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« Et alors ?… alors ?… »

Je demande.

« Un homme nu vient !… un homme tout nu ! »

Et de rire !… en voilà une divination !…

« C'est tout ?

— Oui, c'est tout ! et des flammes !… plein de flammes ! »

Que c'est original !

« Maintenant venez voir chez moi !… faites-moi l'amitié ! »

Elle nous convie…

« Il vous faut des livres, n'est-ce pas ?… des livres français pour Mme Céline… la bibliothèque de mon frère est juste à côté de ma chambre, vous verrez, vous choisirez ! lui ne lit plus ! »

En avant ! on lève la séance… je crois surtout qu'elle veut nous parler, sans Kretzer et sans la fillette… bon !… quelque chose à nous dire ?… Cillie et Mme Kretzer partent d'abord… on les entend dans l'escalier… nous restons avec la tante et la petite bossue… bien !… maintenant elle n'a pas à se gêner…

« Vous êtes invités demain soir à dîner, la ferme en face !… bien entendu tous les trois !… je vous préviens !… chez mon neveu… vous l'avez vu !… l'invalide !… vous connaissez sa femme aussi, Isis !…

— Oui !… oui !… certainement !

— Vous les connaîtrez bien mieux ! le Landrat sera invité aussi !… Harras aussi serait invité s'il n'était pas parti au diable !

— Nous sommes enchantés ! »

Là, elle remarque, sec :

« Moi, on ne m'invite pas ! »

Soupirs… et elle continue…

« Peut-être sa mère sera invitée… vous la verrez !… attention, sa mère !… sa mère adoptive !… comtesse Tulff-Tcheppe !… ils sont de Königsberg… de parfaite noblesse… mais pas Isis ! non ! du tout !… peut-être une bâtarde ?… enfant adoptée, mais pas plus ! situation délicate, n'est-ce pas ? Tulff-Tcheppe, le père, était un coureur !… qu'il l'ait ramenée à sa femme ? la belle histoire !… Isis en veuille à tout le monde !… de cette fausse naissance ! vous voyez ça !… méfiez-vous !… »

Va pour Isis, fille adoptive !… qu'est-ce qu'on avait à nous mêler ? écarts de noblesse ! que l'Isis était dangereuse ? alors ?… elle avait de belles relations, si elle voulait se débarrasser !

Là, notre amie Marie-Thérèse, elle vraie héritière si je comprenais bien, et elle la prochaine comtesse von Leiden !… nous allons voir son local… pas de notre côté du manoir… l'autre tour, côté plaine… il fait bien noir dans l'escalier, on emmène Bébert dans son sac… un étage… vers l'autre aile… l'autre tour… encore un étage… nous voici chez elle… deux grands chandeliers Louis XV… elle nous allume tout… elle manque de rien cette demoiselle… très coquet boudoir je vois, vous diriez une rétrospective de portraits de famille et de vieux petits meubles… mais pas bric-à-brac, pas boutique comme chez Pretorius… non… du goût, même les broderies, paysannes, locales, sont intéressantes… cette demoiselle Marie-Thérèse est une fine personne, son étage est très agréable… ses fenêtres, pas des meurtrières comme chez nous, donnent sur la plaine… on peut admirer le grand spectacle… ils sont au moins cent projecteurs en action au-dessus de Berlin, à badigeonner… ça fait de la clarté jusqu'ici… c'est l'alerte comme à l'habitude, tout le ciel des nuages, tout bel écran, d'un horizon l'autre… l'Apocalypse tant annoncée, l'affaire sino-russe-yankee aura pas besoin de projecteurs ! rancart accessoires !… nous là toujours chez cette Thérèse nous attendions les confidences !… Lili, La Vigue, moi… nous étions venus pour…

« Mes chers amis, vous savez, ne parlez jamais de rien devant cette femme Kretzer… ni devant Kracht… ni aux autres… tout est répété !… vous avez rapporté un pain… je l'ai vu… bien sûr ils l'ont vu aussi !… et du miel !… faites attention !… moi-même je me méfie extrêmement !… je suis guettée par ceux d'en face, par mon propre frère et mon neveu… ils ont des espions partout… la petite Cillie est délicieuse, n'est-ce pas ? jolie comme un cœur, je l'aime bien, elle aussi je crois, mais tout de même elle raconte en face tout ce qu'elle a pu voir… elle viendra chez vous pour le lait, alors elle regardera tout… j'espère que vous n'avez pas d'armes ?

— Non ! oh non ! Mademoiselle !

— Il me fait plaisir de vous montrer mon local… vous me faites l'honneur… mais vous devez redescendre bientôt… ces gens du bureau vous ont vus… je vais vous dire vite tout ce qu'il faut que vous sachiez !… mon frère en bas à son étage avec ses petites Polonaises se livre à ses perversités… il est très vieux, quatre-vingt-quatre ans, un âge n'est-ce pas ?… où vous ne pouvez plus rien dire !… il est tourné tout bébé avec ces fillettes, il urine sur elles, elles urinent sur lui, ils s'amusent !… je n'ai pas peur de vous l'avouer, vous le savez, elles le fouettent ! il a vécu trop vieux, c'est tout !… des infirmières, ce serait pire !… nous avons eu des infirmières, elles lui volaient tout !… celles-ci veulent seulement du sucre et des gâteaux secs… enfin je vous dis tout ça très vite, il faut… vous allez redescendre… mon frère, les petites filles, sottises !… Harras ?… votre ami Harras plus grave, il ne vaut pas grand-chose !… il ne vous a pas tout montré… vous le découvrirez !… moi je le connais !… j'ai bien failli l'épouser… Simmer aussi j'ai failli… ça ne s'est pas fait !… 1912 !… nous nous connaissons !… Isis ce n'est pas le même moral, les mêmes principes, elle a capturé mon neveu !… ce soir vous irez à la ferme, bien !… ne parlez pas de moi !… cette femme me hait, je ne l'aime pas !… elle n'est pas laide, je conviens, mais quelle âme ! comment s'est-elle fait adopter par les Tulff-Tcheppe… personne ne le sait !… Harras peut-être ?… en tout cas elle ne sera jamais comtesse von Leiden !… elle est baronne par mon neveu, et c'est tout !… il faudrait que je meure, je ne veux pas !…

— Mais voyons, voyons ! »

Quelle idée risible ! oh ! ah ! ah !

« La femme n'est pas philosophe, jamais ! n'est-ce pas Docteur !… les hommes si dégradés sensuels cochons qu'ils soient sont avant tout : philosophes !… une perte de temps pour les femmes !

— Tout à fait juste, Mademoiselle ! pour nous taire, soyez assurée ! et nous parlons l'allemand si mal !… rien dire nous sera bien facile !

— Vous me comprenez très bien Docteur !… Harras connaît toutes ces choses, parfaitement ! le Landrat aussi !… ils s'amusent avec cette femme !… et bien d'autres ! une seule héritière ici ! moi !

— Bien entendu ! »

Nous étions d'accord…

« Personne ne monte jamais ici ! ni elle, ni mon neveu infirme ! vous pensez ! lui est très malade, vous le verrez… très aigri… il lui mène une existence !… oh, elle mérite ! un enfer !… elle vous racontera, laissez-la parler !… elle n'héritera pas quand même !… ni du titre, ni du domaine ! si elle vous parle, je n'ai rien dit, je n'existe pas !

– Évidemment !

— La petite fille est héritière… bon ! soit !… après moi ! »

Cette dorade est acharnée, zut ! mais nous on n'a pas nos soucis ?… tickets, s'il vous plaît, un petit peu !… elle a assez parlé d'elle ! elle lâche pas son bout, et nous ?… ça va !… je risque…

« Vos tickets ?… Simmer les garde, vous ne vous êtes pas douté ?… il déteste Harras et tous les S.S. !… et vous avec ! Isis les aura si elle veut, si elle veut se donner la peine ! »

Qu'Isis la très dangereuse nièce se fasse enfiler par les deux… et mille autres !… vétilles… mais nos tickets ? ah, Messaline ! ah, Zornhof !

« Vous verrez Docteur !… vous verrez !

— Mille grâces Mademoiselle ! nous ne verrons rien !

— Oh, pardonnez-moi Docteur !… les hommes traqués perçoivent… perçoivent… »