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On a couru avec l’idiot jusqu’à la rivière… On est revenus par les pigeons… Au retour, j’ai regardé sa mine… Elle les remportait ses images… Certainement qu’elle me trouvait têtu… Elle avait sûrement du chagrin… Elle était pas pressée de rentrer… On est partis tout doucement… On est restés près du pont… Six heures avaient déjà sonné… Elle regardait l’eau… C’est une forte rivière la Medway… Aux fortes marées elle devient même intrépide… Elle arrive par grandes volutes. Le pont vibre dans les tourbillons… Elle est rauque l’eau, elle fait des bruits creux… des étranglements, dans des grands nœuds jaunes…

Elle se penchait juste au-dessus Nora, et puis elle relevait vite la tête… Elle regardait là-bas, très loin, le jour qui sombrait derrière les maisons de la côte… Ça faisait une lueur sur son visage… Une tristesse qui faisait trembler tous ses traits… Ça montait, elle pouvait plus tenir, ça la rendait toute fragile… Ça la forçait de fermer les yeux…

À peine qu’il était terminé le « Hopeful Academy » tout de suite on a eu des départs… Ceux qu’avaient envie de trisser ils ont même pas attendu Pâques… Six externes qu’ont mis les bouts dès la fin avril, et quatre pensionnaires, leurs darons sont venus les reprendre… Ils trouvaient plus que le « Meanwell College » était suffisant… Ils faisaient des comparaisons avec l’autre tôle éblouissante…

Il jetait le « Hopeful », il faut dire, un jus étonnant au milieu de ses grounds… La bâtisse seule valait le voyage… tout en briques rouges, elle dominait Rochester, on ne voyait qu’elle sur le coteau… En plus, ils avaient planté un mât, un immense au milieu de la pelouse avec grands pavois, tous les pavillons au Code, des vergues, les haubans, les drisses, tout un bazar, pour ceux qui voulaient apprendre la manœuvre et les gréements, se préparer au Borda…

J’ai perdu comme ça le petit Jack, mon petit branleur… Il a fallu qu’il transborde, son père voulait qu’il devienne marin… Ils faisaient les « Hopeful » une brillante réclame pour préparer la « Navy… »

À force de perdre des pensionnaires, on est resté seulement cinq au « Meanwell College » y compris Jonkind… Ils se marraient pas les survivants, ils faisaient plutôt la grimace… Ils devaient avoir des comptes en retard, ils pouvaient pas régler leurs notes, c’est pour cela qu’ils bougeaient plus… L’équipe au « Football » elle a fondu en huit jours… Les boutonneux du « Pitwitt », les pâles assistés, ils sont revenus encore deux fois pour demander qu’on les écrase. On avait beau leur expliquer, leur dire que c’était fini, ils se rendaient pas compte… Ils regrettaient leurs « douze à zéro ». Ils comprenaient plus l’existence… Ils avaient plus de rivaux du tout… Ça les déprimait horrible… Ils sont repartis chez eux sinistres…

Les « Hopeful boys », les crâneurs de la nouvelle boîte, ils voulaient pas les matcher, ils les refoulaient comme des lépreux… ils se montaient d’une catégorie… Les « Pitwitt » tombaient à la bourre… Ils se matchaient tout seuls…

C’est à notre table au « Meanwell » qu’on avait des drames sérieux, ça devenait âpre et sans quartier… Nora Merrywin, elle réalisait des prodiges pour que les repas tiennent encore. On a vu les bonnes se barrer… D’abord Gertrude, la plus âgée, et puis quatre jours après, Flossie… Il est venu une femme de ménage… Nora touchait presque plus aux plats… Elle nous laissait la marmelade, elle y touchait pas, elle mettait plus de sucre dans son thé, elle s’envoyait le porridge sans lait… y avait du surplus pour nous autres… Mais j’avais bien honte quand même… Quand le dimanche on passait le pudding, y avait des précipitations à s’en retourner les cuillers… On ébréchait tous les plats… C’était la curée… Merrywin, il s’impatientait, il disait rien, mais il s’agitait de partout, il remuait sans cessé sur sa chaise, il tapotait sur la table, il écourtait les oraisons pour qu’on se barre plus vite… Ça devenait un lieu trop sensible la salle à manger…

En classe, il refaisait la même chose… Il montait sur son estrade… Il mettait sa cape, la plissée, la magistrale robe… Il restait derrière son pupitre et tout embusqué dans sa chaise, il fixait la classe devant lui… Il se remettait à cligner, il tortillait tous ses doigts en attendant l’heure… Il parlait plus aux élèves… les mômes pouvaient faire ce qu’ils voulaient…

Il maigrissait Merrywin, déjà qu’il avait des oreilles immenses, décollées, maintenant c’était comme des ailerons… Les quatre mômes qui subsistaient, ils faisaient du barouf comme trente-six… et puis ça les amusait plus… alors ils se trissaient simplement… ailleurs… au jardin… dans les rues… Ils laissaient Merrywin tout seul, ils venaient nous rejoindre à la promenade. Plus tard, on le rencontrait, lui, sur la route… on le croisait en pleine campagne… on le voyait arriver de loin… il venait vers nous en vitesse, perché sur un énorme tricycle…

Hello Nora ! Hello boys ! qu’il nous criait au passage… Il ralentissait, une seconde… Hello Peter ! qu’elle lui répondait bien gracieuse… Ils se souriaient fort courtoisement… Good day, mister Merrywin, reprenaient tous les mômes en chœur… Il renfonçait dans la direction. On le regardait s’éloigner, pédaler à perte de vue. Il était rentré avant nous…

La manière que ça tourniquait, je sentais mon départ bien proche… J’ai encore cessé d’écrire… Je savais plus quoi dire, inventer… J’avais tout imaginé… J’en avais marre des salades… Le jeu valait plus la chandelle… Je préférais jouir de mon reste, sans être tracassé par des lettres. Mais depuis que le Jack était parti, c’était plus si drôle au dortoir… le petit saligaud, il suçait fort et parfaitement…

Je me branlais trop pour la Nora, ça me faisait la bite comme toute sèche… dans le silence, je me créais d’autres idées nouvelles… et des bien plus astucieuses, plus marioles et plus tentantes, des tendres à force… Avant de quitter le Meànwell, j’aurais voulu la voir la môme, quand elle travaillait son vieux… Ça me rongeait… ça me minait soudain de les admirer ensemble… ça me redonnait du rassis rien que d’y penser. Ce qu’il pouvait lui faire alors ?

J’étais déjà bon au vice… Seulement comme jeton, c’était pas des plus faciles… Ils avaient des chambres séparées… Lui, la sienne, c’était à droite, dans le couloir, juste auprès du « papillon… » Là, c’était assez pratique… Mais pour viser chez Nora, il aurait fallu que je sorte par l’autre côté du dortoir et puis encore prendre l’escalier… c’était après les lavabos… C’était difficile… compliqué…

Comment qu’ils baisaient ? Ça se passait-il chez lui ? chez elle ? Je me suis résolu… Je voulais tout de même me payer ça… J’avais attendu trop longtemps…

N’étant plus que cinq pensionnaires, on pouvait bien mieux circuler… D’ailleurs il venait même plus le soir le daron pour faire la prière… Les mômes s’endormaient très vite une fois qu’ils s’étaient réchauffés… J’ai attendu qu’ils roupillent, j’ai entendu les ronflements et puis j’ai renfilé ma culotte, j’ai fait semblant d’aller aux gogs… et alors sur la pointe des pieds…