Выбрать главу

Elle les emmenait sous la voûte les quatre cognes et le brigadier… Elle s’est rapprochée du corps… elle a retroussé le pantalon…

« Vous les voyez là ses chaussettes ?… Vous les voyez bien !… Eh bien c’est lui qu’a la seule paire !… Y en a pas deux dans la maison !… Nous on en pas nous autres !… Jamais ! Ni Ferdinand ! ni les mômes !… » Elle remontait son propre grimpant pour qu’ils se rendent bien compte les cognes !… « Je suis pieds nus aussi moi-même !… Allez ! vous pouvez bien voir !… On s’est tout le temps privés pour lui !… Pour lui seul… C’est lui qui nous prenait tout !… On y a donné tout ce qu’on avait !… Il a tout eu !… toujours tout ! Deux maisons !… Un journal !… au Palais-Royal !… Des moteurs !… Cent mille trucs fourbis encore, des rafistolages infernals !… qui ont coûté je sais combien !… les yeux de la tête !… tout le bazar ! Pour satisfaire ses marottes !… Je peux même pas tout raconter… Ah ! On l’a jamais contrarié ! Ah ! C’est pas de ça je vous assure qu’il s’est fait la peau !… Il était gâté !… Il était pourri ! Tiens ! Pourri ! Tu veux des fourbis électriques ?… Très bien, mon petit ! les voilà !… Tu veux qu’on aille à la campagne ?… Très bien !… Nous irons !… Tu veux encore des pommes de terre ?… C’est tout à fait entendu !… Y avait pas de cesse !… Pas de quiproquo ! pas de salade ! Monsieur pouvait jamais attendre !… Tu veux pas des fois la Lune ?… C’est parfait mon cœur tu l’auras !… Toujours des nouveaux caprices ! Des nouveaux dadas !… À un môme de six mois, Messieurs, on lui résiste davantage !… Il avait tout ce qu’il désirait ! Il avait même pas le temps de parler ! Ah ! ce fut bien ma grande faiblesse !… Ah ! que je suis donc punie !… Ah ! si j’avais su là-bas ! tenez ! quand je l’ai trouvé la gueule en miettes… ce qu’on viendrait maintenant me raconter !… Ah ! si je l’avais su !… Eh bien moi je peux bien vous le dire ! Ah ! ce que je l’aurais jamais ramené ? Je sais pas ce qu’il en ressentait lui le môme !… Mais moi !… Mais moi tenez ! Moi ! j’aurais eu bien plutôt fait de le basculer dans le revers ! Vous viendriez plus m’emmerder !… C’est là qu’il devrait être !… La sacrée sale pourriture ! C’est tout ce qu’il mérite ! Je m’en fous moi d’aller en prison !… Ça m’est bien égal !… Je serai pas plus mal là qu’ailleurs !… Mais Nom de Dieu ! Ah ! Nom de Dieu ! Non ! quand même ! Je veux pas être si cul !…

— Allez ! Allez ! Venez par ici ! Vous raconterez tout ça aux autres ! Répondez d’abord aux questions !… Assez discuté !… Vous dites que vous le connaissiez pas vous le fusil qu’il s’est tué avec ?… Vous l’avez ramené pourtant ?… Et le petit gars, il le connaissait ?… Il se l’était foncé dans la tête ? Hein ? C’est bien comme ça qu’on l’a retrouvé ? C’est vous deux qui l’avez sorti ?… Comment ça s’est fait d’après vous ?…

— Mais moi j’ai jamais dit ça, que je le connaissais pas le fusil !… Il était là-haut sur la hotte… Tout le monde l’avait toujours vu !… Demandez aux mômes !…

— Allez ! Allez ! Faites pas des réflexions imbéciles ! Donnez-moi tout de suite les prénoms, le lieu de l’origine… le nom de la famille ?… La victime d’abord !… La date, le lieu de naissance ?… Comment qu’il s’appelait finalement ?… Courtial ?… Comment ?… Et où ça qu’il était né ?… Connu ? Occupations ?…

— Il s’appelait pas Courtial du tout !… qu’elle a répondu brûle-pourpoint !… Il s’appelait pas des Pereires !… Ni Jean ! Ni Marin ! Il avait inventé ce nom-là !… C’était comme ça comme de tout le reste !… Une invention de plus ! Un mensonge !… Que des mensonges qu’il avait !… Toujours ! Partout ! Encore !… Il s’appelait Léon… Léon-Charles Punais !… Voilà son vrai nom véritable !… C’est pas la même chose n’est-ce pas ?… Comme moi je m’appelle Honorine Beauregard et pas Irène ! Ça c’était encore un autre nom qu’il m’avait trouvé !… Fallait qu’il change tout !… Moi j’ai les preuves de tout ça !… Je les ai moi !… Je dis rien pour tromper. Jamais elles me quittent !… Je l’ai là mon livret de famille !… Je vais le chercher d’abord… Il était né à Ville-d’Avray en 1852… le 24 septembre !… c’était son anniversaire ! Je vais vous le chercher de l’autre côté… il est là dans mon réticule… Viens avec moi Ferdinand !… »

Le brigadier il transcrivait… « Accompagnez les prisonniers ! » qu’il a commandé aux deux griffes… On est repassés devant la brouette… On est revenus encore une fois… un des guignols a demandé… il a gueulé comme ça de la voûte :

« On peut pas le rentrer à présent ?…

— Le rentrer quoi ?…

— Le corps ! brigadier !… Y en a qui sont venus tout autour ! »

Il a fallu qu’il réfléchisse…

« Alors rentrez-le !… qu’il a fait… Emportez-le dans la cuisine ! » Ils l’ont donc extrait de la brouette… Ils l’ont soulevé tout doucement… Ils l’ont transporté… Ils l’ont déposé sur les dalles… Mais il restait tout biscornu… Il se détendait toujours pas… Elle s’est mise à genoux la vieille pour le regarder d’encore plus près… Les sanglots lui revenaient très fort… les larmes en ruisseaux… elle m’accrochait avec ses menottes… La détresse la chavirait… On aurait positivement dit qu’elle venait seulement de s’apercevoir qu’il était plus qu’une bouillie…

« Ah ! Ah ! Regarde Ferdinand !… Regarde !… » Elle oubliait le livret de famille, elle voulait plus se relever… elle restait comme ça sur le tas…

« Mais il a plus de tête mon Dieu !… Il a plus de tête Ferdinand ! Mon chéri ! mon chéri ! Ta tête !… Il en a plus !… » Elle suppliait, elle se traînait sous les gendarmes… Elle rampait à travers leurs bottes… Elle se roulait par terre !…

« Un placenta !… C’est un placenta !… Je le sais !… Sa tête !… Sa pauvre tête !… C’est un placenta !… T’as vu Ferdinand ?… Tu vois ?… Regarde !… Ah ! Oh ! Oh !… » Les cris d’égorgée qu’elle poussait !…