas. Elle vérifia que le dossier était complet.

Voilà, il fallait à nouveau assassiner.

— Et je vais te tuer aussi, annonça-t-elle d’une voix étrangement calme.

— Je vous en prie !

— Fallait y penser avant de te conduire comme la pire des ordures ! souffla Marianne en pointant le silencieux sur la poitrine de la juge.

— Mais je n’ai rien fait ! C’est les jurés qui vous ont condamnée, pas moi !

Ne l’écoute même pas, Marianne. Tue-la et tire-toi vite d’ici. Plus facile à dire qu’à faire. Une fois encore, elle se retrouvait paralysée face à sa cible. Elle se concentrait sur le cœur, était à la bonne distance. Ne restait plus qu’à actionner la gâchette.

— Vous travaillez pour des assassins ! cria soudain Forestier.

Elle sanglotait toujours. Marianne appuya sur la gâchette, s’arrêta à mi-parcours. Serra les mâchoires.

Tire, Marianne. Tire et casse-toi.

Brusquement, quelqu’un brailla derrière la porte. Essaya d’ouvrir.

— Madame Forestier ? Répondez ! Vous êtes là ? Tout va bien ?… Madame le juge !

— Au secours ! hurla la magistrate. À l’aide !

À la même seconde, Marianne eut un sursaut brutal. Son doigt se crispa. La juge s’écroula sur le côté.

— Madame le juge ! Ouvrez ! Que se passe-t-il ?

Marianne contemplait le corps de la magistrate, gisant sur le flanc. Une tache rouge s’élargissait sur son tailleur beige. À l’épaule gauche. Mais elle n’était pas morte. Essayait encore de respirer.

— Au… sec… ours…

Marianne se posta au-dessus d’elle. Son regard d’ombres se cala dans celui de la victime. Elle tira encore. Deux balles en pleine poitrine.

Il n’y a que dans les films que les gens meurent sur le coup. Nadine Forestier agonisait. Encore. Elle se vidait de son sang, partait doucement vers l’inconnu. Mais s’accrochait à la vie. Sans quitter Marianne des yeux. Comme pour lui tatouer sa souffrance de façon indélébile au fond du cerveau. Pour que jamais elle n’oublie. Marianne l’affronta de longues secondes. Puis finit par fermer les paupières. Un sanglot sec lui souleva la poitrine, une énorme bouffée de chaleur lui enflamma le visage tandis que ses mains plongeaient dans la glace. Elle se détourna de la juge qui refusait de mourir. Qui lui pourrirait la vie jusqu’au bout. Je peux pas vider mon chargeur sur elle. Je vais avoir besoin de munitions…

Elle colla son oreille à la porte. Écouta attentivement. Le type n’était plus là. Bien sûr. Il était parti chercher des renforts. Sortir tout de suite et courir jusqu’à l’extérieur ? Ou attendre ? Attendre quoi, d’ailleurs ? D’être coincée dans une souricière ? Elle se rua jusqu’à la fenêtre en enjambant le corps de la magistrate. Deux voitures avec gyrophare sur le toit arrivèrent.

— Putain… Comment je vais me sortir de là ?

— À l’aide ! gémit la juge.

— Crève, murmura Marianne. Crève, putain…

Laurent regarda son patron.

— Faut y aller, Franck. On ne peut pas rester ici… C’est trop dangereux.

— Mais on peut pas l’abandonner ! s’indigna Philippe.

— On n’a pas le choix, répliqua Franck. Elle sait où nous retrouver… Si toutefois elle s’en sort.

— Mais on peut encore attendre ! insista Philippe.

— Non, on ne peut pas ! rétorqua le commissaire. On est à trois cents mètres du Palais. Dans dix minutes, tout le quartier sera bouclé. Et même si elle parvient à s’enfuir, ils la suivront peut-être… On ne peut pas prendre le risque de se faire repérer. Démarre, Laurent… Allons-nous en.

Marianne s’écroula sur le fauteuil de Forestier. Qui venait enfin de rendre l’âme. Aux divinités de la Justice. Ou aux démons de l’enfer. Comment savoir ? Non, Marianne. Une simple machine de chair, de sang, de nerfs. De muscles. Une formidable machine. Mais tellement fragile. Et qui ne marche plus. Ni divinités ni démons derrière tout cela. Un mécanisme brisé. De la viande froide…